A Lyon, Grégory Doucet veut faire de l’urgence climatique son plan de mandat

La nouvelle municipalité écologiste se préparait au vote de son plan de programmation pluriannuel (2021-2016), qui marquait une étape symbolique ce jeudi. Car à cette occasion, Grégory Doucet a confirmé sa volonté de faire de Lyon une « capitale en transition ». Avec, à clé, un quasi-doublement des investissements sur cinq ans, pour atteindre la somme de 1,25 milliards d’euros, marqué par un fort recours assumé à l’endettement, mais également l'adoption d'une motion visant à déclarer "l'état d'urgence climatique".
Ce jeudi matin, le maire écologiste de Lyon Grégory Doucet se prépare à faire voter sa programmation pluriannuelle d'investissement dans laquelle il souhaite déposer une motion décrétant l'état d'urgence climatique.
Ce jeudi matin, le maire écologiste de Lyon Grégory Doucet se prépare à faire voter sa programmation pluriannuelle d'investissement dans laquelle il souhaite déposer une motion décrétant "l'état d'urgence climatique". (Crédits : Renaud Alouche)

(Publié le 25/03/2021 à 11:00, actualisé à 16:00)

Depuis quelques semaines, les grandes lignes de son projet étaient déjà connu, le sujet ayant fait débat avec les membres de l'opposition, dont l'ex-maire Gérard Collomb, lors du dernier conseil municipal. Mais Grégory Doucet n'aura pas fléchi : pour son nouveau plan de mandat sur les cinq prochaines années, le nouveau maire écologiste de Lyon a soumis au vote du conseil municipal ce jeudi un budget de près de 1,25 milliards d'euros, pour la période 2021-2026.

Soit quasiment le double que la programmation pluriannuelle précédente (PPI), votée à l'époque sous Gérard Collomb, qui envisageait d'investir 600 millions d'euros entre 2015 et 2020.

Sur cette somme, plus d'un tiers sera directement consacré à la transition écologique, notamment par « la rénovation énergétique des bâtiments, la modernisation de l'éclairage public, la sortie du diesel de notre flotte de véhicules, ainsi que par la végétalisation de la ville et l'apaisement de la circulation », précise le plan, qui a été soumis et adopté par la majorité ce jeudi, malgré des interventions en préambule de l'opposition.

L'édile écologiste justifie ce choix par l'urgence climatique : « Comme le disait déjà Margaret Chan (ex-directrice générale de l'OMS, ndlr) en 2014, les preuves sont accablantes, le changement climatique met en danger la santé humaine. Les solutions existent et nous devons agir avec détermination pour en modifier la trajectoire ».

C'est donc avec la volonté d'agir, mais également de s'appuyer sur « l'audace » et « l'humanisme lyonnais » que Grégory Doucet veut « tourner la page ».

Vers un "état d'urgence climatique"

« Lyon est toujours capable de s'adapter aux nouveaux enjeux du XXIe siècle même si elle souffre d'une dette patrimoniale et d'un renoncement politique et d'une forme de fatalisme qui s'était installée (...), avec une déconnexion aux enjeux du siècle qui démarrait », estime le maire.

En reprenant également l'appel du Secrétaire général des Nations Unies, qui avait enjoint le 12 décembre dernier l'ensemble des dirigeants de la scène internationale à déclarer l'état d'urgence climatique (jusqu'à l'atteinte de la neutralité carbone), la ville de Lyon suivra le pas.

Elle marquera son soutien politique à cette cause dès ce jeudi, en adoptant une motion décrétant l'état d'urgence climatique à l'échelle de sa ville. Avec la conviction qu'une municipalité peut agir sur ces questions à sa propre échelle, comme le souligne Grégory Doucet, qui glisse que le conseil municipal se fixe ainsi ses propres objectifs de réduction d'empreinte carbone.

Et notamment l'objectif de « réduire de 30% d'émissions de gaz à effet de serre en 2030 par rapport à l'année de référence 2019, avec l'objectif intermédiaire de réduction de 15% en 2025 ».

