Saint-Etienne face à la pénurie de foncier disponible pour ses entreprises

Comme beaucoup d’autres métropoles confrontées à cette problématique depuis de nombreuses années, Saint-Etienne métropole doit désormais jongler avec une pénurie de foncier disponible pour les locaux d’activité neufs des entreprises voulant s’implanter ou se développer sur le territoire. Problématique nouvelle à laquelle n’étaient pas habitués les acteurs locaux du secteur.
Saint-Etienne Métropole est confrontée à une pénurie de foncier. Ici, le parc d'activité Métrotech, issu d'une reconversion du site.
Saint-Etienne Métropole est confrontée à une pénurie de foncier. Ici, le parc d'activité Métrotech, issu d'une reconversion du site. (Crédits : Saint-Etienne Métropole)

« Nous avons le soutien de nos banques, nous souhaitons construire une plateforme logistique plus écologique et plus performante avec des installations modernes. Nous disposons d'un budget de l'ordre de 10 millions d'euros pour investir dans un nouveau site de 10.000m² et rassembler sur un même lieu nos dépôts de Veauche et Andrézieux-Bouthéon ».  La voie du développement semblait tracée, ou en tout cas pas trop sinueuse, pour Ludovic Magalhaes, co-repreneur en 2021 du groupe ligérien de transport et de logistique Afrac Service (16 millions d'euros de CA ; 47 salariés). Sauf que la PME se heurte depuis plus d'un an à mur : aucune commune du territoire de Saint-Etienne Métropole, sur lequel l'entreprise voudrait rester basée, n'est prête à lui ouvrir ses portes. Et ce, même si ce projet devrait créer une quinzaine d'emplois et permettre à Afrac d'atteindre un objectif de 20 millions d'euros de chiffre d'affaires d'ici 4 ans.

En cause : la pénurie de foncier à laquelle Saint-Etienne Métropole est désormais clairement confrontée.

« Nous sommes entrés dans une phase de rareté du foncier. Dans ce contexte, nous devons privilégier les projets produisant le plus d'emplois au m². Ce qui n'est pas le cas de la logistique », reconnaît Nora Berroukeche, vice-présidente de Saint-Etienne Métropole en charge des affaires économiques.

« Le déséquilibre entre l'offre de foncier et la demande est bien réel »

En réalité, la problématique ne touche pas que les entreprises de logistique. Le foncier se raréfiant, de nombreuses entreprises issues de secteurs d'activité divers et variés souhaitant faire construire un nouveau bâtiment d'activité pour se développer sur Saint-Etienne et sa périphérie, se cassent les dents sur le sujet.

« Nous avions jusqu'ici plus d'offres que de demandes. Mais en 2022, une bascule flagrante s'est opérée. Désormais, nous avons plus de demandes que d'offres. Cela peut freiner le développement local d'entreprises déjà implantées sur le territoire. C'est évidemment notre métier de leur trouver des solutions en étant attentifs à la moindre opportunité et en étant inventifs mais il est certain qu'il nous est aujourd'hui plus compliqué de satisfaire les demandes de nos clients », explique Claire Maras, experte de la question pour Arthur Loyd Saint-Etienne, spécialiste de l'immobilier d'entreprise.

Et de préciser que cette situation est la résultante des deux trajectoires opposées de l'offre et de la demande : l'accélération pour la première, la raréfaction pour la seconde. « Même avec la remontée des taux d'intérêt ces dernières semaines et les difficultés plus importantes rencontrées par les entreprises pour décrocher des prêts, le déséquilibre entre l'offre et la demande est bien réel ».

Bertrand Serre, son confrère de Serre Immobilier, confirme : « J'ai actuellement une grande entreprise de la Vallée de l'Ondaine qui cherche deux hectares de terrain pour construire 8.000m². Dans l'état actuel des choses, je n'ai rien à lui proposer. Trouver du terrain pour des locaux d'activité sur Saint-Etienne Métropole est devenu un vrai défi. Petit à petit, les terrains disponibles sont vendus. Sachant que nous avons une difficulté particulière sur le territoire quant aux nombres de terrains potentiellement constructibles pour des locaux industriels en raison de nos paysages vallonnés ». Difficulté à laquelle s'ajoute d'une part celle des nombreux terrains pollués par d'anciennes activités industrielles et dont la dépollution constitue un coût non négligeable, mais aussi celle des terrains fragilisés par les anciennes galeries minières qui là aussi nécessitent une vigilance particulière.

« Nous avons réussi à acheter quelques terrains autour de l'aéroport mais ce sont parmi les derniers actuellement disponibles. C'est un vrai problème pour les entreprises industrielles en développement, ou simplement qui souhaitent des locaux plus adaptés aux nouvelles normes qualitatives, énergétiques etc », regrette Jérôme Nuiry, dirigeant de l'entreprise ligérienne de promotion immobilière Inovy.

Avec une répercussion sur les locaux d'activité de seconde main, perçus comme une alternative par les entreprises désespérant de pouvoir faire construire leur nouveau bâtiment, mais dont la disponibilité, forcément, devient elle aussi une denrée rare.

Selon une étude conjointe publiée fin 2022 par Serre Immobilier et Inovy ,s'appuyant notamment sur les données collectées par le Cecim (Centre d'études de la conjoncture immobilière des professionnels de l'immobilier), la demande exprimée de locaux d'activité sur Loire Sud a dépassé les 220.000m² en 2022. Mais seuls 41.000m² ont été placés (dont 11.820 m² dans le neuf et 29.520 m² pour les locaux de seconde main)... En 2019, la demande exprimée de locaux d'activité était sensiblement similaire. En revanche, le nombre de m 2 placés s'affichait lui à 210.000m² (dont 129.570m² de locaux neufs et 80.235 m² de locaux de seconde main). En 2020 et 2021, la demande placée s'était respectivement positionnée à 93.000 et 92 000 m².

Des prix qui s'envolent

Résultat inéluctable de cette raréfaction du foncier : les prix des rares terrains disponibles s'envolent. « Nous étions jusqu'ici, en moyenne, à 30/50 euros le m². Nous voyons désormais des tarifs qui dépassent les 100 euros du m² », pointe Bertrand Serre. Idem pour le bâti. Lorsqu'en 2019, le m² était estimé comme « bien vendu » à 750 euros HT, il peut désormais atteindre les 1.500 euros. « Du jamais vu à Saint-Etienne », confie l'expert, s'inquiétant de la faisabilité/rentabilité économique de certains investissements réalisés sur cette base élevée mais conscient que la tendance pourra désormais difficilement s'inverser dans un contexte national d'objectif de zéro artificialisation nette.

Alors quelles alternatives pour les entreprises ? Les locaux d'activité de seconde main d'abord, mais dans le contexte actuel ils sont déjà pris d'assaut, ou encore la reconversion de friches urbaines et industrielles pour lesquelles un engagement des pouvoirs publics est incontournable. Côté nouveaux terrains vierges disponibles : une nouvelle zone d'activité conséquente est attendue dans le Gier mais à horizon de 5 ans. Idem à Andrézieux-Bouthéon. Et puis, quelques parcelles devraient se libérer dans les prochains mois, quelques propriétaires (notamment des collectivités) devraient rendre disponibles des terrains mais l'ère de l'abondance foncière est belle et bien terminée sur le territoire de la métropole stéphanoise.

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