Etat-Région : un contrat de plan "record", mais qui se dessinera d'abord sans les métropoles

DECRYPTAGE. Le prochain contrat de plan État-Région, une enveloppe colossale permettant de financer des projets régionaux structurants sur les six prochaines années, s'apprête à être présenté ce jeudi devant une assemblée plénière du Conseil régional qui se tiendra au format un peu particulier, à distance "en raison de la pénurie de carburant". Mais si cette enveloppe de 4,4 milliards d'euros, pensée "en direction des territoires", a été co-construites avec les départements, elle ne fait pas l'unanimité du côté des quatre métropoles régionales. Explications.
La somme totale de 4,4 milliards d'euros de ce CPER est déjà annoncée comme étant fixe, elle ne devrait donc pas évoluer, quels que soient les futurs projets soumis par les métropoles.
La somme totale de 4,4 milliards d'euros de ce CPER est déjà annoncée comme étant fixe, elle ne devrait donc pas évoluer, quels que soient les futurs projets soumis par les métropoles. (Crédits : DR/ML)

La semaine dernière Laurent Wauquiez, président de Région Auvergne Rhône-Alpes, et Pascal Mailhos, préfet de région, ont présenté les contours du futur CPER (contrat de plan Etat Région) 2021-2027. Mais de quoi parle-t-on exactement ? Le principe du CPER a été créé en 1982 afin de financer des projets exerçant un effet levier pour l'investissement local sur du long terme, c'est-à-dire une durée de six ans.

Ce CPER contient 320 projets, dont 100 pour la recherche et l'innovation et 220 "structurant pour les territoires." Le précédent contrat s'élevait à 3,5 milliards d'euros initialement et il est finalement monté, dans les faits, à un peu plus de quatre milliard. Soit une rallonge de temps et d'argent attribuée en grande partie à la crise sanitaire. Au final, 90% des projets soumis à l'époque auront finalement pu être exécutés.

Et désormais, ce nouveau CPER, qui s'apprête à être présenté en Assemblée plénière ce jeudi et vendredi, équivaut à 4,4 milliards d'euros, soit une moyenne d'investissement de "570 euros par habitant". Une somme qui en fait le contrat de plan le plus important à l'échelle national (hors Ile-de-France). Avec un financement partagé à parts égales entre l'Etat et la Région, tandis que les 12 départements ont promis d'abonder les projets retenus sur leur territoires, à hauteur 550 millions d'euros additionnels.

Du côté de la contribution amenée par l'Etat, on sait déjà que ces fonds auront bénéficié cette année d'un plus fort effet de levier, attribuable à la fois aux fonds européens 2021-2027 mais aussi au plan de relance. Car sur les 28 milliards d'euros que l'État mobilisera, 8,6 milliards d'euros proviendront du plan de relance régionalisé (pour ainsi alimenter le volet relance des CPER). Les crédits de massifs et fleuves, compris dans les contrats de plan interrégionaux État-Régions (CPIER), ont par ailleurs aussi permis de récupérer de l'argent.

Une liste de projets phares

Ce CPER se découpera d'ailleurs en trois volets : le premier à destination des territoires, le second pour l'enseignement supérieur et la recherche, et le troisième selon un découpage par thématiques (sport, santé...).

Des projets comme la future Académie de formation de l'OMS, en cours d'installation à Lyon, ainsi que le projet de recherche transdisciplinaire en santé porté par l'Université Claude Bernard Lyon 1 (Shapemed) seront par exemple compris dans ce CPER, de même que plusieurs grands dossiers de l'enseignement supérieur, recherche et innovation.

Ainsi, 208 millions d'euros sont fléchés pour les sites universitaires de Lyon - Saint-Etienne, 83 millions d'euros pour le pôle universitaire de Grenoble Alpes Valence, 55 millions d'euros pour les sites universitaires de Clermont-Ferrand et 40 millions d'euros pour les sites de Savoie - Mont-Blanc. Pour l'ensemble de ces territoires, le CPER entend aussi inclure des fonds pour la rénovation urbaine (ANRU), la sécurité ou le déploiement du haut-débit.

Une répartition financière qui s'avère néanmoins complexe à démêler dans le détail, puisque certains projets thématiques seront aussi inter-départementaux, tandis que d'autres seront plus spécifiques à un territoire. Quoi qu'il en soit, la Région a choisi de communiquer par enveloppes départementales, son président Laurent Wauquiez se félicitant d'avoir collaboré avec chaque président de Département.

Une enveloppe pensée département par département

Et c'est en premier lieu l'Isère qui recevra la plus grosse enveloppe, avec 395,47 millions d'euros prévus pour financer des projets comme la création d'ascenseurs valléens entre les communes du Bourg d'Oisans et d'Huez, sur les 2 Alpes - Alpes d'Huez et sur Allevard/Bourg d'Oisans-Hue, ou encore la restructuration du site des caves de Chartreuse.

