Investissements étrangers : AURA résiste, l'attractivité de Lyon grignotée par l'essor des villes moyennes

Dans son dernier baromètre sur l'attractivité de la France, le cabinet Ernst & Young revient sur la "remontada" engagée par la France sur la scène européenne. Si la crise Covid a boosté la visibilité de l'Hexagone auprès des investisseurs étrangers, Auvergne Rhône-Alpes profite également de ces vents favorables en devenant la seconde région européenne en matière d'investissements industriels. Dans le même temps, l'attractivité de la ville de Lyon est cependant grignotée par l'essor fulgurant de certaines villes moyennes comme Bordeaux, Montpellier ou encore Strasbourg, même si la direction prônée par sa majorité la pousse à changer de "ligue".
D'après le dernier baromètre EY sur l'attractivité française, la présence de 3 métropoles régionales (Lyon, Saint-Etienne et Clermont-Ferrand) dans le top 10 des villes susceptibles de concurrencer Paris est le signe que le territoire s'archipellise et s'équilibre un peu plus et que tout ne vient pas à Lyon.
D'après le dernier baromètre EY sur l'attractivité française, la présence de 3 métropoles régionales (Lyon, Saint-Etienne et Clermont-Ferrand) dans le top 10 des villes susceptibles de concurrencer Paris est le signe que le territoire "s'archipellise et s'équilibre un peu plus et que tout ne vient pas à Lyon". (Crédits : DR/ML)

Faut-il voir le verre à moitié plein, ou à moitié vide ? Dans le 22e baromètre de l'attractivité française, réalisé par le cabinet Ernst & Young, la région Auvergne Rhône-Alpes se distingue à nouveau, à plus d'un titre.

On savait déjà qu'avec 18,3% de la valeur ajoutée généré par l'industrie régionale, Auvergne Rhône-Alpes se plaçait comme la première région industrielle française. Désormais, ses 71 projets d'investissements étrangers positionnés l'an dernier la placent comme la seconde région industrielle d'Europe, lui permettant ainsi de surpasser son propre rang et d'entrer dans une nouvelle ligue.

Car jusqu'ici, elle se positionnait en effet déjà comme une région jugée attractive en Europe : elle se classait encore cette année à ce titre à la 6e marche des villes européenne, derrière les régions de Madrid ou de la Bavière.

Mais le classement de EY confirme désormais que, bien que talonnée la région Grand Est (69 projets d'investissements en 2021), les investissements étrangers ont franchi un nouveau cap : et il ne s'agit pas uniquement de projets emblématiques issus des grands groupes, comme le rappelle Fabrice Reynaud, associé EY Consulting au sein du Centre d'Excellence (EMEIA) en localisation d'activités :

"Il existe un double effet positif avec déjà, l'attractivité de la France qui, même si elle est toujours relative, permet à la région Auvergne Rhône-Alpes et à l'Hexagone de se positionner justement face à d'autres territoires comme le Royaume-Uni qui ont encore des sujets de Brexit, ou à des Allemands qui ont des enjeux de supply chain..."

La "visibilité" offerte par l'exécutif français sur le terrain économique, appuyée par la réélection d'Emmanuel Macron, sont également deux facteurs pointés par Fabrice Reynaud, de même que deux critères propres à la région AURA : à commencer par sa géographie qui la place au centre de l'Europe, mais également son vivier de main-d'œuvre, qui ne frise pas encore le plein-emploi même si le taux de chômage se réduit à 7 %. "Cela place la région AURA comme plus compétitive et moins saturée que d'autres comme l'Allemagne la Pologne où le taux de chômage atteint 3 %".

Enfin, le volet de l'énergie, et notamment de la fourniture en hydroélectricité, ainsi qu'en énergie nucléaire, deux domaines où la production régionale s'avère fortement contributrice au mix national, ont pour effet de sécuriser et rassurer les projets d'investissements, estime Fabrice Reynaud.

Une attractivité régionale qui s'archipellise

D'un autre côté, l'autre versant de ce baromètre était consacré à l'attractivité des métropoles, c'est-à-dire à la perception qu'ont les grands acteurs économiques des forces de chaque territoire.

Et à ce sujet, le constat est en demi-teinte : car dans le top 10 des villes françaises capables de concurrencer Paris aux yeux des acteurs économiques, la ville de Lyon, longtemps pionnière, poursuit sa chute.