Ce plan de mandat, porté par la majorité écologiste, comprend plusieurs axes, à commencer par une volonté de « mettre la ville à hauteur d'enfant », en se tournant vers sa jeunesse, avec près de 298 millions qui seront investis au sein des établissements scolaires, 60 millions d'euros dédié à la petite enfance, ou encore 15 millions d'euros pour végétaliser les cours d'école, et 4,5 millions pour les cours des crèches...

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 « Le sujet de la végétalisation sera l'un des marqueurs du mandat », a souligné Grégory Doucet, qui a rappelé sa volonté de faire de Lyon une ville « végétale et nourricière ». Plus largement, 152 millions d'euros seront investis dans des plans de végétalisation à l'échelle de la ville et de ses parcs, comprenant notamment le développement d'une « forêt urbaine » près de la Part-Dieu, promenades ombragées, ou de 500 à 700 « microimplantations florales » en lien avec les riverains, une enveloppe de 8 millions pour le développement des jardins de rue et familiaux. « 5.500 arbres ont déjà été plantés, et ils seront suivis par 6.500 nouveaux arbres à la saison prochaine », s'engage Grégory Doucet.

Une transition alimentaire à amorcer

Sur le plan alimentaire, la ville souhaite créer une ferme urbaine au cœur de Lyon ainsi qu'une maison de l'agriculture urbaine afin de faciliter son développement, même qu'une épicerie solidaire valorisant les produits locaux ou encore, des jumelages entre des quartiers urbains et des territoires ruraux.

Et d'ajouter : « le sujet des cantines scolaires a défrayé l'actualité, mais ce sont en réalité tous les marchés publics alimentaires des crèches et des écoles qui sont concernés par un renouvellement prochain d'ici 2022, visant plus d'alimentation locale et bien sûr, biologique ».

Cette PPI, qui comporte également un volet destiné à favoriser les mobilités, se traduira notamment par une multiplication par quatre du stationnement vélo, une politique visant à « rendre des places de stationnement aux terrasses », ou encore au développement d'aires de livraison par vélo cargo.

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Sur le terrain du logement, Lyon veut se fixer l'objectif d'atteindre les 25 % de logements sociaux en ville, et se positionne en lien avec la politique métropolitaine visant à encadrer les loyers ou à investir dans une foncière solidaire. « Nous sommes en train de réviser la charte d'aménagement urbain avec les promoteurs, architectes, etc, qui datait de 2006 et qui avait besoin d'un toilettage pour intégrer davantage d'exigences environnementales », indique le maire. Au total, 108 millions seraient ainsi consacrés à l'aménagement et l'habitat.

De la sécurité à la culture...

Du côté de la sécurité, un sujet qui a fait la manchette au cours des dernières semaines à l'échelle de la métropole, le maire écologiste prend acte « des nouvelles formes d'insécurité et de violence urbaine qui ont vu le jour » et annonce l'augmentation du budget de fonctionnement « des acteurs de la prévention » de 40 %, avec l'embauche de policiers municipaux (nombre NC) ainsi le développement de brigade de cyclistes et de police équestre.

Cette PPI comprendra également une augmentation du budget du CCAS, qui passerait ainsi de 37 à 39 millions d'euros, ainsi que la rénovation de bains-douches et la création d'un nouveau pôle d'hygiène, pour 2 millions d'euros.

En pleine période de crise sanitaire, 238 millions d'euros seront affectés au sport et à la culture, avec notamment une enveloppe de 115 millions qui sera affecté aux vingt grands établissements culturels lyonnais (auditorium, bibliothèque municipale, opéra, théâtre des Célestins, etc).

Lire aussi : Réouverture des lieux culturels : "une piste intéressante et raisonnable" (Aline Sam-Giao, Auditorium-Orchestre National de Lyon)

« Nous devons investir dans ses grandes institutions culturelles pour garantir leur fonctionnement équitable et soutenir la création au sein de la Ville De Lyon », a ainsi estimé Grégory Doucet.

L'instauration d'un budget participatif de 50 millions d'euros est prévue, et se verrait scindé en deux volets, avec 25 millions pour les projets proposés par les habitants, et 25 millions pour des lieux identifiés en amont par la municipalité et soumis à des projets, qui pourraient être bâtis par les lyonnais.

Quid du volet économique et de la dette ?

