Publicité : le torchon brûle entre les professionnels de l’affichage et la Métropole écologiste de Lyon

Un mois après l’avis défavorable de la commission d’enquête publique sur le futur règlement local de publicité intercommunal, la tension monte entre l’exécutif et les professionnels du secteur de l’affichage. Ces derniers accusent la gouvernance écologiste d’avoir fait de ce sujet un « totem idéologique ». La Métropole opère actuellement, en interne, des arbitrages et des amendements au premier texte voté à l’été dernier. Si elle semble ouverte à la discussion sur la taille des panneaux, l’interdiction des panneaux numériques paraît en revanche irrévocable. Le texte définitif sera présenté au vote du conseil métropolitain fin juin prochain.
L'exécutif métropolitain veut réduire significativement la présence de la publicité sur le territoire
L'exécutif métropolitain veut réduire significativement la présence de la publicité sur le territoire (Crédits : Muriel Chaulet (ville de Lyon))

« Si la Métropole de Lyon n'accepte pas de se remettre autour de la table et d'amender sérieusement son texte, sa mise en application ne sera très probablement pas possible avant la fin du mandat de Bruno Bernard. Nous utiliserons tous les recours possibles et tous les moyens à notre disposition pour le retarder », menace Emmanuel Imberton.

L'ex-président de la CCI Lyon Métropole Saint-Etienne Roanne et patron de l'entreprise lyonnaise la Cotonnière (marquage, signalétique et enseigne) ne décolère plus depuis un an. Le ton est monté encore d'un cran ces derniers jours. L'objet de son courroux : le règlement local de publicité intercommunal (RLPi).

Un RLPi contre lequel il se bat depuis plusieurs mois. Allégé de son devoir de réserve lié à son ex-casquette de président de la CCI à laquelle il avait renoncée en 2019, l'entrepreneur au réseau bien fourni avait créé l'année dernière (avec d'autres entrepreneurs du secteur) le collectif des professionnels de la communication extérieure. Ce collectif, soutenu par plusieurs syndicats, revendique représenter la colère d'au moins une centaine d'entreprises.

Emmanuel Imberton et le collectif espéraient que le récent avis défavorable de la commission d'enquête publique ferait bouger les lignes et pourrait faire reculer l'exécutif métropolitain mais, un mois après l'officialisation de cet avis, il déchante. La métropole lyonnaise ne semblerait pas prête, selon lui, à revoir sa copie en profondeur ni à rediscuter avec les professionnels du secteur.

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« Bruno Bernard en a fait un totem idéologique, avec un positionnement complètement dogmatique, poussé par le collectif anti-pub Plein la Vue, dont le fondateur est le co-président du groupe écologiste à la Métropole de Lyon (Benjamin Badouard NDLR)... », s'emporte Emmanuel Imberton.

Un RLPi ambitieux et contraignant

Ce règlement local de publicité intercommunal précise les règles applicables au sein des 59 communes de la Métropole lyonnaise en matière de publicité extérieure (panneaux publicitaires, enseignes et pré-enseignes). Il a pour ambition de diminuer la place de la publicité dans l'espace public afin d'atténuer la pollution visuelle générée par celle-ci. L'ambition étant bien de poser un jalon supplémentaire par rapport au règlement national de publicité (RNP). Le travail avait été engagé sous la mandature Kimelfeld, avec des concertations avec les différentes parties prenantes, puis retravaillé en profondeur par la nouvelle équipe écologiste. Cette dernière en avait d'ailleurs fait l'objet d'une de ses thématiques de campagne.

« Nous portons un enjeu clair : nous souhaitons non seulement une réduction claire de la publicité mais aussi un meilleur équilibre territorial. Il n'est pas normal que les quartiers les plus cossus soient plus préservés de ces avalanches de publicité que les autres », précise Philippe Guelpa-Bonaro, vice-président de la Métropole de Lyon en charge des sujets du climat, de l'énergie et de la réduction de la publicité.

« Nous ne voulons plus voir de bâches publicitaires XXL déployées dans nos territoires sur des centaines de m². Elles portent souvent des messages néfastes pour l'environnement mais aussi pour le commerce local. On se souvient encore de ces publicités pour le village de marques de Villefontaine par exemple, qui incitaient les Lyonnais à prendre leur voiture pour faire leurs achats ».

En juin dernier, avait ainsi été présenté au vote du conseil métropolitain un RLPi réduisant très significativement la place de la publicité sur les communes de la métropole lyonnaise. Parmi les mesures les plus impactantes prévues dans ce texte : la limitation de la taille des panneaux publicitaires à 2 ou 4 m² selon les zones (contre 12 m² actuellement), la disparition des écrans numériques, des publicités lumineuses en toiture et des bâches de chantier.

