La Silicon Valley grenobloise de nouveau "rebranchée" après un incendie sur ses lignes électriques

Il aura fallu moins de 24 heures aux équipes de RTE et d'Enedis pour rétablir, à l’aide d’un dispositif provisoire, l’alimentation du bassin du Grésivaudan qui avait été touché, dans la nuit de lundi à mardi, par un incendie sur plusieurs de ses lignes à haute tension. Les industriels STMicroelectronics et Soitec, dont les cycles de production nécessitent de grands volumes d'énergie, ont ainsi pu être réalimentés hier soir, et sont désormais en cours de redémarrage de leurs équipements de production, et notamment de leurs salles blanches.
Outre l'arrêt brutal de la production ainsi que de l'alimentation en électricité des sites et serveurs informatiques concernés, cet incident aura également un impact sur les cours de la Bourse également des deux acteurs de la microélectronique grenoblois.
Outre l'arrêt brutal de la production ainsi que de l'alimentation en électricité des sites et serveurs informatiques concernés, cet incident aura également un impact sur les cours de la Bourse également des deux acteurs de la microélectronique grenoblois. (Crédits : Pierre-Jayet / Soitec)

La coupure de courant, provoquée par l'incendie de plusieurs lignes à haute tension qui transitaient par le pont de Brignoud (Isère) dans la nuit de lundi à mardi, aura été à la fois inédite, mais aussi particulièrement impactante pour le bassin du Grésivaudan, un secteur proche de Grenoble, qui accueille plusieurs grands industriels de la microélectronique comme STMicroelectronics et Soitec.

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Finalement, un peu moins de 24 heures après cet incident, pour lequel une enquête a été ouverte et étudie notamment la thèse d'un incendie volontaire, la situation est en passe de revenir à la normale (ou presque). Plusieurs lignes à haute tension (20.000 volts) d'Enedis ainsi qu'une ligne à très haute tension (225.000 volts) gérée par RTE ayant été incendiées, des solutions de secours ont été déployées.

Enedis confirme notamment ce mercredi que l'ensemble des foyers ainsi que des entreprises du secteur ont pu bénéficier de la mise en place de groupes électrogènes d'appoint, tandis qu'une ligne électrique provisoire a été tirée afin d'alimenter spécifiquement le site de Soitec, à Bernin.

 Une ligne provisoire mise en place pour rebrancher Soitec

« Une ligne appropriée pour alimenter le site a été mise en place depuis 20h30 hier soir, et depuis ce même moment, toutes nos équipes ont repris le travail. Le processus de reprise de la production est en cours depuis 21 heures mardi soir et prendra un peu de temps, car nous avons des protocoles à respecter, mais il se fera dans les heures et les jours qui viennent », confirme Thomas Piliszczuk, vice-président du business global chez Soitec.

« Etant donné que nous avons aussi plusieurs lignes de production sur ce site, leur redémarrage pourra se faire progressivement, en fonction des priorités et de nos engagements pris auprès de nos clients ».

Pour l'heure, le fabricant de substrats semi-conducteurs n'évoque toujours aucun impact financier ni dégâts matériels suite à cet épisode, et se dit confiant que les livraisons à ses clients pourront être tenues, en s'appuyant notamment sur un stock de production déjà disponible.

Une reprise également chez STMicroelectronics

De son côté, STMicroelectronics, qui dépendait d'un autre poste électrique géré par RTE, comprenant notamment une ligne à très haute tension (220.000 volts), a confirmé le retour d'une alimentation dès mardi matin, et avait alors recommencé à procéder à un « redémarrage progressif des installations ». Selon nos informations, celui-ci serait actuellement toujours en cours. Le groupe, qui emploie près de 3.700 salariés à Crolles, précisait alors que «  tous les systèmes et procédures assurant la sécurité des salariés et des installations ont été déclenchés ».

Aucun élément n'a cependant filtré sur les pertes qui pourraient être générées par cet arrêt brutal de l'alimentation sur site, ni sur d'éventuels retards qui pourraient ainsi être générés, sur des lignes de production fonctionnant habituellement 24h/24, alors même que STMicroelectronics fait face à une très forte demande en matière de composants électroniques et à des objectifs de production ambitieux.

