Comment la filière des jeux vidéo pourrait (encore) accélérer

La Région Auvergne-Rhône-Alpes a voté en décembre dernier une enveloppe de 800.000 euros d'aide à destination de différents studios de jeux vidéo de la région. Une manière de maintenir la création indépendante, dans une filière de plus en plus mondialisée, et qui présente plusieurs enjeux sur des tendances d'avenir, comme le jeu mobile ou la montée en puissance de la réalité virtuelle.
A l'avenir, plusieurs tendances comme le jeu mobile ou la réalité virtuelle pourraient prendre de l'importance au sein de la filière des jeux vidéo, qui regroupe près de 150 entreprises en AuRA.
A l'avenir, plusieurs tendances comme le jeu mobile ou la réalité virtuelle pourraient prendre de l'importance au sein de la filière des jeux vidéo, qui regroupe près de 150 entreprises en AuRA. (Crédits : Facebook)

A la suite des deux confinements, les français seraient-ils devenus davantage joueurs ?

Selon les premiers chiffres communiqués par le secteur, la pandémie de Covid-19 aurait en effet renforcé le poids de l'industrie du jeu vidéo, avec des revenus générés en hausse de 11 milliards sur 2020 (pour 163,1 milliards de dollars), selon une étude de la société TechNet. Et en Auvergne-Rhône-Alpes, ce secteur devrait même bénéficier d'un nouveau coup de pouce pour transformer l'essai.

Il faut dire qu'une partie du territoire se calque au rythme de l'industrie du jeu vidéo: Auvergne Rhône-Alpes est en effet perçue comme la seconde région de France du secteur, regroupant près de 16% des emplois du secteur, mais aussi les sièges d'éditeurs de renom comme Ubisoft, Bandai Namco ou Electronic Arts.

Au total, ce sont en effet près de 150 entreprises qui occupent le terrain (dont 90 % sont historiquement basées entre Lyon et Villeurbanne), avec 2.500 emplois à temps plein et un chiffre d'affaires global de 800 millions d'euros.

"On estime à un peu plus de 300 millions d'euros le chiffre d'affaires réalisé sur le continent par Bandai Namco, une entreprise japonaise qui a son siège social Europe à Lyon (Vaise)", souligne Mathilde Yagoubi, déléguée générale du cluster Game Only, qui regroupe et fédère les entreprises de la filière. "Cette entreprise vient d'ailleurs de construire un bâtiment à Vaise avec, à la clé, 100 créations d'emplois pour doubler leurs effectifs. Cette dynamique se retrouve sur tout le territoire de la région avec 1000 créations d'emploi prévues en 2021, dont les deux tiers en CDI dans notre secteur".

La croissance du secteur s'établit en moyenne à 15 % à l'échelle mondiale. "Je n'ai pas les chiffres exacts en Auvergne-Rhône-Alpes, mais la tendance est la même. On dénombre 9 créations d'entreprise en 2021 dans le secteur", note Mathilde Yagoubi. D'autant plus que l'an dernier, le développement a été porté par la crise sanitaire, accueillant de nouveaux joueurs durant les deux confinements et ce, un peu partout à travers le globe.

"Le jeu vidéo est un des produits culturels les plus accessible et les plus consommé au monde. La crise sanitaire n'a fait qu'encourager cette pratique. On l'a bien remarqué sur les ventes de consoles, qui ont explosé", analyse-t-elle.

Un fonds pour rester compétitif

Même si le secteur des jeux vidéos se porte bien, la concurrence n'en demeure pas moins rude, dans un marché de plus en plus mondialisé. C'est pourquoi la Région Auvergne-Rhône-Alpes a décidé d'allouer une enveloppe de 800.000 euros à la filière.

"L'objectif est de maintenir le dynamisme de la création indépendante. En effet, la concurrence est forte notamment vis-à-vis du Canada ou des pays asiatiques. Il s'agit d'entretenir le soft power de la France", développe Mathilde Yagoubi.

Et selon elle, la région Aura a bien compris cet enjeu en soutenant la filière à travers la création du fonds pour 500.000 euros et en adossant 300.000 euros supplémentaires via le plan de relance. Ce type de financement permet de prendre en charge la moitié des dépenses pour les projets de studios indépendants, pour leur permettre de créer un prototype et de pouvoir convaincre des éditeurs français ou étrangers afin de développer leurs jeux.

"Ce fonds de la Région nous permet de nous positionner comme un des territoires les plus attractifs de l'Hexagone et nous donne de nouveaux arguments pour encourager les investisseurs à suivre le secteur en Auvergne-Rhône-Alpes", estime-t-elle. D'autant plus qu'il existe plusieurs nouvelles tendances à accompagner au sein de cette filière : par exemple le jeu mobile, toujours très dynamique, et dont la conception tend justement à se complexifier.

"Nous observons aussi une montée en puissance de la réalité virtuelle, avec des innovations techniques et technologiques qui vont arriver sur le marché, en particulier à destination du grand public", explique-t-elle. "Nous espérons que les salles de réalité virtuelle vont réouvrir rapidement".

Par ailleurs, la réalité augmentée peut servir à donner une dimension ludique à un lieu culturel ou touristique. "La crise a accéléré cette réflexion", relève Mathilde Yagoubi. Au niveau des techniques, elle note qu'il existe "de plus en plus de croisements entre techniques du cinéma et du jeu vidéo, notamment des prises de vue en temps réel. On sait que le studio Disney a réalisé Le mandalorian avec le moteur de création de jeu vidéo Unreal (technologie utilisée dans le jeu Fortnite)".

Enjeux d'attractivité et de diversité

Pour le cluster Game Only, les enjeux de la branche sont désormais multiples. "Il s'agit en premier lieu d'accompagner nos entreprises pour les aider à continuer à se développer".

La filière ferait en effet face à un fort enjeu de recrutement, car même si les perspectives d'embauche demeurent fortes, la France a du mal à s'aligner sur les salaires des pays anglo-saxons."Il y a un vrai enjeu d'attractivité et de rétention des talents. Aujourd'hui, les studios sont contraints de recruter à l'étranger. Nous manquons notamment de développeurs de profil bac+5, ingénieurs".

C'est pourquoi ses acteurs développent, en parallèle, des démarches liées à la qualité de vie au travail en Auvergne-Rhône-Alpes, en vue de travailler sur des leviers d'action pour pallier ces problématiques de recrutement.

"Nous gagnons à faire connaître nos métiers et les parcours professionnels de notre filière. Le jeu vidéo ne se résume pas à des parties de Fortnite ou de Candy Crush Saga, c'est avant tout un secteur d'activité en pleine mutation avec des opportunités professionnelles et économiques pour tous !", pointe-t-elle.

Cet enjeu de recrutement s'accompagne aussi d'un autre défi, celui de la diversité. "Actuellement, notre secteur souffre d'un manque de diversité hommes-femmes et de diversité sociale. Or, les joueurs ont besoin de s'identifier aux jeux, que les créations reflètent les influences culturelles et les attentes de notre société. Les femmes notamment, sont quasiment aussi nombreuses (49%) que les hommes (51%) à jouer et elles ne représentent encore que 25% dans les écoles de formation et à peine 20% dans les studios".

Game Only souhaite d'ailleurs lancer une bourse sur ce sujet, afin de financer les études d'étudiants et d'étudiantes issus de la diversité. Enfin, il ne faut pas oublier l'international. "Nous espérons pouvoir à nouveau assurer la présence de nos entreprises sur les salons internationaux du jeu vidéo, car plus de 70% des revenus engendrés par les studios se font à l'international", conclut Mathilde Yagoubi.

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