Jusqu'à 2 milliards à décrocher en Isère, selon le sous-préfet à la relance

PORTRAIT. Tout juste arrivé, Samy Sisaid est le nouveau sous-préfet à la relance et à la transformation de l’Isère. Un nouveau visage qui sera chargé au cours des prochains mois d’incarner le plan de la relance de 100 milliards d’euros et ses nombreux sous-volets au sein du département. Ingénieur de l'armement, ce profil scientifique pourrait être un atout dans la main du gouvernement, en vue de mieux "territorialiser" son ambitieux programme de relance, en s’assurant notamment que les pépites et industriels isérois consomment bien leur part du gâteau.
Si les entreprises iséroises ne candidatent pas, il n'y aura pas d'investissements à attendre, rappelle le sous-préfet à la relance isérois, Samy Sisaid, qui est là pour que les entreprises locales se saisissent des aides disponibles.
"Si les entreprises iséroises ne candidatent pas, il n'y aura pas d'investissements à attendre", rappelle le sous-préfet à la relance isérois, Samy Sisaid, qui est là pour que les entreprises locales se saisissent des aides disponibles. (Crédits : DR)

Il fait partie des 30 nouveaux sous-préfets à la relance, qui seront chargés de mettre en musique, au sein des territoires, les réformes prioritaires du gouvernement et notamment, de faire connaître et traduire l'ensemble des volets du plan de relance de 100 milliards d'euros.

Ces nouveaux postes de sous-préfets, au nombre de trois en Auvergne Rhône-Alpes (Isère, Haute-Loire et Cantal), ont été ouverts pour seconder les préfets actuellement en poste dans le déploiement du plan de relance. « Les sous-préfets de la relance ont été nommés dans des territoires où il existe beaucoup d'enjeux et où l'on pouvait risquer ainsi de manquer des projets, si les équipes n'accueillaient pas une ressource supplémentaire, chargée de ce questions », explique Samy Sisaid, le nouveau titulaire de ce poste en Isère.

Faut-il en déduire pour autant que les neuf autres départements d'AuRA n'en avaient toutefois pas besoin ? Les choses ne sont pas si simples : « Dans les autres départements, l'un des sous-préfets déjà en poste peut lui-même prendre cette casquette, en vue de coordonner le plan de relance », explique Samy Sisaid.

Une manne de 100 milliards, d'ici 2022

Et il ne s'agit pas d'une mince affaire, car l'enveloppe du plan de relance de 100 milliards d'euros comprend en réalité 40 milliards d'euros de contributions européennes et intègre en son sein plusieurs budgets : celui de la 3e loi de finances rectificative pour les moyens engagés en 2020, celui du projet de loi de finances pour 2021 et le programme d'investissement (PIA4), ou encore projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021.

En poste depuis le 18 janvier dernier, Samy Sisaid a déjà mis le nez dans ses dossiers : car pour cet ingénieur de l'armement, jusqu'alors responsable des études de l'Ecole de biologie industrielle de Cergy -après un passage au sein du groupe Engie et Pearson notamment- ses nouvelles missions résonnent avant tout comme une opportunité de contribuer différemment : « Lors de ma formation, qui s'est déroulée au sein d'écoles d'ingénieurs publiques, j'ai toujours eu le sentiment que l'État faisait beaucoup pour nous. C'était donc une occasion de rendre un peu de ce que l'on m'avait donné, en aidant les entreprises affectées par la crise sanitaire ».

Il fait partie des profils « diversifiés » (militaires, directeurs d'hôpitaux, ingénieurs, inspecteurs des services vétérinaires, magistrats, etc), que l'Etat a souhaité mettre en avant durant cette crise pour se placer directement aux côtés des entreprises, au plus près de leurs préoccupations actuelles.

Des enveloppes thématisées

Originaire d'Île-de-France, cet ingénieur de formation avait notamment passé un an aux États-Unis pour effectuer des stages de recherche au sein des universités Harward (Massachusetts) et Berkeley (Californie), mais ne s'était encore jamais rendu en Isère  jusque-là.

« J'ai choisi ce territoire car il comporte beaucoup d'enjeux technologiques. En tant qu'ingénieur de formation, je trouvais intéressant de pouvoir apporter un regard sur cet écosystème, qui peut avoir différents projets technologiques à mettre en place ».

Et il aura de quoi faire puisque les 100 milliards d'euros annoncés par l'État se déclinent, en réalité, en une multitude d'appels à projets thématiques, que le sous-préfet résume en trois axes : avec un premier tiers de projets liés aux transitions énergétiques de 30 milliards d'euros (rénovation des bâtiments publics, hôpitaux, centres de recherche, universités mais aussi entreprises), ainsi qu'un second tiers (34 milliards d'euros) dédié à accompagner la compétitivité des entreprises, qui passera notamment par la baisse des impôts de production, mais pas uniquement.