Reste le terrain économique, le maire évoque des objectifs plus larges de « coopération et de prospérité », à travers notamment la création de tiers lieux liés à l'économie circulaire pour 2 millions d'euros, l'encouragement à des formes de production locale plus responsables, ou encore la révision de la politique d'achat publics vers ces nouveaux modes de production, « qui sera l'un des grands chantiers sur 2021 ».

Ainsi que le développement de la logistique urbaine, à travers la création de l'hôtel de logistique urbaine sur le port Édouard Herriot auquel la ville participe. Sur ce plan, seule une enveloppe précise de 600.000 euros a été annoncée en soutien au développement des Halles Paul Bocuse.

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Alors que son prédécesseur s'adossait en 2015 à un budget marqué à la fois par des économies sur le domaine de la culture et le sport (gel du budget de l'Orchestre National de Lyon et du Théâtre des Célestins, baisse du financement municipal du Lou et de l'OL, etc) et envisageait également des hausses de la taxe d'habitation sur les résidences secondaires, du tarif des cantines scolaires ou encore des bibliothèques et des musées, la nouvelle municipalité écologiste marque ainsi sa différence.

Et assume surtout un changement d'ère : elle veut notamment se saisir de la situation financière favorable de la ville de Lyon - qui avait obtenu encore à l'automne une très bonne notation de l'agence S&P- pour investir et résorber ce qu'elle appelle le « déficit patrimonial de la ville ».

Une hausse « maîtrisée », l'opposition pas convaincue

Sa première adjointe aux finances, Audrey Hénocque, l'avait déjà affirmé : « Les taux sont bas actuellement (...), c'est le moment de s'endetter », envisageant ainsi de faire passer la capacité de désendettement de la ville de 3,5 ans en 2019 à 11 années en 2026, soit un bond de 63%.

Une hausse que la majorité estime « maîtrisée » et rappelait : « il existe un risque plus grave qu'un endettement de 10 ou 11 ans, pour une ville de 500.000 habitants, avec un bon potentiel fiscal. Un risque plus certain, car il est déjà là depuis de nombreuses années : je veux parler du dérèglement climatique ».

Plus largement, Grégory Doucet s'adossait ce jeudi matin au mot « prévention » :

« Dès 2015, le PDG d'Axa déclarait à la Cop qu'un monde avec plus de degrés serait assurable, mais à plus 4 degrés, il ne le serait plus. (...) Le coût de la prévention et vont bien moindre que celui de la réparation. Comme d'autres grandes villes, et notamment Strasbourg ou Bordeaux, Lyon sera pionnière parmi les villes en transition ».

De quoi justifier le recours à une capacité d'endettement qui explose. Les débats qui s'amorçaient ce matin ont été particulièrement animés avec l'opposition. L'ancien maire, Gérard Collomb, avait déjà prévenu, concernant la capacité d'endettement de la ville : « Permettez-moi de vous dire que vous n'atteindrez pas les 11 ans, parce que le préfet, à 10 ans, prendra les choses en main et surveillera lui-même le budget de la Ville. (...) ».

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Commentaires 6
à écrit le 26/03/2021 à 15:16
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L'essentiel, c'est qu'il augmente beaucoup la dette de sa municipalité. Ça, c'est un vrai marqueur politique "assumé". Il faudra songer un jour à augmenter sensiblement le temps de travail et l'âge de départ en retraite des jeunes générations, pou...

à écrit le 26/03/2021 à 10:03
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Les lyonnais qui ont vote pour ce clown vont le regretter.

à écrit le 26/03/2021 à 9:58
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Rien de bien nouveau, la marotte de nos politiques de droite comme de gauche, augmenter les impôts et s’endetter. Comme ce n'est pas eux qui devront payer et rembourser, que la fête commence.

à écrit le 26/03/2021 à 9:52
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"la modernisation de l'éclairage public" Bref encore acheter donc, peu écolo comme mesure tandis qu'un éclairage public sur deux est totalement inutile.

à écrit le 26/03/2021 à 8:51
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Ces maires écolos sont enthousiasmants. Un autre monde devient possible avec eux.

à écrit le 25/03/2021 à 15:21
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Les vers de terre sont une catastrophe pour Lyon . Les Lyonnais vont attendre avec impatience 2026 pour virer les vers de terre .

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