Mobilier urbain : Grenoble reste un terrain d'expérimentation pour JCDecaux

Après avoir banni la publicité d’une partie de son mobilier urbain en 2014 par le biais d’une mesure impulsée par la ville centre, l’agglomération grenobloise vient d’attribuer un contrat à la société JCDecaux pour la fourniture de 1 100 abris-voyageurs "nouvelle génération", cette fois par le biais de son Syndicat Mixte des Transports en Commun (SMTC). Et ce, sur une nouvelle période de 12 ans.
L'abri-voyageurs nouvelle génération de JC Decaux est issu, entre autres, d'un projet expérimental mené dans l'agglomération grenobloise.
L'abri-voyageurs "nouvelle génération" de JC Decaux est issu, entre autres, d'un projet expérimental mené dans l'agglomération grenobloise. (Crédits : J.C. Decaux)

Le numéro Un mondial de l'affichage, JCDecaux SA, revient par la petite porte à Grenoble. Alors que la municipalité conduite par Eric Piolle avait fait de la suppression des panneaux publicitaires (hors transports), un emblème pour la capitale des Alpes, la société JCDecaux vient de remporter un nouveau contrat, cette fois par le biais de la métropole.

"Ce contrat porte sur la fourniture, l'installation, l'exploitation, l'entretien et la maintenance d'une nouvelle génération d'abris-voyageurs et de services aux usagers, participe à la dynamique du SMTC en faveur de la qualité de vie au quotidien, de la mobilité durable et de l'anticipation des usages de demain", souligne pour sa part la société Decaux dans un communiqué.

Alors qu'un précédent contrat d'une durée de 15 ans devait arriver à échéance en juin 2019, le groupe a en effet remporté un nouvel appel d'offres pour le renouvellement des abribus de l'agglomération, et ce, jusqu'en 2031. Un choix qui sera "sans coût pour la collectivité et les habitants" car financé par le biais de la publicité, selon un modèle imaginé en 1964 par le fondateur du groupe.

"Le SMTC aurait pu faire autrement mais cela n'a pas eu lieu", annonce Pascal Chopin, directeur régional Rhône-Alpes de JCDecaux, qui n'hésite pas à y voir un signe :

"Notre modèle économique s'en trouve même renforcé par la décision grenobloise. Contrairement aux idées reçues, où tout le monde pensait que nos propositions ne seraient pas écoutées, le SMTC a eu une démarche tout à fait différente", se félicite-t-il.

Car l'autre solution aurait été d'investir, en propre, dans la création et la gestion de ces abris. "Mais dans ce cas, la maîtrise industrielle pour gérer 400 abris tramways et 800 abris voyageurs peut s'avérer compliqué, surtout lorsqu'une collectivité souhaite de nouveaux usages", résume-t-il.

"C'est effectivement l'entreprise Decaux qui porte l'intégralité des investissements et qui perçoit, en échange, les revenus des espaces publicitaires", confirme le président du SMTC, Yann Mongaburu, qui précise toutefois que des demandes particulières, comme celles d'une maintenance du mobilier urbain, assortie d'une obligation de réactivité dans les 24 heures, ont été ajoutées.

"L'éclairage des abris est aussi pris en charge par Decaux, alors qu'il était auparavant supportée par les communes. Cela constituait pour nous une mesure d'incitation efficace pour baisser leur consommation énergétique, où nous nous sommes dotés d'une cible de réduction de 70%", indique Yann Mongaburu.

Des revendications qui n'ont toutefois pas fait flancher l'afficheur, qui évoque pour sa part un marché "gagnant-gagnant".

"Il n'existe pas d'autres exemples en France ou en Europe qui ait décidé de supprimer la publicité de son mobilier urbain. A cette époque, la ville de Grenoble a pris un engagement politique que nous avons respecté, mais cela ne veut pas dire que cela nous empêche de travailler sur Grenoble", affirme Pascal Chopi.

Une mesure jugée compatible

C'est en effet au SMTC (qui réunit la Métropole, actionnaire majoritaire, ainsi que le Département de l'Isère) que revenait l'acquisition de ces abris-voyageurs, par le biais de sa compétence mobilité.

"Dès 2015, nous avons mis en place un processus de définition et de recueil des besoins, comprenant une concertation publique, afin d'anticiper l'échéance de juin 2019", précise Yann Mongaburu, qui en profite pour rappeler que cette nouvelle ne serait pas incompatible avec l'ambition, affichée par la ville, de réduire la publicité.

