Dans l’Allier, les villes se battent pour arracher l’usine de traitement du lithium d’Imerys

Leader mondial des minéraux industriels, Imerys a annoncé fin octobre son projet d'exploiter dès 2028 sur son site de Beauvoir à Echassières, dans l'Allier, une des plus grandes mines européennes de lithium. Or, l'exploitation de la carrière nécessite la création d'une usine de purification. Ce deuxième site doit être situé à moins de 100 kilomètres de la mine et doit être raccordé par une voie ferrée. Plusieurs villes du territoire se positionnent déjà pour accueillir cet outil industriel. Explications.
(Crédits : David Gray)

Le projet d'Imerys d'exploiter d'ici à 2028 la plus grande mine de lithium d'Europe sur son site de Beauvoir à Echassières dans l'Allier va se doubler d'un autre projet industriel. L'extraction n'est pas tout en effet. Imerys compte installer, toujours dans l'Allier, une usine de purification du minerai qui sera extrait de la carrière d'Echassières.

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Un traitement qui nécessite un broyage des roches et l'utilisation de grandes quantités d'eau. L'usine de conversion doit être située à moins de 100 kilomètres de la mine et raccordée à celle-ci par une voie ferrée. La matière extraite sera en effet transportée jusqu'à la gare la plus proche dans des canalisations souterraines, puis vers le site de raffinement.

Dès lors, plusieurs villes bourbonnaises se sont positionnées pour accueillir l'usine de traitement. La préfecture de l'Allier ne communique cependant pas sur les villes candidates. La perspective de nombreux emplois pendant plusieurs décennies a de quoi séduire un territoire au riche passé industriel, comme Commentry et Montluçon. Ces deux villes voisines se sont positionnées rapidement sur le projet. Si le groupe ne fait aucun commentaire sur ces deux candidatures, les maires des deux villes sont plus bavards pour étaler les atouts de leur commune.

Deux barrages d'eau

« Commentry est une ville industrielle où la commune développe une politique dynamique et sociale. Notre commune compte plus de 6.000 habitants mais est, en équipements, comparable à une ville de 15.000 habitants », fait valoir Sylvain Bourdier, maire de Commentry, qui est également membre de la commission intercommunale développement du territoire. L'exploitation de la mine et l'usine de traitement pourrait faire venir de nouveaux habitants.

« Nous remplissons d'ores et déjà beaucoup de critères. Nous sommes situés à 19 km seulement de la mine d'Echassières et nous sommes raccordés à la voie ferrée. ». Prête à accueillir cette activité industrielle, la commune de Commentry abrite déjà plusieurs entreprises sur la commune dont deux sites Seveso. « Les populations sont habituées aux activités à risques dès lors que tout est sous maîtrise », argumente Sylvains Bourdier avant d'abattre l'une de ses cartes maîtresses : « Nous possédons deux barrages en eaux industrielles exclusivement réservés à l'activité économique. » L'eau industrielle, en quantité, est une ressource rare qui fait de Commentry une option intéressante au regard des besoins importants en eau de la future activité.

Montluçon dit tenir la corde

A moins de 15 kilomètres de là, Frédéric Laporte, président de la communauté d'agglomération de Montluçon Communauté et maire de Montluçon joue sa partition avec enthousiasme, lui aussi. « Notre site de Montluçon tient la corde », assure-t-il. Nous travaillons sur les contraintes à lever, en particulier sur les potentielles pollutions du terrain, et il y a une étude 4 saisons à mener. »  En effet, si Imerys doit obtenir une autorisation environnementale pour être autorisé à exploiter le site d'extraction, des autorisations spécifiques sont également nécessaires pour le site de purification. Cela supposera une étude d'impact et une enquête publique. Des contentieux contre les autorisations ne sont évidemment pas à balayer d'un revers de main.

Gazoduc de Fos-sur-Mer

« Parmi les contraintes à lever, l'étude de pollution est plutôt bonne et nous avons bien travaillé au niveau de l'énergie, tant avec EDF et pour le gaz et pour l'eau », indique le maire de Montluçon. « Nous avons montré que nous sommes largement au-dessus des attentes d'Imerys pour l'accès à l'eau et en particulier avec le recyclage des eaux usées de la ville, ce sont les barrières et les contraintes qu'il fallait lever. Parmi les atouts du territoire de Montluçon, la surface que nous proposons est assez importante. Elle est suffisamment grande, et il y a déjà un réseau ferré existant entre les deux sites, qui nécessite une remise en état. Nous avons un accès à l'énergie très facile puisque nous avons un gazoduc qui vient de Fos-sur-Mer et que pour l'électricité nous avons aussi une solution. »

Imerys optimiste pour 2023

Lors de la publication de ses résultats financiers 2022 la semaine dernière, Imerys s'est dit « optimiste » pour 2023 après un résultat net stable en 2022, indiquant chercher de nouvelles acquisitions après avoir achevé le repositionnement sur son coeur de métier..

L'an dernier, Imerys a engrangé 4,28 milliards de chiffre d'affaires, contre 4,38 milliards en 2021. Hors cession de l'activité Solutions de haute température, annoncée en juillet pour une valeur d'entreprise de 930 millions d'euros, l'activité annuelle progresse de 16,8% sur un an. Le bénéfice net s'est élevé à 237 millions d'euros, contre 240 millions un an plus tôt.

« L'année a été bonne, les volumes sont légèrement en baisse en raison principalement de la situation en Ukraine, en Russie et en Chine, qui est le troisième pays en termes de chiffre d'affaires et où les confinements nous ont coûté plusieurs millions d'euros. Et on est aussi arrivés à bien répercuter l'inflation à nos clients en 2023 », a commenté Alessandro Dazza. le directeur général du groupe. Précisant que les négociations pour céder les activités à destination de l'industrie papier (pour une valeur d'entreprise de 390 millions) devraient aboutir au cours du premier semestre, ce dernier a estimé que « le nettoyage de portefeuille est fait ».

« Aujourd'hui on est une société uniquement de minéraux, sur des marchés plutôt bien orientés comme la construction durable, les batteries et l'énergie vertes. Et maintenant on va grandir organiquement et surtout par acquisitions, on a des cibles dans le secteur minéraux à haute valeur ajoutée », a-t-il expliqué.

Concernant 2023, il se dit « optimiste et plutôt positif » grâce à « un rebond de commandes et un redressement graduel mais soutenu dès la fin du premier trimestre et qui va continuer sur l'année. L'Asie rouvre, les Etats-Unis restent relativement solides, l'Europe va probablement éviter une récession », a-t-il relevé.

Imerys va proposer de verser aux actionnaires un dividende « exceptionnel » de 3,85 euros par action, après 1,55 euro versé en 2022, « soit une distribution totale de 327 millions d'euros, dont 200 millions liés à la vente » des activités haute température. (AFP)

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Commentaires 3
à écrit le 25/02/2023 à 11:14
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Conseil de lecture : ne manquez pas de lire "Terres rares" de Jean Tuan chez C.L.C. Éditions. Un néo-polar épicurien et érudit qui dévoile certaines menaces que la Chine fait peser sur le monde. Lecture édifiante et distrayante ! Disponible en libr...

à écrit le 24/02/2023 à 10:35
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Avec la possible penurie d'eau qui se profile, on voit difficilement comment l'equation pourra trouver ses termes.

le 27/02/2023 à 18:29
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Ils leurs enverront les eaux usées de la ville une fois passées dans les stations d'épuration. L'eau du robinet n'est pas ultra-pure (y a des minéraux, sinon elle attaquerait les tuyaux, l'eau ultra-pure est corrosive), celle là ne le sera pas plus. ...

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