Grenoble : quel premier bilan pour l’Idex ?

Elle avait décroché le précieux sésame en janvier 2016, après que son dossier ait été retoqué à deux reprises (2011 et 2012). L’Université Grenoble Alpes (UGA), qui regroupe les universités Joseph-Fourier, Pierre-Mendès-France et Stendhal, associée à la ComUE, qui rassemble 10 partenaires académiques, s’était vue décerner la troisième plus grosse dotation (25 millions d’euros par an) du label Initiative d’Excellence (Idex), à égalité avec Lyon. Alors que la période probatoire, fixée à quatre ans, arrive à échéance en 2020, quel est le premier bilan de l’Idex ? Qu’en est-il de la pérennité de ce dispositif ?
(Crédits : DR)

Devenir un campus d'excellence, au rayonnement mondial. Tel était l'objectif affiché par la communauté d'universités et d'établissements (Comue) Grenoble Alpes lors du dépôt de son dossier.

En 2016, cette dernière avait décroché la troisième plus grosse dotation au niveau national, à égalité avec Lyon, de ce Programme Investissements d'Avenir, lancé par le gouvernement français, soit près de 25 millions d'euros par an, sur une période probatoire de 4 ans.

Car face aux 15 millions d'euros de l'Idex, venaient ainsi s'ajouter les 10 millions déjà obtenus au titre des laboratoires d'excellence Labex, un autre volet du Programme Investissement d'avenir (PIA). Avec un mot d'ordre : que cette enveloppe serve ensuite à financer des projets tournant autour des thématiques de planète et société durables, de la santé, du bien-être et la technologie, du numérique et innovation, et des organisations.

"Aujourd'hui, on voit bien qu'il y existe des différences entre les établissement Idex et les autres, ce qui pose d'ailleurs des questions au niveau de la politique générale de l'Etat, car les universités, y compris celles qui n'ont pas reçu l'Idex, sont essentielles au paysage français", estime l'ex-président de la Comue et nouveau président de l'UGA, Patrick Lévy.

Si, pour Frédéric Dufour, vice-président du Conseil scientifique et de la recherche de Grenoble INP, il est encore tôt pour dresser un bilan de la phase probatoire de quatre ans qui va se terminer fin 2019, il constate toutefois déjà plusieurs effets positifs amenés par l'Idex.

"Ce label reconnait qu'un établissement fait partie des dix meilleurs sites en France, toutes disciplines confondues, ce qui est garant d'une certaine dynamique institutionnelle".

Quel effet économique ?

"Nous avons reçu il y a peu un comité scientifique international qui a passé trois jours à Grenoble et qui a estimé que les projets de recherche pluridisciplinaires (CDP) étaient exemplaires. Et cela tombe bien car nous revenons d'Oxford où il existe de bonnes perspectives pour mettre en place de futurs partenariats stratégiques", complète Patrick Lévy.

Yassine Lakhnech, directeur exécutif recherche et valorisation de l'Idex Université Grenoble Alpes, abonde en ce sens :

"La chose la plus marquante pour eux a été l'interdisciplinarité des projets, qu'ils n'avaient pas observée ailleurs. Cela constitue déjà un pas important".

Ce dernier évoque les 17 projets interdisciplinaires (CDP) validés par l'Idex grenoblois, avec, à la fois, des thématiques en lien avec la stratégie nationale, comme l'ingénierie quantique, la science des données ou la cybersécurité, et des dossiers qui se positionnent plus en rupture, comme l'alliance de la science et de la cosmétique, la lecture des couches de matériaux dans le domaine de l'histoire de l'art, ou encore un dossier visant à détecter l'origine de la vie sur d'autres planètes.

Au total, ce sont ainsi 175 projets qui ont été financés grâce à l'Idex (dont les 17 CDP), avec une dotation globale de 39 millions d'euros octroyée à ce jour, pour 275 millions de budget consolidé.

"Aucun de ces gros projets n'aurait pu être financés en dehors de l'Idex, car on a cherché à mettre en avant des dossiers qui n'auraient pas été finançables par les ANR ou les fonds européens. L'Idex s'inscrit donc en complémentarité", affirme Yassine Lakhnech.

