Présidentielles 2022 : en Auvergne Rhône-Alpes aussi, le socle du vote écologiste s'effrite

Qu'est-devenue la "vague verte" qui s'est dessinée lors des élections municipales et métropolitaines de juillet 2020 ? Déjà fragilisée par les régionales de 2021 où le président LR Laurent Wauquiez avait été reconduit sur fond de forte abstention, le premier tour de la présidentielle a signé, à l'échelle locale comme nationale, un affaiblissement plus profond du vote écologiste, au profit de l'insoumis Jean-Luc Mélenchon, qui prend même la tête des votes à Grenoble et à Chambéry, et manque de justesse la première marche dans la ville de Lyon.
Le vote écologiste n'a pas réussi à imprimer les campagnes, ni les grandes villes où les écologistes avaient pourtant remporté plusieurs villes d'Auvergne Rhône-alpes lors des élections municipales et métropolitaines de juin 2020.
Le vote écologiste n'a pas réussi à imprimer les campagnes, ni les grandes villes où les écologistes avaient pourtant remporté plusieurs villes d'Auvergne Rhône-alpes lors des élections municipales et métropolitaines de juin 2020. (Crédits : DR)

Dès 20h, le maire EELV de Lyon, Grégory Doucet, soutien de l'écologiste Yannick Jadot, n'avait pas caché sa déception. Même chose pour son homologue Bruno Bernard, qui a appelé, comme lors des dernières régionales, à tirer les leçons de cet échec.

Tous deux n'auront cependant pas hésité à rejoindre, dès ce dimanche soir, "un front républicain contre l'extrême droite", en affirmant qu'ils voteraient Emmanuel Macron au second tour, sans pour autant minimiser leur désarroi.

Car tous les analystes s'y accordaient : les écologistes semblaient jusqu'ici disposer d'un boulevard sur la scène nationale, voire parfois locale, pour créer et construire une "dynamique" lors des présidentielles 2022, sur fond de crise sanitaire et d'urgence écologique, appelée par les récents rapports du GIEC et l'essor des Zones à faibles émissions voulues par la Loi Climat au sein des grandes villes.

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En 2017, aucune liste écologiste n'avait été présentée au premier tour de l'élection présidentielle mais on sait que les listes précédentes avaient réalisé tour à tour 5,3% en 2022 avec Noël Mamère, puis 1,6% en 2007 (Dominique Voynet), 2,3% en 2012 (Eva Joly)...

Reste qu'en 2019, EELV avait décroché une troisième place aux élections européennes (en s'imposant comme la première force d'opposition à gauche), avec 13,5% des voix. Le parti avait surtout nourri un nouvel espoir avec les scores enregistrés, aux municipales et métropolitaines de juin 2020, qui lui avaient permis de décrocher, sur fond d'une large abstention toutefois, non seulement un second mandat à Grenoble, mais aussi la Ville et la Métropole de Lyon, ainsi que les communes d'Annecy et même Chambéry (à travers une coalition).

Mais les présidentielles n'auront pas été à la hauteur des espérances du parti EELV.

Une quatrième place dans les grandes villes

C'est même pire : en créditant, à l'échelle nationale, Yannick Jadot sous la barre des 5%,  ce premier tour de la présidentielle contraint le parti écologiste à assumer seul ses frais de campagne, demeurant ainsi relégué à une sixième place au niveau national, très loin de ce à quoi il aspirait. Dès ce lundi, le parti a d'ailleurs lancé un appel aux dons, afin de trouver deux millions d'euros pour rebrousser ses frais de campagne d'ici la fin du mois de mai.

Avec à peine 4,7% des suffrages exprimés selon les dernières estimations communiquées ce dimanche soir, l'écologiste se situe derrière Emmanuel Macron, Marine Le Pen, Jean-Luc Mélenchon, Eric Zemmour et même Valérie Pécresse à l'échelle nationale...

Mais le plus cuisant, c'est que les écologistes n'auront, en bout de ligne, pas fait mieux en Auvergne Rhône-Alpes, là où le parti était tout particulièrement attendu pour faire mentir les sondages, mais également pour "dégoupiller" l'analyse, qui voulait que la présidentielle soit l'élection "la moins propice au vote écologiste", par rapport à d'autres échelons.

A l'échelle régionale tout d'abord, où ils s'étaient hissés aux dernières élections de juin 2021 au rang de première force d'opposition face à Laurent Wauquiez : ils n'enregistrent finalement pour ce premier tour des présidentielles 2022 que 5,31% de suffrages exprimés, soit la cinquième position derrière Emmanuel Macron, Marine Le Pen, Jean-Luc Mélenchon et Eric Zemmour.

Un vote de "proximité" plus favorable

Des résultats qui grandissent cependant proportionnellement, à mesure que diminue la taille des territoires concernés : en effet, plus le périmètre se resserre, et plus le vote écologiste est visible.

En témoigne par exemple le périmètre de la Métropole de Lyon, pour commencer, qui place Yannick Jadot en 5e position à 5,96% des voix, soit tout juste devant Valérie Pécresse (5,40%) mais derrière Emmanuel Macron (30,57%), et surtout derrière l'insoumis Jean-Luc Mélenchon, qui devient ainsi, au sein du Grand Lyon, le deuxième homme (28,95%), suivi par Marine Le Pen (13,46%) et Eric Zemmour (7,99%).