Des dispositions beaucoup trop restrictives selon le collectif des professionnels de la publicité extérieure, dénonçant « une entrave à la liberté d'entreprendre ».

« Les interdictions sont beaucoup trop généralisées. Et puis, les études d'impact n'ont pas été faites. Combien ça va coûter aux commerçants de démonter des enseignes qui ne sont plus aux normes ? Quel chiffre d'affaires cela va leur faire perdre de ne plus pouvoir mettre leurs services en valeur ? », interroge Emmanuel Imberton.

Sur un ton plus consensuel, Philippe Valentin, successeur d'Emmanuel Imberton à la tête de la CCI, abonde : « Nous sommes parfaitement d'accord avec la nécessité de diminuer la pollution visuelle. Mais l'interdiction totale des panneaux lumineux est excessive. D'autres interdictions sont incohérentes, comme celle des bâches de chantier : les monuments historiques auront toujours le droit d'accueillir des bâches publicitaires (NDLR : les monuments classés sont régis par un autre règlement, indépendant du RLPi ) mais pas les chantiers classiques ? Et puis, il y a un vrai problème d'information. Nous avons fait une enquête auprès de 300 commerçants, seuls 8% étaient au courant de ces futures dispositions».

Ce qui est négociable et ce qui ne l'est pas

Devant l'avis défavorable de la commission d'enquête publique (abondé par les positions défavorables également du Préfet du Rhône, de la Chambre de commerce et d'industrie de Lyon,  de la Commission Départementale de la Nature, des Paysages et des Sites, , des communes de Bron, Caluire-et-Cuire, Décines, Francheville, Grigny, Rillieux, Saint-Priest, Sainte-Foy-les-Lyon et Tassin-la-Demi Lune), publié le mois dernier, l'exécutif a décidé de se laisser trois mois de plus avant de présenter son texte définitif au conseil métropolitain, un temps jugé suffisant pour retravailler certains points et lever quelques réserves mises en lumière par la commission d'enquête.

Un nouveau vote est prévu pour fin juin. « Nous ne pouvons pas prendre beaucoup plus de temps car les RLP de 42 de nos communes sont caduques depuis juillet dernier. Nous devons aller vite », souligne Philippe Guelpa-Bonaro, expliquant qu'un travail d'ajustement est désormais mené en interne par les équipes et les élus.

Une réaction qui satisfait le président de la CCI, voyant là, - après les assouplissements déjà annoncés récemment sur la ZFE-, un tournant dans la posture de l'exécutif métropolitain vis-à-vis du monde professionnel.

Pas question toutefois pour la Métropole de négocier pied à pied avec chacune des parties prenantes mais plutôt de modifier, harmoniser, rendre plus cohérent certains points du RLPi. Certains points sont négociables, d'autres pas, prévient Philippe Guelpa-Bonaro.

Le sujet des écrans numériques, par exemple, ne serait pas discutable, car « il répond à une demande très forte de la population ». En revanche, précise le VP de la Métropole lyonnaise, « sur la question de la taille des panneaux, dans les zones où nous avions prévu de la limiter à 2m² puisque la mobilité douce permet désormais de lire des panneaux de petite taille, nous pourrions être plus flexibles ou travailler sur la densité par exemple ».

Pas question toutefois de procéder à des grands chambardements, « nous sommes contraints par le premier texte proposé et par l'attente des citoyens ». Et l'élu, par ailleurs professionnel du marketing digital et de l'identité numérique, de tacler : « ces réactions d'opposition sont des réactions du monde d'avant. Les professionnels de la communication doivent trouver d'autres moyens de communiquer. Je ne suis pas inquiet, je sais que les vrais créatifs ne sont pas impactés par le RLPi ».

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Commentaires 3
à écrit le 27/02/2023 à 15:29
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Pour que ce soit moins agressif, mais informer, pourquoi ne pas faire un service sur smartphone auquel les gens devront adhérer, pour savoir tout ce qui se passe autour de chez eux ? Des infos choisies et pas 'agressives' [mot un peu fort](quand on n...

à écrit le 27/02/2023 à 9:09
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Quand va t'on arrêter la publicité commerciale pour diminuer la consommation, comme pour l'alcool et le tabac...? Pour enfin répondre à la véritable demande réelle !

à écrit le 27/02/2023 à 8:34
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Je suis pas ecolo mais pour une fois , ils vont de la bonne direction. Moins de panneaux de pub, c est mieux. et que dire de ces gros panneaux de typüe ecran geant (j en ai un vers chez moi). Ca pollue, c est laid et c ets meme desagrable la nuit

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