« Il existe des enveloppes fléchées vers des domaines comme l'automobile, les technologies vertes, l'alimentation durable, mais également aussi des programmes comme Investissements d'avenirs (PIA4), qui comporte un volet destiné au quantique par exemple, ou encore des appels à projets technologies généraux susceptibles de financer des projets liés à l'électronique, la chimie, la pharmacie, etc », liste Samy Sisaid. Sans oublier bien sûr, un volet destiné à financier la relocalisation des productions industrielles et des industries stratégiques, ainsi que la modernisation des outils de production, dont la presse s'est déjà largement fait écho.

Avec également, dans le troisième tiers de ce plan, des aides liées à la cohésion sociale, qui comprennent entre autres le dispositif « Un jeune une solution », chargé d'accompagner l'insertion professionnelle des jeunes en temps de pandémie, à travers différentes aides (dispositifs de formation, contrats professionnels ou d'apprentissage, allocations spécifiques, etc).

Les territoires devront demander leur part

La spécificité de ces enveloppes est qu'elles ne seront pas réparties par territoire, mais par thématiques, à l'échelle nationale. « Ce qui signifie que si les entreprises iséroises ne candidatent pas, il n'y aura pas d'investissements à attendre », résume-t-il.

En dehors de certaines aides comme la baisse des impôts de production qui se feront de manière automatique, Samy Sisaid est donc là pour s'assurer que les acteurs isérois reçoivent leur part du gâteau.

Il dresse lui-même un petit calcul : compte-tenu de son poids démographique, le département de l'Isère pourrait prétendre jusqu'à 2% de l'enveloppe totale, soit tout de même près de 2 milliards d'euros. Un montant inédit jusqu'ici, d'autant plus qu'il y a « urgence » à le mobiliser, puisque les fonds du plan de relance ont vocation à être consommés au plus tard d'ici la fin de l'année 2022.

Ce « super communicant » du gouvernement a donc déjà commencé à prendre son bâton de pèlerin. Depuis son arrivée, il multiplie les visites et se charge de sensibiliser les entreprises à la manière de déposer leur dossier, qui doit être réalisé directement en ligne, sur le site de France Relance, mais aussi sur son contenu.

« Nous sommes aussi là pour voir quels sont les dossiers qui pourraient coincer, et faire en sorte de les orienter ou de les aider à revoir leur projet ».

Le sous-préfet a également la mission de « faire remonter régulièrement les besoins issus des territoires », afin que l'Etat soit en mesure de réallouer certaines enveloppes à d'autres thématiques, au cas où certaines rencontreraient moins de demandes.

Ainsi, certains programmes, comme Territoires d'industrie, seraient déjà victimes de leur succès, de même que le dispositif de rénovation des bâtiments publics, « qui se traduira, en bout de ligne, par des emplois pour le secteur privé et une hausse du carnet de commandes des entreprises du BTP ». Même chose pour les aides liées à l'embauche des jeunes, via les contrats professionnels et d'apprentissage, qui seraient elles aussi particulièrement demandées.

Des cartes à jouer en Isère

Si les chiffres ne sont pas encore tous consolidés par région, plusieurs projets isérois ont déjà été soumis dans les domaines de l'automobile, l'aéronautique, l'électronique, la chimie, ou encore de la santé.

Quatre projets isérois ont d'ores et déjà été retenus au sein de l'appel à projets national « Résilience » -doté de 680 millions d'euros - visant soutenir des projets de TPE et PME dans la relocalisation d'activités industrielles. Avec parmi eux, celui de Seqens, qui veut investir dans la sécurisation de sa chaîne logistique de principes actifs entrant dans la fabrication de médicaments destinés aux patients Covid (65 millions d'euros), ou encore la deeptech Aledia, qui s'apprête à monter une usine de microLeds et nanofils pour la fabrication d'écrans plus performants (44 millions d'euros accordés sur 150 millions d'euros). La PME Scalinx, spécialisée en conception de circuits intégrés, et Novapex, une filiale du groupe Seqens qui constitue la seule unité française de production de phénol et d'acétone, font également partie de ces lauréats.

« Il existe en Isère un vrai enjeu sur le volet industriel, qui a besoin de conserver sa compétitivité et de ne pas se faire déclasser face à la concurrence. Il est donc déterminant que ces entreprises puissent pivoter et se saisir de l'ensemble des outils disponibles pour le faire », avance-t-il.

D'autant plus que selon lui, la diversité des entreprises iséroises constituerait plutôt un atout pour adresser la période à venir. « Nous ne sommes pas sur une région où l'ensemble du tissu industriel serait tiré uniquement par l'aéronautique, par exemple ».

Et d'ajouter : « L'objectif du plan de relance n'est pas de récréer l'économie que nous avions il y a un ou deux ans, mais plutôt d'aider ceux qui ont des projets innovants à se rééquilibrer et à créer de nouveaux emplois pérennes. Et à ce titre, nous avons vraiment des dispositifs pour tout le monde ».

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