Tendance : L'urbanisme temporaire s'ancre dans le temps

De plus en plus de propriétaires mettent leurs biens à disposition d'acteurs culturels ou économique durant des périodes de transition entre l'achat d'un foncier et sa valorisation. Cette nouvelle façon de faire la ville pour les uns et de tester de nouvelles activités et usages pour les autres fait de plus en plus d'adeptes.
Les Halles du Faubourg sont nées du principe d'occupation temporaire
Les Halles du Faubourg sont nées du principe d'occupation temporaire (Crédits : Les Halles du Faubourg - Lionel Rault)

Exit les friches ouvertes à tous les vents et place aux occupations temporaires ! Initiée ces dernières années, cette nouvelle façon de faire a trouvé sa place. A tel point que les collectivités comme les propriétaires de locaux se cherchant un avenir en deviennent friands. Et plus encore les occupants d'un temps.

Ainsi, la métropole de Lyon qui après avoir observé puis accompagné quelques projets naissant ça et là sur son territoire veut désormais structurer une véritable offre autour de ce concept visant à mettre ces sites en transition à disposition de collectifs qui y développent des activités ou du logement.

"Nous avons demandé une étude à l'agence d'urbanisme sur l'urbanisme transitoire qui montre que c'est un moyen de répondre rapidement à la demande de nombreux acteurs de notre territoire", assure Michel le Faou, vice-président de la Métropole en charge de l'Urbanisme, du renouvellement urbain, de l'habitat et du cadre de vie.

De quoi convaincre la collectivité de mieux organiser son action dans ce domaine. Désormais une équipe dédiée à ces opérations est à pied d'œuvre pour repérer les sites susceptibles d'être mis à disposition de jeunes entreprises ou d'acteurs culturels souvent bien en peine pour trouver des points de chute en phase avec leurs faibles moyens.

"Nous avons d'ores et déjà repéré une dizaine de sites appartenant à la métropole et six qui sont entre les mains de promoteurs sur lesquels nous devrions organiser des occupations temporaires. Certains seront à vocation artistiques comme les locaux de Fagor où se déroule cette automne la Biennale d'art contemporain. D'autres abriteront des acteurs économiques qui se lancent y compris des activités industrielles", promet Michel le Faou.

Pour l'heure, les premières expériences menées sur le territoire de la métropole concernent presque toutes des activités festives et culturelles.

Les promoteurs deviennent moteurs

En mettant des locaux à disposition d'entrepreneurs ou d'artistes, les propriétaires privés ou publics économisent des frais de gestion et de gardiennage.

"Lorsque nous avons acquis, avec Villogia, le site des Halles du Faubourg dans le 7ème arrondissement de Lyon, nous avons hésité avant d'opter pour cette formule qui nous a été présenté par la Taverne Gutemberg. C'est aujourd'hui, une grande satisfaction de le voir servir à des artistes et à des entreprises, plutôt que de prendre le risque de le voir squatté", reconnait Martin Revel, directeur du développement du groupe Duval en Auvergne Rhône-Alpes.

Ce site, sur lequel était notamment installé le fabricant de lingerie Lise Charmel abrite actuellement un collectif d'artistes et une poignée d'entrepreneurs qui y organisent expositions et rencontres festives. Encore pendant un an, parce que le "deal" entre propriétaires et occupants repose justement sur cette dimension de temporalité.

"La programmation du site prévoit d'y construire des bureaux, des logements et des locaux d'activité. Nous avons déjà engagé un premier chantier. En août 2020, lorsque nous débuterons la suite de ce projet, l'occupation temporaire prendra fin. Tout est très clair et fait l'objet d'une convention avec les occupants ce qui sécurise totalement l'opération. En attendant, la présence de ce collectif donne de la visibilité au lieu, c'est donc intéressant pour nous dans la perspective de la création de ce nouveau quartier", explique Martin Revel.

Un autre atout de taille pour les propriétaires de friches implantées dans des quartiers en mutation. En effet, les manifestations organisées par les occupants temporaires ramènent la vie dans ces quartiers et bien souvent, la commercialisation des projets définitifs s'en trouve accélérée.

Les entrepreneurs se lancent doucement

A l'image des pépinières, et des incubateurs, ce dispositif est aussi un autre substrat favorable au lancement d'entreprises qui trouvent ainsi des locaux peu chers et un environnement propice à la création et au brassage d'idées.

"Cette solution me permet de relancer une activité avec des coûts allégés et de me laisser le temps de voir comment structurer la suite. Par ailleurs, les rencontres et les possibles partenariats qui se dessinent avec d'autres occupants sont également un plus par rapport à une installation classique", analyse Alexandre Chargueraud, créateur de Facteur d'intérieur, un atelier d'ébénisterie installé sur l'occupation temporaire du site de l'Autre Soie à Villeurbanne.

A Albigny-sur-Saône, Jacques Chalvin est lui aussi un occupant temporaire à la Cimenterie, un site industriel de plus d'un hectare acquis par Didier Caudard Breille, président du promoteur DCB International et par Serge Mathieu à la tête de société d'investissement Novali. D'ici deux ans, ce trio devrait faire de cet ancien site industriel un espace dédié à l'accueil de manifestations festives, d'un food court, d'un fitness santé ainsi que de salles de coworking et de résidences d'artistes. En attendant, ils testent ces idées grandeur nature.

"Notre volonté est d'impliquer le grand public dans l'aménagement définitif du site. De fait, nous pourrons revoir les orientations que nous envisageons au gré de ces retours d'expériences", explique Jacques Chalvin.

Un apport précieux pour bien définir le projet, car l'aménagement de ce site devrait mobiliser entre 10 et 12 millions d'euros. Peu onéreuse pour les entrepreneurs, le temps de lancer leur activité, la valeur ajoutée va bien au-delà de l'impact économique. L'urbanisme temporaire devient en effet petit à petit un outil de prospective pour les collectivités qui testent et affinent ainsi, à moindre coût, une nouvelle façon d'aménager la ville.

"Dans certains, cas cela permet de rendre service à des associations ou des porteurs de projets en quête de locaux. Dans d'autres, cela permet de tester des usages et des modèles économiques pour préfigurer le devenir du site et ainsi donner à voir aux élus et aux riverains sur des fonciers où l'on peut avoir du mal à se projeter", explique le vice-président de la Métropole.

Seul impératif : prendre le temps de penser les projets en amont afin qu'ils s'adaptent aux attentes des utilisateurs potentiels et permettent de préfigurer l'avenir. Du sur mesure en quelque sorte pour imaginer le visage et les usages de la ville de demain.

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