Processeurs intelligents : Kalray se rêve toujours en Nvidia européen et entame son changement de dimension

Né d’un essaimage du CEA Leti en 2008, le concepteur isérois de processeurs intelligents Kalray vient de boucler un nouveau tour de financement de 10 millions. Une goutte d’eau face au capital levé jusqu’ici (plus de 100 millions), mais qui vise à l'accompagner dans sa conquête des marchés du edge-computing et de la 5G. La pépite compte désormais concrétiser un premier changement de dimension dès cette année, avec une cible de 20 millions de chiffre d'affaires, puis de 100 millions à compter de 2023/2024. Elle vient de racheter le britannique Arcapix afin de muscler son offre dans le domaine du stockage de données.
Kalray vise désormais les 20 millions d’euros de chiffre d’affaires, malgré les tensions qui demeurent sur les chaînes d’approvisionnements mondiales.
Kalray vise désormais les 20 millions d’euros de chiffre d’affaires, malgré les tensions qui demeurent sur les chaînes d’approvisionnements mondiales. (Crédits : DR)

Le fabricant néerlandais de puces NXP ne s'y était pas trompé lorsqu'il y a investi 9,95% au sein du capital de Kalray en 2020, aux côtés d'investisseurs historiques comme Safran, MBDA et l'Alliance Renault-Nissan-Mitsubishi.

Car la pépite iséroise, née d'un essaimage en provenance du CEA Leti, se rêve toujours comme un futur « Nvidia européen », avec ses processeurs intelligents destinés aux marchés des datacenters, de l'edge computing, de la 5G, ou encore de l'automobile et des supercalculateurs.

En développant une nouvelle génération de processeurs intelligents permettent le traitement de données massives en parallèle, Kalray promettait déjà une technologie adaptée aux grands flux de données à gérer dans les domaines du cloud et du edge computing par exemple, en vue de générer des prises de décision critiques et rapides, en temps réel.

Et depuis la fin avril, la société est même "en train de changer de dimension avec, en particulier, le rachat de la société Arcapix et un objectif de croissance forte de notre chiffre d'affaire dès cette année", annonçait son Ceo, Eric Baissus.

De 1,3 à 100 millions d'euros projetés

Côtée sur Euronext Growth depuis 2018, l'isérois avait en effet enregistré un chiffre d'affaires de 1,3 millions en 2019, mais sa cible est déjà relevée à 20 millions pour 2022, et même à 100 millions à compter de 2023...

Jusqu'ici, elle s'était déjà préparée en levant jusqu'à 106 millions, depuis sa création en 2008. Et elle vient désormais de clôturer à nouveau un financement de 10 millions d'euros, auprès d'un groupe d'investisseurs européens, à travers une émission d'obligations convertibles pour un montant de 6,5 millions d'euros d'une part, et d'une émission d'obligations simples de l'autre, pour un montant de 4,2 millions d'euros. Sa cible : l'accompagner dans sa conquête des marchés de la 5G et du edge computing.

 « Cette opération vient renforcer notre trésorerie et financer nos dépenses au cours des 18 mois à venir. Car nous avons des objectifs ambitieux en termes de croissance, qui vont se traduire par un effort supplémentaire au niveau des ventes et du support-client », confirme Eric Baissus, Ceo de Kalray.

De quoi soutenir la dernière ligne droite avant l'arrivée en production fin 2023 et 2024 de sa nouvelle génération de cartes d'accélération, destinées au marché du edge computing et de la 5G.

Renforcer son offre liée au stockage de données

En parallèle, la pépite grenobloise vient également de se renforcer sur un champ, devenu clé pour son marché, avec le rachat du britannique Arcapix (montant : NC) visant à « muscler » son activité liée au stockage des données.

« En apportant une solution de gestion du stockage de données intensif, la solution d'Arcapix nous permet d'apporter à nos clients une brique très complémentaire à la nôtre, en vue de proposer une offre plus complète, et de s'adresser à un éventail plus large », confie Eric Baissus.

