Comment Clermont-Ferrand veut devenir capitale européenne de la culture

Et si, en 2028, Clermont-Ferrand devenait capitale européenne de la culture ? C'est en tout cas le projet que nourrit Olivier Bianchi, l'édile de la capitale auvergnate. Le week-end du 6 octobre sera ainsi lancé l'événement Effervescences, premier pas d'une démarche structurante qui devrait durer quatre ans, jusqu'au dépôt officiel du dossier. Une stratégie unique et innovante. Décryptage.
Vincent Glowinski et son spectacle Méduses figurent au programme d'Effervescences. (Image d'illustration)

Après Avignon, Paris, Lille, et Marseille, Clermont-Ferrand veut à son tour entrer dans le cercle fermé des villes françaises désignées capitale européenne de la culture. La collectivité met ainsi tous les moyens pour décrocher le label en 2028. Sa déclaration d'intérêt sera officiellement annoncée lors d'un weekend de festivité, du 6 au 8 octobre, à travers le lancement du programme Effervescences, une manifestation culturelle hors du commun entre embrasement au parc Montjuzet, des rendez-vous secrets dans des lieux insolites ou détournés de la ville, des spectacles ou promenades.

Experts

Le projet, imaginé dès 2015 lors des Etats généraux de la culture, n'est en réalité que le début d'une stratégie menée sur le long terme visant à obtenir cette précieuse distinction, qui renforce l'attractivité d'une ville. La France et la République tchèque sont les deux pays déjà retenus pour cette année-là. "Effervescences est une maquette réduite de ce que pourrait être Clermont-Ferrand si elle obtient ce titre. L'événement est une préfiguration destinée à durer quatre ans, jusqu'à la date de dépôt du dossier, en 2021-2022", illustre Olivier Bianchi, maire de Clermont-Ferrand, et président de la métropole auvergnate. Cet événement doit "mettre le territoire en mouvement".

Pour arriver à séduire l'Union européenne et la convaincre du bien-fondé de sa candidature, la métropole mise sur sa démarche innovante."A ma connaissance, peu des précédentes capitales européennes ont préparé leur candidature si longtemps à l'avance".

Mais l'agglomération s'est également entourée d'une équipe "d'experts" artistiques. Après un appel à projets, Philippe Kauffmann est sélectionné pour imaginer Effervescences. Fabienne Aulagnier, Julien Fournet et leurs équipes le suivent dans cette aventure. Chacun d'eux a déjà accompagné des capitales européennes de la culture : Mons en 2015, Lille en 2004 et Marseille-Provence en 2013.

Démarche innovante

Amorcer ce projet si longtemps avant la possible obtention du titre - une dizaine d'années - paraît étonnant. Pourtant, il s'agit d'une volonté affirmée par la municipalité.

"Nous avons deux objectifs, répond Olivier Bianchi. Le premier est que les Clermontois se prouvent que nous pouvons devenir la ville lauréate. C'est aussi un message que nous envoyons à destination de l'Europe pour leur montrer notre réelle volonté de réussir. Ce n'est pas une opération marketing lancée quelques mois avant une échéance électorale."

"Dans les autres capitales, le projet est pensé d'en haut par les politiques en vase clos. A l'inverse, Clermont-Ferrand se donne dix ans pour créer un mouvement d'adhésion", souligne de son côté Philippe Kauffmann avant d'ajouter : "Une capitale européenne aboutie serait celle qui n'a plus besoin de directeur artistique car les habitants s'empareraient de la vie culturelle de manière naturelle. Et c'est ce mouvement que nous désirons impulser." Dans une société où l'espace public se privatise, Philippe Kauffmann entend redonner toute sa dimension au terme grec "agora".

1,5 million d'euros

Pour ce premier week-end, il a imaginé un événement symboliquement grand public et populaire avec une certaine proximité, autour de l'Hôtel Dieu, transformé pour l'occasion en lieu artistique éphémère. "Les Clermontois avaient manifesté leur envie d'espaces nouveaux, qui peuvent être ce que l'on appelle des "tiers-lieux". L'Hôtel Dieu, qui entre en travaux pour devenir une bibliothèque, était le lieu idéal."

Avec une dizaine de mécènes, parmi lesquels Bouygues Immobilier, Crédit Agricole, Michelin, le groupe La Poste ou JC Decaux, le budget d'Effervescences s'élève à 1,5 million d'euros, dont 450 000 euros issus du mécénat. Un ratio qu'Olivier Bianchi compte conserver si la ville devient capitale européenne de la culture.

Le budget, en cas de sélection, lui, n'a pas été fixé à ce stade, mais il devrait être compris dans une fourchette relativement large allant de 70 à 90 millions d'euros. A titre d'exemple, Marseille avait prévu une enveloppe de 98 millions d'euros.

Attractivité

Pour l'instant, Clermont-Ferrand est la seule collectivité française à s'être réellement positionnée pour obtenir le titre convoité. Une candidature du "sillon lorrain", composée de Metz et Nancy, se précise également. "Des bruits courent du côté de la Bretagne et du sud de la France", ajoute Olivier Bianchi. D'autres pourraient arriver à l'approche de l'échéance de dépôt des dossiers.

"Nous serons certainement une dizaine sur la ligne de départ, et c'est normal. Mais je conduis une politique et une stratégie qui me rendent confiant."

Dans le cas de Marseille, devenir capitale européenne de la culture avait surtout permis d'unifier une scène culturelle alors éclatée. Dans le cas du territoire auvergnat, selon Olivier Bianchi, l'idée est plutôt "d'avoir un nouvel élan. Depuis quinze ans, nous avons développé une politique culturelle de l'offre. Aujourd'hui, nous voulons l'enraciner et lui donner une nouvelle dynamique." Une façon de traduire la transformation du territoire : ancienne ville ouvrière devenue ville de col blanc, Clermont-Ferrand ne veut plus "faire sourire", même si certains restent moins convaincus de la pertinence de sa candidature.

En février dernier, après Pékin, Nairobi ou Mexico, Clermont-Ferrand était devenue le 177e membre a rejoindre le réseau "ville apprenante" de l'Unesco. Une dynamique qu'elle compte poursuivre à travers la possible nomination de capitale européenne de la culture. "Nous essayons de créer une success story clemrontoise et de cocher toutes les cases qui viennent renforcer notre identité de grande métropole du centre de la France. Les villes sont des organismes vivants. Elles peuvent grandir ou mourir. Il en est de ma responsabilité de mobiliser toutes les forces, tous les projets qui peuvent faire vivre cette capitale." Le message est passé.

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