Comment Cominauv compte relancer une production d'améthyste "éthique" en Auvergne

La Compagnie des Minéraux d'Auvergne (Cominauv) ambitionne de relancer la production de cette "pierre patrimoniale" qu'est l'améthyste. Dans une micro-carrière du Puy-de-Dôme qui se veut à la fois "éthique et optimisée", les deux porteurs du projet comptent extraire de l’améthyste destinée à divers marchés (décoration, bijouterie-joaillerie, etc) avec, en en parallèle, une valorisation des matériaux granitiques dérivés. Une cagnotte de financement participatif a déjà été bouclée et Cominauv attend maintenant le feu vert de l’État pour lancer l'extraction.
Le Covid a aussi montré qu'on a besoin de garder certaines choses près de nous, même si l'améthyste n'est pas un matériau stratégique, explique l'un du porteur du projet Cominauv, Mathieu Moulin.
"Le Covid a aussi montré qu'on a besoin de garder certaines choses près de nous, même si l'améthyste n'est pas un matériau stratégique", explique l'un du porteur du projet Cominauv, Mathieu Moulin. (Crédits : DR Cominauv)

L'Auvergne possède le plus grand gisement d'améthyste de France, mais actuellement, à part pour des entreprises de tourisme ou de loisirs, plus personne n'exploitait ce potentiel...

Dans une micro-carrière (2,6 hectares) d'améthyste, située à Saint-Joseph des Mines de Poux (Puy-de-Dôme), la Compagnie des Minéraux d'Auvergne (Cominauv) a donc pour projet de revaloriser cette "pierre emblématique d'Auvergne", comme le souligne Mathieu Moulin, co-porteur du projet.

Basée à Issoire (Puy-de-Dôme), Cominauv a vu le jour en 2018. Créée par Nicolas Léger, gemmologue et lapidaire, et Mathieu Moulin, ingénieur-géologue, Cominauv est le résultat de 7 années de travail. "J'ai rencontré Nicolas en 2014, quand je faisais mon mémoire sur le saphir. Nous avons gardé contact et il m'a proposé de travailler sur ce projet de revalorisation de l'améthyste", se rappelle Mathieu Moulin

Pour mener à bien ce projet, Cominauv a lancé une campagne de financement participatif qui s'est achevée le 18 mai dernier. Elle a légèrement dépassé son objectif en réunissant près de 20.320 euros. Une somme qui servira à faciliter l'accès au prêt et à mettre en confiance de potentiels investisseurs.

Le Département du Puy-de-Dôme a déjà soutenu le projet en aidant notamment à financer des études nécessaires à la demande d'exploitation.

Car, pour le moment, Cominauv attend aussi le feu vert de l'État pour commencer officiellement son activité. "Nous avons la classification gisement, mais pour toute demande d'extraction, comme le sous-sol appartient à l'État, pour l'exploiter, il faut son autorisation."

Valoriser une pierre patrimoniale

Pour Mathieu Moulin, relancer une carrière d'améthyste, c'était aussi "l'occasion de redévelopper ce type de projet qui n'existait plus. Il y a eu plusieurs périodes d'exploitation de l'améthyste dans la région et la dernière, la taillerie de Royat, remonte à la fin du XIXe siècle."

Des considérations assez récentes selon Mathieu Moulin. "Le Covid a aussi montré qu'on a besoin de garder certaines choses près de nous, même si l'améthyste n'est pas un matériau stratégique."

Une production locale, qui veut mettre en avant son côté patrimonial, sur un marché où "le Brésil sort les deux tiers de la production mondiale d'améthyste. [...] Il y a eu cette énorme arrivée de matériaux étrangers qui a inondé le marché français, qui n'a pas pu tenir la concurrence. Ils ont fini par fermer les portes. L'améthyste reste une pierre patrimoniale."

Une améthyste auvergnate et une brésilienne n'auront pas les mêmes teintes et les mêmes saturation, c'est l'un des points différenciant qui permet de se positionner "sur un marché de niche."

A cela s'ajoute un positionnement sur l'éthique et la relocalisation. Car comme le soulignent les deux fondateurs, "nos expériences dans le milieu de la minéralogie internationale nous ont démontré qu'il est très peu éthiqueet la France n'est pas épargnée : que ce soit en termes de conditions de travail, de sécurité, de salaires, de légalité des exploitations ou d'environnement, très peu d'acteurs se sentent concernés... Le projet revêt donc également un aspect éthique et environnemental en proposant un modèle alternatif local, optimisé, sécurisé et innovant, qui respectera les normes françaises, les employés, et son environnement".

Leur projet comprend donc "une optimisation des ressources extraites, des techniques de transformation ainsi que des impacts sur l'environnement." Cela comprend par exemple la gestion des eaux qu'il faudra pomper, puis traiter avant de la rejeter dans le sous-sol. "Il faut éviter le gaspillage, on prévoit d'optimiser et d'ajouter un filtre presse."

Aussi sur le volet environnement, propice aux reptiles et aux chauves-souris, Cominauv prévoit le maintient des lisières et la création de bassin, qui attirent les insectes et feront office de garde-manger.

La carrière se trouvant dans le parc naturel des volcans d'Auvergne, la contrainte environnementale est inévitable. Le dossier déposé pour avoir le droit d'exploiter le sous-sol inclut aussi un volet de remise en l'état après l'arrêt de l'activité, le terrain étant en boisement avant, Cominauv prévoit de remblayer et replanter.

Diversifier les usages

La micro-carrière vise plusieurs productions : améthyste et matériaux de construction (sables et granulats). Une fois l'extraction faite, "on prévoit de trier, puis séparer les qualités et les diviser pour les différents sous-marchés."

Cominauv cible ainsi déjà de revendre le gravier ornemental ainsi produit pour les marchés du jardin, de l'aquarium, du béton désactivé pour les dalles ou au monde funéraire. En plus raffiné, vient ensuite la pierre roulée pour la litothérapie et la décoration, la marqueterie marbrerie, puis la minéralogie de collection, qui inclut les bijoux fantaisie. Et enfin la haute joaillerie, qui ne représentera que 0,05% du gisement, mais des "centaines de milliers de carats".

"Sur le marché actuel, c'est la bijouterie fantaisie qui demeure le plus rentable", note Mathieu Moulin. Mais pour cela, il faut un atelier de transformation, qui arriverait deux ou trois ans après le début du projet. Le tout premier marché ouvert serait donc celui du gravier ornemental.

Cominauv prévoit d'extraire 15.000 tonnes de granulats par an, dont 200 tonnes d'améthystes brutes, pour une quantité finale de 105 tonnes, sur an marché mondial qui produit entre 12.000 et 16.000 tonnes d'améthyste par an.

Aussi, la carrière étant micro par définition, extraire le sable ne prendra qu'un mois et demi par an, extraire les améthystes se fait à la main. Le site accueille déjà des visites depuis quatre ans et il poursuivra cette activité en parallèle.

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