Suivra ensuite le Puy-de-Dôme, qui devrait recevoir un total de 316,15 millions d'euros d'investissements (pour la mise en œuvre du Plan coutellerie, la création d'un stockage d'eau hivernale...), puis la Haute Savoie avec 257,68 millions d'euros (avec la création d'un pôle culturel à Reignier-Ésery, le soutien aux projets d'ascenseur à eau et navettes de Saint-Gervais et ascenseur valléen Morzine-Avoriaz).

Dans la Drôme, on parle de 225,47 millions d'euros d'investissements avec des projets comme l'aménagement de la véloroute Montélimar - Dieulefit ou la requalification du port de plaisance de Donzère, tandis que l'Ain fléchera 221,16 millions d'euros vers des dossiers comme la rénovation du site de l'abbaye d'Ambronay ou la création de la Cité des Plastiques de Demain.

Se succèdent ensuite l'Allier (188,81 millions d'euros), avec le soutien à la candidature Unesco de tous les sites clunisiens, la construction de la voie verte V75 "Montluçon, Moulins, Dompierre", puis l'Ardèche, où 179,06 millions d'euros devraient être investis, notamment pour le soutien au thermalisme ou la construction du nouveau stade de rugby d'Aubenas.

La Savoie se verra quant à elle attribuer 157,34 millions d'euros (pour un démonstrateur de « transport par câble en milieu urbain » sur la Communauté d'agglomération du Grand Chambéry, un équipement d'une IRM à l'hôpital de Saint-Jean-de-Maurienne...) tandis que du côté de la Loire, l'enveloppe atteindra 150,89 millions d'euros (avec la réhabilitation des bords de Loire et du port de Roanne, la création d'un parc éco industriel à Balbigny ...). La Haute-Loire recevra quant à elle 132,6 millions d'euros (pour la rénovation et valorisation du centre historique du Puy-en-Velay, la modernisation de la filière plasturgie par une démarche de coopération intra industrielle...)

Enfin, en queue de peloton figureront le Cantal, qui écope d'une enveloppe de 94,56 millions d'euros (pour la construction d'un nouveau CROUS pour le campus universitaire d'Aurillac, ou la création d'un pôle d'excellence en microbiologie dans le département) tandis que le Rhône se voit quant à lui attribuer une enveloppe de 67,74 millions d'euros (avec labrénovation de l'atelier de découpe avec création d'un atelier de transformation à Saint-Romain-de-Popey,  projet Grange Charton : création pôle d'innovation et d'excellence du vignoble Beaujolais...).

Les métropoles sur le bord du chemin

Alors que "le dernier CPER était centré sur Lyon, Grenoble et Clermont-Ferrand", ce CPER signe pour Laurent Wauquiez le "grand retour" des territoires, avec une volonté affichée de vouloir "traiter tout le monde de la même manière". Les choses se sont cependant corsées avec les métropoles, qui s'affichent toujours en discussions avec la Région sur le contenu de leurs projets et ont demandé un délai supplémentaire jusqu'à mars prochain.

La question est même devenue quelque peu politique, sur une scène régionale conduite par différents groupes politiques (PS pour les métropoles de Grenoble et Clermont, EELV pour Lyon, et ex-LR pour Saint-Etienne). Et depuis janvier 2021, les présidents de ces quatre métropoles s'étaient unis pour renvoyer la balle au préfet et à la Région par courrier, au sein de la presse locale.

Les premiers demandant d'être associés à la création du CPER ainsi qu'à une clarification des fléchages, des champs d'application et du calendrier, regrettant ensuite que peu de sujets soumis aient ensuite été retenus. La Région, de son côté, pointait la faible teneur des projets de la Métropole écologiste de Lyon, avec laquelle le dialogue est demeuré tendu au cours des derniers mois. Et force est de constater que depuis, celui-ci n'a pas été rétabli. Laurent Wauquiez s'est d'ailleurs dit "surpris" par cette demande dernière de délai supplémentaire.

A la Métropole de Lyon, Bruno Bernard n'a pas souhaité s'exprimé mais confirme que les réunions de travail se poursuivent, plusieurs rendez-vous étant encore fixés en novembre. Contactées, les Métropole de Grenoble et de Clermont n'avaient pas répondu à nos demandes au moment de publier ces lignes.

La signature du CPER avec les métropoles arrivera donc, au mieux, en début d'année prochaine. En attendant, la somme totale de 4,4 milliards d'euros de ce CPER est déjà annoncée comme étant fixe, elle ne devrait donc pas évoluer, quels que soient les futurs projets soumis par les métropoles.

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