"En tant qu'élu à Grenoble également, je partage pleinement cette volonté. Après la ville, la prochaine étape sera matérialisée par la réduction du nombre d'espaces publicitaires au sein du contrat avec le SMTC, et la suivante par la création d'un règlement local de publicité intercommunale, qui devrait être proposé en conseil métropolitain avant l'été".

Il en veut pour preuve les exigences de ce nouveau cahier des charges, qui a déjà "demandé la suppression de 340 espaces publicitaires sur les nouveaux abris, tandis que nous travaillons encore sur le choix des lieux où ces publicités seront réduites, comme les abords des écoles par exemple".

Une clause prévoyant que 50% de la publicité soit réservée aux acteurs locaux a également été ajoutée, "ce qui constitue un élément assez inédit", souligne aussi Yann Mongaburu.

"En réalité, la publicité locale était déjà à un très fort niveau sur le contrat précédent, puisqu'elle atteignait quasiment 40%. Nous passons donc un cran au-dessus, mais toujours dans une logique de permettre aux annonceurs locaux d'être présents également sur nos supports", décrypte Pascal Chopin, pour lequel il ne s'agit pas d'un véritable "frein".

Tandis que du côté des 340 suppressions annoncées, celles-ci "seront soit entièrement déposées, soit allouées au SMTC", s'engage le publicitaire. Et d'ajouter :

"L'ambition de JCDecaux n'a jamais été d'aller vers une logique de quantité mais de qualité d'implantation. Grenoble a simplement porté des exigences supérieures", affiche-t-il.

Vers des abris plus durables et connectés ?

JCDecaux espère d'ailleurs bien séduire les Grenoblois avec son abri-voyageurs "nouvelle génération", dont certaines prestations sont directement issues d'un projet expérimental mené auparavant dans l'agglomération, avec Transdev, le SMTC et la Semitag.

Avec notamment la nécessité de garantir un meilleur confort aux usagers, à travers le renforcement des espaces vitrés ou encore l'élargissement des assises, mais aussi l'utilisation de nouveaux matériaux (bois locaux) ainsi que d'une signalétique multimodale (incluant covoiturage, services de vélo, stationnement, etc).

"Nous sommes allés même plus loin en demandant des poubelles de tri pour augmenter la propreté, des distributeurs d'histoires courtes, des chargeurs USB pour préparer la transition".

Avec, en parallèle, l'arrivée de 120 écrans qui seront aussi installés dans ces nouveaux abris.

"Près d'une centaine seront des écrans à basse consommation (liseuses) qui permettront un rafraîchissement des informations, affichées en monochrome, tandis que nous installerons aussi 22 écrans digitaux qui deviendront des tablettes géantes et pourraient centraliser différentes informations", souligne le représentant de JCDecaux.

"Nous n'avions pas encore proposé de mobilier urbain avec une aussi forte dotation en matériaux tels que le bois, ni de réseau numérique à basse émission de type liseuse, déployés à cette échelle", confirme Pascal Chopin. Ce dernier rappelle également une autre contrainte grenobloise, qu'il souhaite transformer à l'avenir en atout.

"Le SMTC nous a imposé de prévoir un budget annuel de 100 000 euros pour tester de nouveaux aménagements, et de 200 000 euros par an pour proposer des innovations en matière de services, et ce, jusqu'en 2031".

Au total, les investissements nécessaires devraient mobiliser de 10 à 11 millions d'euros.

Côté emplois, le contrat ne devrait pas générer de grande campagne de recrutement, même si quelques postes pourraient être créés.

"Nous avons déjà 325 salariés sur la région, dont 35 basés à Fontaine, avec 97% d'employés en CDI. Malheureusement, la dotation en abribus n'étant pas beaucoup plus grande qu'auparavant (on parle d'environ 40 abribus supplémentaires sur ce contrat, NDRL), nous allons donc progressivement monter en charge, avec l'idée d'employer quelques personnes en insertion que l'on pourrait ensuite transformer en CDI".

Au total, ce sont près de 1 100 abris qui devraient ainsi être livrés entre juillet 2019 et octobre 2020 sur le périmètre de la métropole, incluant les 49 communes.

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Commentaire 1
à écrit le 25/04/2019 à 9:56
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Bannir la publicité de notre environnement, une idée qui semble tellement dans l'air du temps que l'on ne peut que déplorer qu'elle soit aussi singulière.

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