Gel en AuRA : un mois après "il y a de l'impatience dans les exploitations"

Début avril, à travers toute la France, un épisode de gel exceptionnel a ravagé une partie des cultures viticoles, arboricoles et maraîchères. La région Auvergne Rhône-Alpes n'y a pas échappé. Un mois après, plusieurs délégations locales de la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles se sont mobilisées pour alerter les élus sur les conséquences économiques et humaines de ce désastre. Les agriculteurs, toujours en attente d'aides effectives, sont dans l'urgence.
Dans le Rhône, les frères Giroud exploitent 60 hectares, dont une trentaine d'hectares de vigne. L'expert est passé il y a quinze jours, on a 40% de pertes en Gamay et 70% sur les blancs. Il devra ensuite repasser au moment de la récolte pour confirmer ces chiffres. Un long processus.
Dans le Rhône, les frères Giroud exploitent 60 hectares, dont une trentaine d'hectares de vigne. "L'expert est passé il y a quinze jours, on a 40% de pertes en Gamay et 70% sur les blancs." Il devra ensuite repasser au moment de la récolte pour confirmer ces chiffres. Un long processus. (Crédits : DR Zoé Favre d'Anne)

Un mois après l'épisode de gel exceptionnel qui a causé beaucoup de dégâts dans les cultures, "il y a de l'impatience dans les exploitations", a annoncé Pascal Girin, président de la FDSEA Rhône (Fédération départementale des syndicats d'exploitants agricole) à Cécile Dindar, la préfète du même département. La fédération s'est mobilisée ce mercredi, lors d'une visite de la SAS La Léchère, faisant office d'état des lieux, afin d'alerter sur l'urgence de la situation.

Cette gelée noire historique a ravagé jusqu'à 100% de certaines cultures dans la région Auvergne Rhône-Alpes. Certaines sont moins touchées - à hauteur de 40% - d'autres peuvent encore repartir. Chaque exploitation a été impactée différemment et, aujourd'hui, l'heure est encore aux expertises et aux bilans.

"Faire le même travail que d'habitude en se disant qu'on ne va rien récolter"

Une fois cette phase passée, les aides de l'État seront versées. En attendant, les agriculteurs doivent "assurer la maintenance, même s'il n'y a pas de récolte, conserver le personnel et assurer les charges", développe Pascal Girin. "Il va falloir faire le même travail que d'habitude en se disant qu'on ne va rien récolter", ajoute Vincent Giroud, agriculteur à la tête de la SAS la Léchère, avec son frère, Pierre-Olivier.

Les frères Giroud exploitent 60 hectares. Les cerises sont leur "produit phare" avec les pêches. L'exploitation comprend aussi une trentaine d'hectares de vigne. "L'expert est passé il y a quinze jours, on a 40% de pertes en Gamay et 70% sur les blancs", détaille Vincent Giroud. L'expert devra ensuite repasser au moment de la récolte pour confirmer ces chiffres. Un long processus, donc.

Pour les fruits, le ressenti va être plus rapide : "La perte des fruits au moment de la commercialisation, ça va faire un gros trou. [...] Sur nos onze hectares de cerises, on produit environ cent tonnes. Cette année, on espère en faire 40% [...] Pour les pêches on sera en dessous de 20%." Les frères soulignent aussi que, depuis 2014, pour seulement trois hectares de cerises, ils ont dépensé 263 000 euros (avec 65 000 euros d'aides de la Région) pour se prémunir des aléas climatiques (grêle, pluie, drosophile).

Face à la multiplication des aides "les agriculteurs ont besoin de lisibilité"

Les annonces d'aides se sont multipliées depuis avril, mais dans les faits, les exploitants attendent encore de les toucher.

En avril, Julien Denormandie, ministre de l'Agriculture, a déclenché la procédure en vue d'activer le régime des calamités agricoles afin d'aider les exploitants victimes de cet épisode de gel. Cette indemnisation n'est toujours pas intervenue, elle sera plafonnée à 40% des pertes et devrait être versée d'ici la fin de l'année, voire début 2022.

Un fond d'urgence est aussi en train de se mettre en place pour pallier à ces délais et les premiers versements seront en juillet (entre 3 000 et 5 000 euros par exploitations). Mais, selon la FRSEA, "celui-ci ne permettra d'accompagner que 500 exploitations en Auvergne-Rhône-Alpes."

La Région a de son côté annoncé le déblocage de 15 millions d'euros pour aider les exploitants. Cette aide sera forfaitaire en fonction de la nature de l'activité, de la culture, de la taille de l'exploitation et du niveau de perte de production.

La Métropole de Lyon a quant a elle "décidé de verser une aide exceptionnelle de 400 € par hectare cultivé", en complément de ces autres aides. Selon les services de la Métropole, sur son territoire, "une trentaine d'exploitations arboricoles et viticoles est concernée par les impacts de ces épisodes de gel représentant environ 300 hectares de cultures." Cette aide sera voté en juin.

Sous d'autres formes, l'État propose aussi aux exploitants le report et l'exonération des cotisations sociales, le dégrèvements des taxes foncières sur le non bâti, et le recours au chômage partiel, déjà en place à cause de la crise sanitaire.

Une collection d'aides et de mesures qui, misent bout à bout, deviennent un calvaire administratif pour les exploitants. "Les agriculteurs ont aujourd'hui besoin de lisibilité dans la déclinaison des mesures annoncées pour gérer leurs entreprises : quelles modalités d'exonération de charges sociales et patronales ? Quels soutiens pour maintenir l'emploi dans les exploitations alors que le gel a pu induire une surcharge de travail sans qu'il y ait de récolte ? Quels seront les critères précis utilisés dans le cadre du Fonds National de Gestion des Risques en Agriculture ?" demande la FRSEA dans un communiqué.

La question des assurances

Ce gel historique survient après plusieurs années de pertes, réduisant à chaque fois  la part des cultures et de la production assurées, et donc, des indemnisations. "C'est la troisième année de perte, on peut assurer que 43 hectolitres au lieu d'une soixantaine. Ça diminue. On peut en racheter, mais ça coute cher", explique Vincent Giroud.

La question des assurances est incontournable sur le sujet des aléas climatiques. Les exploitants assurés subissent les contraintes citées plus haut, ce qui les pousse parfois à ne plus souscrire de contrat d'assurance. Ou à l'inverse, les assurances ne veulent plus les soutenir. A titre d'exemple, les fédérations régionales viticoles, estiment que seulement 20% des vignerons sont assurés.

Aussi, pour avoir droit aux aides de l'État au titre de calamité agricole, il faut être assuré... Une difficulté structurelle de plus, qui s'ajoute à toutes celles que les agriculteurs ont dénoncés lors de la visite de la préfète. Accusant "un décalage entre la réalité de terrain et l'administration."

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