En difficulté, le papetier Canson va supprimer 58 postes

Par Aurélien Tournier  |   |  665  mots
Des banderoles ont été apposées sur les grilles du site du Grand Mûrier, à Annonay. Un feu avait aussi été allumé.
Les salariés restent mobilisés sur les sites industriels du papetier Canson. La direction de l'entreprise a annoncé la suppression de 58 postes. Près de 270 personnes y sont employées dans le bassin d'Annonay (Ardèche).

La direction du papetier Canson, leader mondial sur le marché des beaux-arts et propriété du groupe français Hamelin depuis 2007, envisage la suppression de 58 postes lors du premier trimestre 2015. C'est ce qui a été annoncé jeudi 9 octobre lors d'un comité d'entreprise extraordinaire. À l'appel de l'intersyndicale CGT-CFDT, les salariés ont participé à une journée "usine morte" lundi 13 octobre. Le mouvement s'est poursuivi le mardi. Des actions seront de nouveau organisées ce jeudi. "Nous appelons à huit heures de grève. Une manifestation se déroulera aussi en centre-ville d'Annonay, dès 14 heures", précise un délégué syndical.

Un marché qui glisse vers l'Asie

Réduire les coûts et améliorer la rentabilité seraient les motifs invoqués, selon les syndicats. "Nous n'avons pas d'autres éléments en notre possession", poursuivent-ils.

Du coté de la direction, Eric Joan, directeur général du groupe Hamelin rappelle que "le marché est plus faible en France. Il faut corréler cela à la croissance du pays".

"Notre chiffre d'affaires - de 100 millions d'euros - n'a pas baissé, il a même légèrement augmenté. Nous sommes leader dans le papier des beaux-arts et présent dans 120 pays, dont la France. Notre activité a tendance à glisser vers l'Asie et les pays en développement. Nous avons une croissance à deux chiffres en Chine et en Amérique Latine".

Aucun autre détail n'a été communiqué, ni sur la stratégie menée, ni sur le mouvement social. "Une consultation est en cours", ajoute la direction sur ce dernier point.

Des difficultés en France

L'entreprise Canson n'est d'ailleurs pas la seule à envisager la suppression de postes. En Rhône-Alpes, un plan de restructuration a également été annoncé en avril 2014 à l'usine ArjoWiggins, implantée à Charavines (Isère).

Globalement l'industrie du papier rencontre des difficultés en France. C'est le constat de Serge Bardy, député du Maine-et-Loire, qui a dernièrement remis un rapport sur le potentiel du déploiement de l'économie circulaire dans la filière papier recyclé en France. "Sur les dix dernières années, les effectifs de l'industrie papetière ont baissé de 33%, contre une moyenne de 20 à 22% dans le secteur de l'industrie. C'est un secteur qui subit la conjoncture", rapporte l'élu. Le parlementaire note aussi des coûts importants dans les domaines de l'énergie et des matières premières :

"Ces postes de dépenses sont plus élevés en France que dans d'autres pays. Cette filière perd de sa compétitivité. Il faut la lui redonner. Celle-ci a un avenir en France".

Mercredi à Lyon, en marge d'une visite du patron de GDF-Suez, Gérard Mestrallet, le préfet de la région Rhône-Alpes, Jean-François Carenco, a souligné également que : "les papetiers étaient en grande difficulté en raison de problèmes d'approvisionnement en bois". Il appelle à une "réflexion collective" sur le sujet.

Un vrai savoir-faire à Annonay

Lors d'une rencontre ce lundi après-midi avec les délégués syndicaux, Olivier Dussopt, député-maire PS d'Annonay, a assuré les salariés de son soutien et souligné qu'il "ferait tout pour pérenniser le site ardéchois et limiter la casse". Stéphane Hamelin, président du groupe éponyme, précisait d'ailleurs en 2011, dans les colonnes du Dauphiné Libéré, sa volonté de conserver le savoir-faire de l'entreprise à Annonay, quitte à "faire les plans de modernisation, même quand cela [s'avère être] difficile".

En juin 2014 justement, un accord de maintien de l'emploi avait été refusé par plus de 92 % des salariés. La direction, confrontée à des difficultés financières, leur proposait de contribuer au redressement de l'entreprise en travaillant 39 heures par semaine au lieu de 35, sans augmentation de salaire et ceci sur une période de deux ans. La direction se serait alors engagée à ne pas procéder à des licenciements pour raisons économiques. "Nous étions vraiment à mille lieues d'apprendre que les salariés préféraient être au chômage", relève Eric Joan.