Stationnement : à Ambilly, 6 000 habitants, un tarif environnemental se met en place

Le sujet n’est pas réservé aux métropoles. En Haute-Savoie, la petite commune d’Ambilly va déployer un tarif de stationnement appuyé sur la puissance fiscale des véhicules. Une tarification qu’elle va coupler à une modulation liée aux revenus des automobilistes.
La proximité d'Ambilly avec la Suisse attire de nombreux véhicules tampons.
La proximité d'Ambilly avec la Suisse attire de nombreux véhicules tampons. (Crédits : DR)

A Lyon, à Paris, à Bordeaux, à Grenoble... dans plusieurs grandes villes françaises, la question de la modulation des tarifs de stationnement, - en fonction de critères notamment liés à la taille/poids des véhicules, à leur niveau d'émissions polluantes, etc-, fait son chemin. À Lyon, par exemple, la mesure est opérationnelle depuis le début du mois de juin. Dans la métropole grenobloise, la tarification environnementale est en place depuis le mois de mars dernier.

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Et en octobre prochain, elle le sera aussi à Ambilly, commune haut-savoyarde de 6.500 habitants. Preuve, s'il en fallait une, que le sujet de la mobilité en ville, n'interroge pas uniquement les grandes villes.

« Apaiser la ville »

Pour les habitants et les visiteurs de cette commune frontalière de la Suisse, c'est une petite révolution. Jusqu'ici habitués aux quelque 600 places de stationnement de la ville, toutes gratuites, ils vont désormais devoir mettre la main au portefeuille pour garer leur véhicule. Mais pas tous au même niveau.

Après trois réunions de concertation, le conseil municipal a voté il y a quelques jours, non seulement la mise en place, dès le 1er octobre prochain, du stationnement payant donc mais aussi un barème de tarifs adossé à la puissance fiscale des véhicules. Cela ne concerne pour le moment que les abonnements, le stationnement ponctuel sera, lui, facturé le même prix pour tous.

« Pour le moment, en tout cas », précise le maire Guillaume Mathelier (socialiste), élu depuis 2018 et candidat suppléant (non élu) du NFP aux dernières élections législatives (4e circonscription de Haute-Savoie). Il se dit ouvert à une application sur le stationnement ponctuel dès lors que les solutions techniques le permettront.

« Nous avons choisi une modulation des tarifs appuyée sur la puissance fiscale, même pour les véhicules électriques car ceux-là sont aussi de plus en plus gros. Or, cela a un coût pour la collectivité : nous devons prévoir des places plus grandes, rehausser les trottoirs et les passages piétons pour sécuriser les piétons (notamment les enfants) qui sont beaucoup moins visibles depuis ces grosses voitures. Tout cela crée du dérèglement en ville alors que nous devons aller vers l'apaisement », justifie Guillaume Mathelier.

Pour lui, « acheter un véhicule puissant est un choix individuel qui ne doit pas impacter la collectivité. Cette tarification doit permettre cette prise de conscience ».

Tarification environnementale et sociale

La modulation environnementale sera associée à une modulation sociale. Ce serait une première en France, selon le maire d'Ambilly. En clair, le prix de l'abonnement fixé selon la puissance fiscale du véhicule sera aussi modulé en fonction du quotient familial de l'automobiliste.

« Cette double modulation nous a semblé la plus pertinente pour réguler cette problématique du stationnement, tout en étant la plus juste socialement », poursuit Guillaume Mathelier.

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Un point de vue que ne partage pas l'opposition municipale du groupe Ambilly Citoyens (six conseillers), qui a unanimement voté contre cette mesure.

« Sur la forme, déjà, nous avons été associés bien trop tard à ce projet. Sur le fond, nous partageons le constat du besoin d'une ville plus apaisée. J'ai moi-même une fibre plutôt écologiste, je vais travailler en trottinette, je n'ai même pas de voiture. En revanche, en quoi une tarification est-elle sociale quand des automobilistes, avec de faibles moyens, qui ne payaient rien jusqu'ici vont devoir désormais amputer leur pouvoir d'achat (même  si c'est moins que les personnes avec de plus hauts revenus) ? Et puis, certains ne peuvent pas faire autrement que d'avoir un véhicule », regrette Julien Feraud, un des membres du groupe Ambilly Citoyens.

Il aurait préféré que les habitants d'Ambilly, ainsi que les salariés travaillant sur la commune, soient exemptés de ce stationnement payant. Ce qu'a refusé la majorité municipale.

« L'ambition de cette tarification, c'est surtout d'inciter à être vertueux. Et ce n'est pas parce qu'on habite Ambilly ou qu'on y travaille qu'on est forcément plus vertueux que les autres. L'idée est bien de faire prendre conscience de ce sujet à l'ensemble des utilisateurs de la commune », répond Guillaume Mathelier.

Une logique que dénonçait, il y a quelques semaines dans nos colonnes, Pierre Chasseray, délégué général de l'association 40 millions d'automobilistes, à propos de la politique grenobloise en matière de stationnement.

« C'est de la grossophobie appliquée aux voitures. Les SUV polluent plus que quoi ?  Est-ce qu'un SUV moderne pollue plus qu'une petite voiture diesel datant de 15 ans ? Certainement pas. C'est complètement stupide».

Réduire les voitures tampon

Si la question du stationnement est si importante pour cette petite commune haut-savoyarde, c'est aussi parce qu'elle accueille un grand nombre de véhicules issus des territoires voisins. Des voitures tampons qui viendraient profiter de la gratuité des rues d'Ambilly pour y stationner toute la journée, et dont les propriétaires seraient allés prendre le Leman Express voisin pour se rendre ailleurs, et notamment en Suisse. Une vision partagée par l'opposition comme la majorité mais les flux n'ont néanmoins pas été chiffrés précisément.

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Ce déploiement du stationnement payant va se traduire par la mise en place de 46 horodateurs qui seront exploités par la société Flowbird, pour le compte de la régie municipale. 275.000 euros sont investis par la Ville pour l'achat de ces équipements, la formation et le boitier de verbalisation, 100.000 euros pour le marquage des places et la signalétique. Par ailleurs, deux agents de surveillance de la voie publique (ASVP) vont être recrutés. Des recettes de « quelques centaines de milliers d'euros » sont attendues à terme qui seront fléchées, assure le maire vers les réfections de voiries.

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