Mais au sein de la Ville de Lyon intramuros, la candidature écologiste fait cependant une plus grosse poussée (7,67%) pour truster la 4e place derrière un duel Emmanuel Macron (31,84%) - Jean Luc Mélenchon (31,06%), puis par Marine Le Pen (8,97%).

Le candidat écologiste fait même un peu mieux avec le vote de trois autres villes moyennes d'Auvergne Rhône-Alpes, déjà aux mains d'EELV, où il décroche ainsi la quatrième place.

A commencer par Grenoble (Isère), l'autre grand bastion écologiste conduit par l'EELV Eric Piolle, où l'eurodéputé réalise même son meilleur score des villes vertes à l'échelle régionale, en se hissant à 8,95 % des voix exprimées. Il demeure toutefois (très) loin derrière Jean-Luc Mélenchon, qui arrache même la première place (38,94 %) devant Emmanuel Macron (25,31 %), et Marine le Pen (10,21 %).

A Annecy (Haute-Savoie), où l'écologiste François Astorg avait battu contre toute attente et de justesse le maire sortant DVD aux municipales, Yannick Jadot s'affiche aussi à la 4e place (8,47%) selon les résultats, soit derrière Emmanuel Macron (33,38 %), Jean-Luc Mélenchon (21,22 %) et Marine le Pen (15,02 %). 

Même chose à Chambéry (Savoie), gouvernée par une coalition où siège EELV, et où le député européen est également quatrième avec 7,67 % des voix, derrière Jean-Luc Mélenchon qui décroche là aussi la première position (32,60 %), devant Emmanuel Macron (25,47 %) et Marine le Pen (14,07 %).

Enfin, dans la plus petite ville de la Roche-sur-Foron (Haute-Savoie) située dans l'agglomération transfrontalière de Genève, le score de Yannick Jadot s'affiche à 7,18%, soit derrière Emmanuel Macron, Jean-Luc Mélenchon, et Marine Le Pen, mais devant Eric Zemmour. Un score qui revêt un symbole tout particulier puisqu'en parallèle, le maire EELV de la commune fait face à une série de démissions de la part des élus de sa majorité et désormais de l'opposition, qui conduit la commune à tenir à nouveau des élections au cours des prochaines semaines afin de renouveler sa gouvernance.

A l'échelle départementale, le vote Jadot perd une place

A contrario, l'autre enseignement de ce premier tour semble résider en une phrase : le vote écologiste n'aura pas réussi à imprimer dans les campagnes.

Car dans tous les départements entourant les métropoles EELV, la candidature Jadot a perdu une place par rapport au vote des métropoles, et se positionne sur la cinquième marche : c'est le cas en Isère, où il enregistre 6,01%, mais aussi en Haute-Savoie (7%), en Savoie (6,35%) et encore plus dans le Rhône, où le vote écologiste franchit à peine la barre des 5% (5,71%).

Dans les prochains jours, devrait donc débuter une plus large phase d'introspection pour le parti qui, on se souvient, avait réussi à tenir une première primaire auprès de ses adhérents écologistes à l'été dernier.

Différentes courants s'y étaient alors affrontés (dont celui du maire de Grenoble Eric Piolle, de la députée Delphine Batho ou de l'économiste Sandrine Rousseau) et avaient abouti sur la candidature "d'union" de Yannick Jadot. Même si dans les faits, la bataille, qui avait fait rage entre les trois prétendants les plus en vue (Yannick Jadot, Eric Piolle et Sandrine Rousseau), semblait avoir laissé des traces.

Le poids de la fragmentation des partis de gauche

Mais EELV, comme d'autres partis de gauche, n'avaient ensuite pas réussi à s'entendre pour participer à la Primaire populaire de la gauche, qui avait débouché, comme lors des dernières Régionales, sur un éventail de candidatures particulièrement fragmentées à gauche : avec parmi elles la candidature de Yannick Jadot, mais aussi de la PS Anne Hidalgo, de l'insoumis Jean-Luc Mélenchon, ainsi que plus largement du PCF Fabien Roussel, de la LO Nathalie Arthaud et de l'Anticapitaliste Philippe Poutou...

Dès hier soir, le président EELV du Grand Lyon Bruno Bernard, qui avait été précédemment en charge des élections au sein du parti écologiste, puis responsable des relations avec les autres partis lors de la campagne de Yannick Jadot, estimait déjà :

"Nous sommes bien sûr déçus à double titre, pour la France, pour l'écologie et le mouvement écologiste" déplorant "qu'à nouveau", il n'y aura pas de politique en matière de "lutte contre les pesticides, pour le climat ou la justice sociale".

Pour autant, Bruno Bernard a affirmé : "Nous allons tirer les enseignements dans les jours qui viennent. (...) Nous avons aussi notre responsabilité, nous n'étions pas suffisamment prêts". Le tout, en entrouvrant sa porte aux "communistes, aux insoumis avec lesquels on sait déjà travailler ensemble. Nous devons réfléchir à la suite".

Ce dimanche soir, le maire EELV de Lyon, Grégory Doucet, a estimé pour sa part que "le climat est le plus grand perdant de cette élection". Selon lui, "le 3e tour de cette élection n'est pas encore joué" et se tiendra lors des législatives de juin prochain, "afin de faire en sorte que l'on puisse enfin parler de climat".

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Commentaire 1
à écrit le 11/04/2022 à 20:00
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"Qu'est-devenue la "vague verte" qui s'est dessinée lors des élections municipales et métropolitaines de juillet 2020 ?" elle s'est transformée en rouge et pas le rouge coco !

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