Pourquoi les métropoles de Saint-Etienne et Clermont créent une société de capital risque

INITIATIVE. Pour la première fois, deux métropoles s'associent pour créer leur société de capital-risque. Avec un horizon de 10 puis 15 millions, leur démarche, SCR Métropoles Innovations, entend bien participer à la transformation de ces deux territoires, confrontés à la désindustrialisation.
"Regardez Carbios par exemple, sans fonds publics, son idée serait peut-être restée sur un PDF...", estime Lucie Mizoule, conseillère communautaire de Clermont Auvergne Métropole.

C'est une innovation que revendiquent fièrement Saint-Etienne et Clermont-Ferrand. Pour la première fois, deux métropoles s'associent au sein d'un outil exclusif de financement des entreprises. Les deux collectivités annoncent ainsi la création d'une société de capital-risque, la SCR Métropoles Innovations.

Piloté par Sofimac Régions, ce nouveau fonds de proximité vise une taille critique de 15 millions d'euros. Les deux métropoles ont déjà acté une participation de 2,5 millions d'euros chacune. Un pool bancaire est en cours de constitution, à Saint-Etienne et à Clermont-Ferrand, avec une première officialisation du Crédit Agricole Centre France.

Objectif : atteindre rapidement les 10 puis les 15 millions d'euros, avec un dernier tiers abondé par des family offices ou des industriels locaux. Ce nouveau véhicule d'investissement a pour ambition d'accompagner les entreprises innovantes, de tous secteurs d'activité, implantées exclusivement sur les territoires des deux métropoles.

Ticket moyen : 300 à 500.000 euros pour de l'amorçage, avec quatre dossiers financés dès 2021.

Aller plus loin dans l'accompagnement des pépites locales

Leur cible sera prioritairement composée des startups, développant de nouvelles technologies, nées au sein des laboratoires de recherche des deux territoires.

"Jusqu'ici, Saint-Etienne Métropole intervenait sur des aides et des subventions, nous dépensions beaucoup d'argent et d'énergie pour les amener jusqu'à l'industrialisation et à leur première levée de fonds, mais ensuite des investisseurs privés, étrangers au territoire, prenaient le relais", explique Georges Hallary, vice-président de la Métropole stéphanoise en charge de l'économie.

Le constat est le même du côté de la métropole auvergnate : "Aujourd'hui, en amorçage, les jeunes entreprises ont du mal à trouver des fonds. Tant que leur business plan n'est pas clair, avec peu de risques, les investisseurs privés n'y vont pas. Les fonds publics sont absolument nécessaires", explique Lucie Mizoule, conseillère communautaire de Clermont Auvergne Métropole.

Elle cite en exemple la pépite Carbios : "Sans fonds publics, son idée serait peut-être restée sur un PDF. Mais lorsqu'elles franchissent un cap, ce sont des investisseurs privés qui ont les retours sur investissement. Avec notre société de capital-risque, nous pourrons, par un cercle vertueux, épauler plus d'entreprises".

Avec une ligne de conduite qui s'affirme comme inébranlable, la création de valeur avant la rentabilité. "Évidemment, nous n'irons pas sciemment sur des investissements à perte mais le regard sera bienveillant, avec des critères de sélection axés davantage sur le niveau de création d'emplois et de valeur ajoutée pour le territoire que sur le niveau de retour sur investissement", précise ainsi Yoan Ribay, directeur des participations chez Sofimac Régions et gérant de SCR Métropole Innovations.

Outil de transformation des territoires

En discussions depuis deux ans, attendu impatiemment par les startups locales en manque de solutions locales pour financer leurs développements, ce fonds a mis du temps à se formaliser.

La faute au Covid et au temps politique selon les élus des deux métropoles. Elles auraient probablement pu aller plus vite, en se lançant seules, chacune de leur côté dans cette opération, mais elles ont préféré avancer en tandem. "Ensemble, nous pouvons soutenir des projets plus importants", justifie Georges Hallary.

Lucie Mizoule, à Clermont-Ferrand, complète : "La concurrence est mortifère. Seul, chacun de son côté, nous ne pouvons pas exister ni au niveau international, ni même à l'échelon régional. Difficile d'émerger dans une région avec des poids lourds de l'innovation comme Lyon ou Grenoble". Pour autant, elle rappelle que Clermont comme Saint-Etienne ont des territoires qui se ressemblent, avec des terreaux d'innovation très vifs. "Ensemble, nous pouvons peser et avancer plus vite".

La conseillère métropolitaine évoque la nécessité de transformation de ces deux territoires confrontés à la désindustrialisation. "Les finances publiques sont malmenées par la crise, mais il est aujourd'hui vital d'investir dans des activités innovantes qui tireront vers le haut nos territoires. Cela participe de la relance locale".

L'annonce de la création de ce fonds a été saluée par l'ensemble des acteurs des deux écosystèmes locaux. Avec déjà près d'une vingtaine de dossiers à l'étude, pour un déblocage des premiers investissements espéré dès ce premier semestre.

Avec néanmoins un petit bémol de certains experts, comme ce spécialiste régional de la levée de fonds. Il préfère rester anonyme pour ne pas porter préjudice aux pépites qu'il accompagne sur ces deux territoires, mais confie qu'il aurait préféré un investissement des deux collectivités dans des outils déjà existants, comme Kreaxi par exemple, afin de faire grimper le montant d'intervention possible.

"C'est une première étape, une bonne nouvelle, mais on va rester encore une fois limités à des levées de 500.000 euros, avec la nécessité de superposer les couches d'investisseurs lorsque les besoins sont plus importants, dans les phase post-amorçage".

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.