Pourquoi Everything ne sera pas la prochaine pépite stéphanoise

La startup Everything, décrite un temps comme la pépite stéphanoise émergente, doit mettre la clé sous la porte faute de modèle économique viable. Un de ses deux cofondateurs, Ulysse Lubin, revient sur les raisons de l’échec, sans concession.
(Crédits : DR)

Romain Guiot-Samson et Ulysse Lubin ambitionnaient, pour leur start-up Everything créée en 2016, de devenir le Tripadvisor des services numériques sur le web. Deux ans et demi plus tard, Ulysse Lubin le reconnait sans détour, ils se "sont bien plantés".

Sans modèle économique viable, Everything met donc la clé sous la porte et les deux jeunes entrepreneurs doivent repartir vers de nouveaux horizons. Si Ulysse Lubin cherche encore sa voie, son acolyte a, de son côté, déjà rebondi en tant que chef de projet au sein de l'agence numérique stéphanoise Webqam.

Les deux jeunes entrepreneurs, tous les deux diplômés de Télécom Saint-Etienne, avaient pourtant imaginé un concept alléchant sur le papier : un guide des services de l'économie collaborative. Face à un modèle difficile à trouver, ils avaient pivoté vers un guide/comparateur des services numériques. Everything avait même réussi à lever 200 000 euros au printemps 2018.

La startup stéphanoise semblait avoir coché toutes les cases : création dans le cadre d'un incubateur (Use'in), levée de fonds, accompagnement par BpiFrance, pitchs multiples dans différents concours, hyper-visibilité dans l'écosystème stéphanois et sur les réseaux sociaux, pivots et repivots...

Alors, qu'est ce qui a cloché dans le chemin que s'étaient tracé les deux jeunes entrepreneurs ?

"Perte de temps"

Dans la droite lignée du Lyonnais Sylvain Tillon, Ulysse Lubin a publié une auto-critique, sur l'application Medium. Un long texte grâce auquel il revient sur les différentes erreurs commises.

Plus de 26 000 personnes ont lu le texte, un score venant saluer une démarche encore peu fréquente en France. Il y relève, notamment, le temps perdu à faire autre chose que convaincre ses clients :

"Avant même de faire notre premier euro, nous avons participé à des concours de startup, intégré un incubateur, fait tout un tas d'afterwork, de conférences, de salons... Nous avons obtenu des bourses, levé des fonds, emprunté, nous avons fait de la presse et j'en passe. Nous avons pris beaucoup de temps à faire tout cela. Mais les préoccupations d'un entrepreneur, surtout en early stage, ne devraient se résumer qu'à deux choses : travailler sur son produit, vendre son produit", analyse-t-il.

"Machine à concours"

Le jeune entrepreneur ne se prive pas, au passage, de tacler les concours de pitchs :

"Faire un business plan sur 3 à 5 ans alors que vous ne savez même pas où vous en serez dans trois mois ne vous servira à rien".

Et de conseiller : "Si vous avez un projet sexy et que vous êtes bon pour pitcher, allez-y. Un, pas plus. C'est très chronophage". Pour Ulysse Lubin, Everything était devenu "une machine à concours". Les deux entrepreneurs ont perdu trop de temps à pitcher à répétition "au lieu de s'occuper de leurs clients".

"L'obsession de la levée de fonds"

Ulysse Lubin ironise : "il existe un phénomène assez étrange à effet boule de neige en entrepreneuriat : au niveau local, la réputation d'une startup ne se crée pas nécessairement sur ses datas mais plus sur le nombre d'acteurs locaux qu'elle arrive à persuader. Et là encore... nous avons été performants".

En effet, Everything avait réussi l'exploit de décrocher la première bourse French Tech de la Loire et avait convaincu Ville, Métropole, Région, Réseau entreprendre etc.

"Nous avons de bonnes têtes et nous sommes doués pour pitcher.", plaisante le jeune entrepreneur dans sa longue analyse.

"C'était une erreur d'aller chercher des fonds si tôt. Lever de l'argent vous fait tout de suite changer de catégorie. Vous passez de la petite startup du coin avec deux mecs un peu allumés, à celle sur laquelle les projecteurs sont braqués et dont tout le monde attend un résultat. C'est très plaisant un temps, et un booster d'égo phénoménal". Et de préciser, avec un humour certain : "J'imagine que réussir doit être encore plus dingue".

Lucide, il conclut ainsi :

"Cette aventure est un échec financier. Cette boite ne nous a pas donné les moyens d'en vivre. Mais elle a été très enrichissante humainement, techniquement et intellectuellement".

Entrepreneur un jour, entrepreneur toujours ? A suivre.

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