Géothermie : à la frontière franco-suisse, un centre de recherche nucléaire va chauffer tout un quartier

Grâce à l'énergie produite par l'accélérateur de particules du Cern (Organisation européenne pour la recherche nucléaire) et en utilisant la géothermie, c'est toute une Zone d'activité concertée (ZAC) qui pourra être chauffée. C'est l'entreprise Celsius Energy, sur impulsion de la collectivité Pays de Gex Agglo, qui a récemment été choisie, avec un groupement, pour concevoir ce réseau. En pleine crise énergétique, ce projet d’envergure débute alors que le gouvernement vient d'annoncer un plan national pour développer la géothermie.
(Crédits : DR Amstein + Walthert)

A la frontière franco-suisse, le Cern (Organisation européenne pour la recherche nucléaire) est mondialement connu son colossal accélérateur de particules. Cet outil à la pointe va pourtant servir une autre cause que la recherche : le chauffage de tout un quartier. La commune de Ferney-Voltaire (Ain) devrait voir sortir de terre d'ici 2030 la ZAC Ferney Genève Innovation de 65 hectares (195.000 m² de zones d'activités, 2.500 logements et 15.000 m² d'équipements publics). L'ensemble de cette ZAC mais aussi une partie de la commune, seront chauffés par un réseau utilisant une boucle d'eau tempérée géothermique, elle-même chauffée grâce à l'énergie produite par l'accélérateur de particule du Cern.

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40 kilomètres de sonde

Concrètement, comment cela va marcher ? « Pour fonctionner, l'accélérateur de particules a besoin d'être à température froide, donc il génère du chaud pour la créer. Cette chaleur, dite fatale, était jusqu'à présent inutilisée. Le projet est donc d'aller récupérer cette chaleur et de la stocker dans le sous-sol. Petit à petit, le sous-sol va se réchauffer. Ça ne change pas grand-chose au niveau du sol, mais on va élever de quelques degrés sa masse et ainsi stocker suffisamment d'énergie pour être capable de la réutiliser l'hiver », détaille Sylvain Thierry, directeur général de Celsius Energy, l'entreprise en charge de créer ce réseau. Entre les sondes géothermiques, à 230 mètres sous la surface, et les bâtiments, des pompes à chaleur font la liaison pour relever la température (celle du sol étant environ à 15 degrés).

Ce projet de taille est mené par la SPL Terrinov (société publique locale), elle-même mandatée par la collectivité Pays de Gex Agglo pour développer cette ZAC. Avec la Semop Pays de Gex Énergies (société d'économie mixte à opération unique) la SPL porte l'investissement de 30 millions d'euros pour développer ce réseau de chaleur. Dans cette enveloppe, l'Ademe a soutenu le projet à hauteur de 10 millions d'euros, via son Fonds Chaleur.

En fin d'année dernière, le francilien Celsius Energy, à la tête d'un groupement d'entreprises co-traitantes, a donc remporté l'appel d'offres de la SPL. « Celsius s'est démarqué avec deux propositions de valeur  : la technique de sonde en biais qui a moins d'emprise sur le terrain et les outils de management de l'énergie », commente la SPL. Les travaux devraient commencer en juin et durer deux ans.

C'est donc l'entreprise, épaulée par le groupement qu'elle mène, qui sera en charge de la conception et de la réalisation des 40 kilomètres linéaires de champs de sondes géothermiques, soit 173 sondes. Ce qui en fait un des plus grands projets géothermiques de France.

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Diversifier les sources

C'est pour coller aux ambitions bas carbone du projet fixées par la collectivité que la SPL a choisi d'utiliser la géothermie sur sonde, sur conseil du bureau d'études franco-suisse Amstein + Walthert. « Pour la même demande de bâtiment, on va être capable de les chauffer en divisant par dix les émissions de carbone », appuie Sylvain Thierry de Celsius Energy.

Une centrale de production et plusieurs sous-stations seront installées pour assurer la distribution de 20 GWh de chaud et 6 GWh de froid à la future ZAC.

Le projet fonctionne grâce au Cern, mais il doit aussi pouvoir fonctionner sans, car l'accélérateur de particules s'arrête régulièrement pour maintenance. « Le système peut marcher sans le Cern, mais les pompes à chaleur devront travailler un peu plus pour relever la température, donc nous consommerons un peu plus d'électricité », explique Sylvain Thierry. La SPL prévoit d'aller chercher de la chaleur fatale ailleurs, comme dans les eaux usées, les routes ou d'un data center ou d'autres bâtiments qui pourraient générer de la chaleur..

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Pour le froid, la SPL prévoit éventuellement sur le long terme de se raccorder au réseau thermique suisse GéniLac, qui capte l'eau du lac Léman, afin d'alimenter les climatiseurs en bout de chaîne.

Conforté par le contexte

Ce projet d'envergure se veut aussi comme un démonstrateur. « Notre objectif c'est un peu d'être la référence sur ce réseau cinquième génération», explique la SPL, qui rappelle que le projet a été retenu par l'appel à manifestation d'intérêt « Démonstrateurs de la ville durable », dans le cadre de France 2030. « L'État nous soutient pour développer, capitaliser et assurer la réplicabilité. »

Les parties prenantes du projets ambitionnent de créer un écosystème de recherche et de formation, notamment en lien avec la Suisse, en avance sur la géothermie.

Dans un contexte de crise énergétique et d'instabilité du prix du gaz, la ministre de la Transition énergétique Agnès Pannier-Runacher a présenté, le 2 février dernier, au siège de Celsius Energy, un plan national pour développer la géothermie.

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« La géothermie était un peu le parent pauvre des ENR. Ce plan a mis un coup de projecteur dessus. [...] Il y a un côté synchrone à travers les annonces de la ministre, et ce projet peut être un peu l'emblème de la capacité de mise en œuvre », commente Sylvain Thierry.

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Commentaire 1
à écrit le 15/02/2023 à 23:20
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CERN = Conseil Européen pour la Recherche Nucléaire

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