Un incident qui aura lui-même déjà eu un impact sur les cours des deux sociétés en Bourse également, puisqu'après une première journée de baisse suite à l'annonce de cet épisode (à -5,3% pour ST et -3,8% pour Soitec), le cours de STMicroelectronics s'affichait encore en baisse de -3,2% ce mercredi, et de -3,2% pour Soitec ce matin.

« Ces deux entreprises ont pu commencer à redémarrer, mais en mode dégradé, car hormis les pertes de fabrication dont il faudra probablement reparler plus tard, on sait que ce secteur dispose d'équipements qui n'aime pas les coupures de courant intempestives », traduit le vice-président délégué en charge de la promotion économique pour la communauté de communes du Grésivaudan, Jean-François Clappaz.

Les salles blanches, utilisées notamment dans le processus de production de l'industrie de semi-conducteurs, dépendent notamment de systèmes de ventilation filtrés et de différents capteurs (température, humidité, etc) en vue de garantir un niveau de concentration très faible de particules et de poussières en suspension dans l'air, qu'il faut pouvoir recalibrer notamment lors de leur remise en route. Sans compter les réglages des équipements de production eux-mêmes, qui sont chargés de combiner un haut niveau de qualité et une production en volume, tout en produisant à une échelle très petite, de l'ordre du namomètre.

D'autres acteurs économiques plus ou mois impactés sur la zone

Au plus fort de cet incendie, qui se pose comme un événement inédit de par son ampleur, 5.539 clients auront été privés d'électricité, tandis que « 350 clients, particuliers et entreprises » étaient encore concernés en fin de matinée.

Pour le vice-président, l'un des principaux enjeux de son territoire, qui héberge plusieurs zones d'activité économiques (Crolles, Bernin, Brignoud, etc) était d'ailleurs de veiller en premier lieu à ce que le courant soit rétabli pour l'ensemble des entreprises et foyers.

« Nos services étaient sur le pont et ont réussi à contacter une trentaine d'entreprises, mais il s'agissait de PME ou ETI moins électrointensives que les deux principaux acteurs de la microélectronique. Certaines n'ont même pas été impactées par cette coupure, d'autres comme le fabricant Petzl, seulement par une coupure de 2 heures dans la nuit ».

Présent sur ce territoire, un autre industriel de taille, le fabricant de sirops Teisseire, n'a pas encore livré d'informations sur les impacts de cet épisode sur son propre cycle de production.

Une enquête a été ouverte, les dommages en cours d'étude

« Pour l'instant, nous n'avons pas encore parlé d'argent, car l'urgence était d'abord de répondre aux besoins des entreprises et de rétablir l'alimentation partout, et de gérer le sujet de la mobilité, car le pont de Brignoux qui est actuellement fermé pour une expertise enregistre tout de même habituellement 27.000 véhicules par jour », confirme Jean-François Clappaz.

Du côté de RTE, le groupe souligne qu'un travail d'expertise en cours afin de « rétablir et renforcer » la ligne à haute tension touchée, sans donner cependant plus de précisions, ni de calendrier à ce stade. Chez Enedis, une expertise est également en cours concernant les lignes touchées. « Nous avons mis en place des groupes électrogènes pour alimenter le secteur et rétablir l'ensemble de nos clients dès mardi soir ». Le montant des dommages n'est pas encore connu à ce stade mais déjà, des voies se sont élevées sur le bassin grenoblois pour condamner un acte qui pourrait avoir une origine volontaire.

Le président LR du Département de l'Isère, Jean-Pierre Barbier, rappelle que "selon le procureur de la République de Grenoble Eric Vaillant, ce nouvel incendie serait criminel, et lié à celui qui a touché un poste RTE de Villard-Bonnot dans la nuit de dimanche à lundi, et qui visait déjà l'alimentation électrique de la société STMicroelectronics située à Crolles". Celui-ci s'associe à la Communauté de communes du Grésivaudan pour "condamner fermement ce nouvel acte criminel" et souhaite que le parquet national anti-terroriste se saisisse de cette affaire.

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