L'autorité n'est plus de mise dans le management

Par Laurence Jaillard  |   |  616  mots
L’autorité a-t-elle sa place dans le management ? Cette question était soulevée le 6 novembre dans le cadre de la 4e conférence du cycle "Philosophie et management" proposée par l’IAE Lyon, en partenariat avec Acteurs de l’économie-La Tribune. La réponse n'est pas évidente, à en croire Oliver Faure, directeur Orange Centre-Est, et Marc Gaucherand, docteur en philosophie.

Pour Olivier Faure, directeur d'Orange Centre-Est (10 000 salariés), "les entreprises fonctionnent aujourd'hui de manière horizontale, collaborative, par groupes de projet. Cela permet l'émergence de leaders. Ainsi en terme de management, je parlerai plus de leadership que d'autorité. L'autorité n'est pas statutaire, de la crédibilité, du leadership, ces éléments construisent l'autorité ».

Avec Marc Gaucherand, il était l'invité, le vendredi 6 novembre, du 4e débat du cycle "Philosophie et Management", autour de l'autorité, organisé par Acteurs de l'économie-La Tribune et l'IAE Lyon.

Une histoire de personnalité

Dans ce débat animé par Bernard Jacquand, Marc Gaucherand a, en digne philosophe, rappelé le sens latin du mot "autorité", "faire grandir". Professeur chez les Maristes, il considère que l'autorité s'exerce dans des univers dissymétriques : soit l'école et la famille, avec des rapports d'autorité entre parents et enfants, maîtres et  élèves.

"Autorité et management, cela ne sonne pas bien à l'oreille. Ces deux notions ne sont finalement pas si liées."

Marc Gaucherand, docteur en philosophie (crédit : Laurent Cérino/ADE)

Pour exercer une certaine autorité liée à son titre, il convient avec Olivier Faure qu'un manager ne peut se contenter de la fonction inscrite sur sa carte de visite :

"Le manager doit actualiser le titre qu'il porte par son style personnel. Moins que le titre ou le CV, ce qui compte c'est la personnalité. La nouvelle génération est friande de ce type de management personnel."

En évoquant le "reverse mentoring", de plus en plus pratiqué dans les entreprises, Olivier Faure illustre à quel point la notion d'autorité est aujourd'hui bousculée.

"En matière digitale par exemple, les jeunes techniciens accompagnent leur manager qui est pourtant leur supérieur hiérarchique. On comprend bien, dans ce cas, que l'autorité s'appuie avant tout sur la compétence, plutôt que sur le titre."

Plutôt "prise de décision"

L'autorité est en effet un mot qui sonne mal dans le monde de l'entreprise. On aurait tendance à y entendre "autoritarisme", "ou volonté de puissance. Le dosage est très compliqué", admet Marc Gaucherand. Pour autant, une entreprise a besoin d'être dirigée et un type d'autorité, de s'exercer. Olivier Faure en convient mais rapproche plutôt le mot de la notion de "prise de décision".

"Je sors à l'instant sors d'un comité de pilotage. Des avis différents se sont exprimés et au final, c'est bien moi, le dirigeant, qui ai pris la décision. Mais le mieux est que la prise de décision soit collective. Moins l'autorité s'exprime, le plus tard elle s'exprime, le mieux c'est."

De fait, le couple autorité-management apparaît fort complexe. D'un côté, le manager, le dirigeant a le pouvoir de sanctionner, de licencier, voire de prendre des décisions difficiles, comme se résoudre à un plan social. De l'autre, Olivier Faure souligne :

"Exercer le leadership tout seul vous envoie dans le mur. Il faut écouter. J'insiste sur cette notion d'écoute, indispensable au management."

Oliver Faure, directeur Orange Centre-Est (crédit : Laurent Cérino/ADE)

Officier parachutiste

Ecoute et entraînement au leadership, car le large public a découvert ce jour que ce dirigeant d'Orange fut dans une vie antérieure et pendant 10 ans, officier parachutiste. Il livre alors une recette intéressante :

"Nous étions une section de 20 militaires, et chacun commandait à tour de rôle. Une fois, c'est l'un qui prend les décisions et les impose aux autres ; ensuite, on subit les décisions d'un autre. C'est un excellent entraînement pour progresser dans l'exercice de l'autorité."

Et de conclure :

"Dans les entreprises, on pratique, mais on ne s'entraîne pas !"

 Retrouvez notre partenaire l'IAE de Lyon