L'intégration de cet éditeur de logiciel, spécialisé dans les solutions de stockage pour les applications de calculs intensifs, permet non seulement à Kalray de renforcer son offre de traitement massif des données, mais aussi, de muscler ses propres fonctions business et commerciales, là où l'isérois disposait, historiquement, d'un ADN plutôt lié au monde de la recherche. « Notre partenaire travaillait déjà avec de gros clients du domaine des 'life sciences' comme Astrazeneca, mais aussi d'autres secteurs comme Aston-Martin, ou encore la BBC », commente Eric Baissus.

D'ailleurs, les équipes des deux entités en profitent pour fusionner leurs activités de stockage au sein d'une nouvelle business unit, qui sera dirigée par le co-fondateur d'Arcapix, Ben Leaver, tandis que Barry Evans, également co-fondateur d'Arcapix, sera chargé de son développement, précise la société. Les équipes d'Arcapix, qui comprenaient jusqu'ici une soixantaine de collaborateurs, demeureront néanmoins basées sur leurs sites historiques, au Royaume-Uni et aux Etats-Unis.

Et cela est également perçu un atout par la société iséroise : « L'implantation d'Arcapix était intéressante car les Etats-Unis représentent pour nous aussi un terrain de jeu important, où nous disposons d'ailleurs déjà une petite équipe, alors que l'essentiel de notre chiffre d'affaire est réalisé à l'export », précise Eric Baissus, qui devient ainsi aux commandes d'un groupe de 180 salariés, à la suite de cette opération. Une trentaine de recrutements sont également envisagés pour 2022.

Une nouvelle génération de processeurs pour 2023

Après avoir débuté la mise en production de sa troisième génération de processeurs intelligents Coolidge, promettant de multiplier les performances jusqu'ici affichées par 25, Kalray avait remporté un appel à projets Résilience de France Relance l'an dernier avec son projet CARAIBE (pour «CARtes d'Accélération Intelligentes pour les Besoins Edge »), dont le budget s'élevait à près de 10 millions d'euros.

Objectif affiché : travailler sur le développement de sa future génération de processeur MPPA Coolidge (Coolidge2).

« Sur le projet Caraïbes, nous avions deux enjeux, qui étaient d'une part de financer la prochaine génération de puces, mais aussi de voir comment rapatrier et relocaliser une partie de la production industrielle en Europe, voire en France », rappelle Eric Baissus.

Quelques mois plus tard, cette cible est « bien avancée » selon le Ceo, qui pourrait bientôt délivrer des annonces en ce sens. « Nous sommes en négociations avec déjà au minimum un fabricant potentiel qui nous permettrait de rapatrier cette partie de la chaîne en France », assure le Ceo.

Basé sur un modèle "fabless", qui signifie qu'il passe nécessairement par des sous-traitants chargés de produire ses composants, Kalray avait déjà passé un accord avec l'un des plus grands fournisseurs de puces au niveau mondial, le néerlandais NXP (devenu également l'un de ses actionnaires), avec lequel il a d'ailleurs mis sur pied une plateforme de développement commune.

« Il est toujours intéressant d'avoir un très bel acteur des semiconducteurs présent en tant qu'investisseur, mais aussi au board. Cela nous permet d'aborder des sujets de long terme, comme nous le faisons avec des acteurs de l'automobile », estime Eric Baissus.

Une cible inchangée, malgré les tensions en matière d'approvisionnement

Jusqu'ici, l'objectif affiché était de lancer l'industrialisation de sa nouvelle génération de processeurs, à destination des constructeurs à compter de 2023-24. Une cible qui se maintient, même si la situation des chaînes d'approvisionnement est désormais scrutée de près :

« Le contexte actuel nous oblige à devoir anticiper encore plus, en travaillant sur nos stocks du fait de la pénurie de composants, puisque nos cartes sont composées de près de 200 composants différents... On constate aussi que nos clients sont actuellement très pris par la gestion de leurs approvisionnements et disposent de moins le temps de travailler sur les nouvelles générations de produits », relève le Ceo.

Pour autant, il estime que ces nouveaux processeurs lui permettront de partir à la conquête des marchés de la 5G, où Kalray compte apporter notamment une consommation énergétique et des performances décuplées, mais aussi dans les secteurs du edge compting et de l'industrie 4.0, avec des gains espérés dans le domaine de l'automatisation des productions.

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