Après avoir été classée première métropole derrière Paris jusqu'en 2020, puis 2e en 2021, elle se trouve désormais et à la 5e position, derrière Bordeaux, Strasbourg, Marseille- Aix-en-Provence ou encore Montpellier. Avec un constat : elle continue de perdre des places alors qu'au contraire, des villes voisines comme Saint-Etienne en gagnent (désormais en 7e position) tandis que Clermont-Ferrand arrive 10e.

Face à cette tendance, Fabrice Reynaud nuance : "On peut voir le verre à moitié plein en estimant qu'aujourd'hui, il existe trois villes de la région Auvergne Rhône-Alpes (Lyon, Saint-Etienne et Clermont-Ferrand) dans le top 10, ce qui est une bonne chose car cela signifie que la région s'archipellise et s'équilibre un peu plus et que tout ne vient pas à Lyon".

Et volonté qui était d'ailleurs portée par la nouvelle majorité du président EELV Bruno Bernard, qui n'a de cesse de répéter sa volonté de mieux équilibrer le territoire métropolitain en matière économique, à travers la feuille de route qu'il vient de confier à l'agence économique métropolitaine Aderly.

Pourtant, le "déclassement" de Lyon est aussi à observer à l'aune d'un autre phénomène : celui de la montée en puissance des villes moyennes régionales, et des certaines en particulier qui ont pu surfer sur des atouts reposant à la fois sur leur localisation et leurs réseaux de transports, mais aussi sur une notion d'attractivité plus large, liée également à la sphère touristique ou culturelle.

"Ce n'est pas forcément Lyon qui dégringole, mais surtout les autres métropoles qui se propulsent sur le devant de la scène, à la fois économiquement, mais aussi touristiquement et culturellement", estime Fabrice Reynaud. "On observe clairement un effet de rattrapage des villes comme Bordeaux, Strasbourg ou Marseille, qui était un peu plus des belles endormies dans le passé et qui profitent aujourd'hui du plein effet du TGV par exemple".

Autre atout dans leur malle : le fait qu'à titre de comparaison, les prix de l'immobilier, qui rapprochent Lyon des niveaux de la capitale parisienne, n'atteignent pas encore les mêmes sommets ailleurs en province. "Lyon est au également un peu victime de son succès, avec des prix où le différentiel est devenu moins important", analyse-t-il.

Du débat de fond, au pari d'une nouvelle forme d'attractivité

Pour autant, le cabinet EY teint à nuancer la traduction concrète des résultats de ce classement :

"La notion d'attractivité reflète plutôt une perception à trois ans et n'est pas fidèle à la réalité actuelle, puisqu'on constate bien que le nombre d'investisseurs qui arrive à l'échelle régionale continue d'être très important en Auvergne Rhône-Alpes et à Lyon".

C'est donc sur la perception à moyen terme que pourrait se jouer l'avenir de l'attractivité à la lyonnaise.

Et à ce sujet, alors qu'un débat de fond alimente toujours les discussions sur la scène régionale entre certains acteurs économiques et politiques et la nouvelle majorité EELV concernant la notion même d'attractivité, EY estime que le virage de la politique publique actuelle portée par la Métropole et la Ville de Lyon aboutira nécessairement à une redistribution des cartes.

"Cette nouvelle politique va influer et faire changer à terme Lyon de ligue de compétition : en misant sur une autre attractivité choisie et durable, ses compétiteurs ne seront pas les mêmes au niveau européen. Ce ne seront pas nécessairement les territoires les moins chers, mais plutôt les mieux disants comme Copenhague, Stuttgart, ou encore Göteborg, on voit bien que l'on se dirige vers un marketing du mieux", analyse Fabrice Reynaud.

Avec des effets qui pourraient cependant n'être visibles qu'à moyen terme, c'est-à-dire à l'échelle du mandat actuel dont l'échéance est prévue en 2026, voire même 2030.

D'ici là, "on peut s'attendre qu'à terme, se dégage 10 à 12 grandes métropoles qui occupent un vrai contre-pouvoir face à Paris, avec toujours un axe Lille-Lyon-Marseille qui tire son épingle du jeu urgences de métropole dite d'équilibre territorial qui commence à apprendre leur pleine mesure comme Strasbourg".

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