
Avez-vous pu chiffrer les impacts de la mise en place de la ZFE sur le quotidien des artisans ?
Nous n'avons pas un chiffrage à l'euro près, mais sans aller à ce degré de précision, l'achat d'un véhicule est l'un des principaux postes de charge pour la plupart des artisans. Tous les artisans n'ont pas les moyens d'acquérir un véhicule propre. D'autant que, pour beaucoup, il s'agit de véhicules ateliers qui ont un coût important et qui représentent un investissement sur le long terme. Les véhicules roulant au gaz ou à l'électricité représentent donc un surcoût important à l'achat et, de fait, des délais d'amortissement plus longs.
Certains ont-ils anticipé cette mesure ?
Bien sûr ! Nous rencontrons des artisans qui ont chiffré ces surcoûts et anticipé les conséquences de la mise en place de la ZFE. Certains ont même déjà investi dans des véhicules propres, mais cela reste une minorité.
La CMA, seule ou avec d'autres acteurs, va-t-elle mettre en place des initiatives pour les accompagner à acquérir des véhicules moins polluants ?
La CMA est très impliquée sur ce sujet. Il ne s'agit pas de rejeter cette mesure, mais de prendre le temps nécessaire pour aller vers ces changements. Nous avons déjà mis en place de nombreuses initiatives afin de sensibiliser nos adhérents à cette nouvelle donne. Nous avons d'abord ciblé les métiers les plus concernés, nous continuerons bien évidemment à nous investir pour accompagner l'ensemble des métiers. Mais, si l'on veut que des artisans continuent d'intervenir en centre-ville, il sera impératif de faire certaines concessions. C'est pourquoi, nous avons travaillé avec la Métropole sur le sujet de cette ZFE. Nous avons largement participé à la concertation organisée en amont du vote et nous avons eu l'occasion d'insister sur les spécificités de nos entreprises. Il y a une économie qui existe : si on la bloque, cela posera quelques problèmes.
A quelles concessions pensez-vous ?
Nous regardons si nous pouvons aller vers certaines dérogations, mais à un moment ou à un autre, il faudra réfléchir à des aides financières directes, surtout pour les petites entreprises qui seront les plus pénalisées par cette mesure. Pas forcément des aides très importantes, mais au moins un coup de pouce pour encourager les artisans à investir dans des véhicules propres. Par ailleurs, il faudra aussi réfléchir à l'organisation du travail des artisans. Lorsque vous intervenez sur un chantier et que vous avez besoin d'un camion de béton, s'il n'a pas le droit d'entrer dans la ZFE, cela va être compliqué. Nous devons donc encore travailler avec la Métropole pour affiner les mesures. Nos artisans ont besoin d'un temps d'adaptation et d'accompagnements pour qu'ils puissent se préparer. Sans cela, plus aucun d'entre-eux ne voudra venir travailler en ville et cette mesure sera appliquée au détriment des résidants. On rajoute de plus en plus de problématiques et de contraintes, déjà le stationnement est compliqué pour nos artisans. Nous sommes en train de le régler, il faut faire de même pour la ZFE. Il ne faut pas que ce soient toujours les mêmes qui subissent.
La mise en place de la ZFE peut-elle aussi être de nature à faire évoluer les pratiques de travail de certains métiers ?
Il est bien évident qu'à plus long terme, les artisans devront travailler différemment. D'ailleurs certaines entreprises n'ont pas attendu la mise en place de la ZFE et ont déjà commencé à faire évoluer leurs pratiques. J'en veux notamment pour preuve un nombre de plus en plus important d'artisans plombiers ou électriciens qui se déplacent en triporteurs électriques en centre-ville. Mais ce changement ne peut que se faire que sur la durée et avec de l'accompagnement, pas avec des mesures brutales, sinon certains vont être totalement perdus.
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