En dehors du volet Recherche, souvent mis en avant, l'Idex aura également permis de financer 37 projets dans le cadre de l'appel à projets International Strategic Partnerships (environ 3 millions d'euros), 73 projets en matière de formation (5,1 millions d'euros), 55 projets en lien avec la vie étudiante (423 000 euros) et enfin 44 projets liés au rayonnement social et culturel (1,7 millions d'euros).

Un effet sur 90% des laboratoires

Lorsqu'on lui pose la question, le président de l'UGA, Patrick Lévy, rappelle que "l'Idex a pratiquement tout changé", en offrant un financement à des projets d'envergure et interdisciplinaires, auparavant difficiles à accompagner en raison de leur appartenance à différents organismes et laboratoires. "Car nous étions jusqu'ici face à un financement de la recherche qui est traditionnellement beaucoup plus disciplinaire", ajoute-t-il.

"Près de 90% des laboratoires sont impliqués dans au moins un projet Idex, qui s'échelonne avec un plan de dépenses sur les quatre années", atteste pour sa part Yassine Lakhnech.

D'après les chiffres communiqués par l'UGA, 1 635 personnes auraient ainsi été impliquées dans ces projets, dont 25% provenant des Life Sciences, 35% des Human Sciences, 30% des Engineering Sciences.

Si le taux de succès des dossiers soumis varie beaucoup d'un domaine à l'autre - soit 30% pour les projets déposés en recherche à plus de 60% pour les projets liés à la formation -, Patrick Lévy rappelle que "ce chiffre reste tout de même trois fois supérieur aux projets Agence nationale de la recherche. Sans compter que cela nous a permis de lever environ 10 fois plus de moyens venant du public et du privé, et de provoquer un effet d'entraînement". Et d'ajouter : "Sur le plan institutionnel, il n'est pas certain que nous serions arrivés à développer un projet d'université intégrée qui va nous permettre de rayonner sans l'Idex".

En l'attente d'un nouveau feu vert

Si l'ensemble des acteurs de l'écosystème tablent sur la pérennisation de cette enveloppe à compter de 2020, la course n'est pas gagnée d'avance, comme le rappellent les dossiers des universités de Toulouse et de Sorbonne-Paris-Cité, labellisés Idex, puis retoquées en 2016...

"Nous savons que la pérennisation n'est pas obligatoire. Toulouse a été sortie et il lui sera compliqué de revenir, tandis que la Sorbonne Paris a redéposé un dossier, mais sous un autre périmètre", affirme Patrick Lévy, qui rappelle que d'autres dossiers de la première vague ont quant à eux été reconduits (soit Strasbourg, Aix-Marseille, Bordeaux), tandis que Paris Sciences et LettresSorbonne Universités et Saclay se voyaient reconduire une période probatoire de 18 à 24 mois.

C'est donc une course de fond dans laquelle le tissu grenoblois s'est engagé. D'autant plus que pour poursuivre son intégration, et satisfaire les exigences de l'Idex, qui avait retoqué son dossier en 2011 et 2012 pour "un manque de vision commune d'une université unique", la ComUE s'est déjà engagée dans un nouveau chantier : la création d'une université intégrée, visant à fusionner l'ensemble des établissements grenoblois (dont Sciences Po, Grenoble INP et l'Ensag) ainsi que des organismes de recherche partenaires (CNRS, Irstea, CEA ) au sein d'une même entité à l'échelle de l'agglomération.

"Nous venons de publier un texte fondateur qui précise comment les choses vont se dérouler à compter de janvier 2020", précise Patrick Lévy, à l'UGA.

Avec un vote des statuts du futur établissement intégré prévu au printemps 2019 pour une création de la nouvelle entité début 2020, le calendrier est savamment orchestré.

"Tout se déroulera juste avant que le comité international du jury Idex ne vienne faire une visite sur le site, probablement au printemps 2020 tandis qu'une audition se déroulera certainement à compter de septembre 2020, pour un verdict final début 2021", ajoute Patrick Lévy.

Avec, dans le viseur, le renouvellement souhaité de la dotation Idex, qui pourrait ensuite être acté sans aucune limite de temps.

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