Métropoles : Lyon et Grenoble peuvent mieux faire, estime la Cour des comptes

La Cour des comptes publiait, cette semaine, son premier bilan concernant la mise en place des métropoles en France. Un premier état des lieux peu reluisant qui, s'il ne pointe pas d'insuffisance scandaleuse, ne met pas non plus en avant de réussite satisfaisante. En Auvergne Rhône-Alpes, d'après les rapports de la chambre régionale des comptes, la création des deux métropoles de Lyon et Grenoble n'aurait en effet pas eu les effets escomptés...
Selon un premier bilan dressé par la Cour des comptes à l'échelle de 13 métropoles françaises, la création de la Métropole de Lyon en 2015 n'a pas tenu toutes ses promesses.
Selon un premier bilan dressé par la Cour des comptes à l'échelle de 13 métropoles françaises, la création de la Métropole de Lyon en 2015 n'a pas tenu toutes ses promesses. (Crédits : ML)

"C'est un point d'étape, le recul n'est pas encore suffisant pour trancher définitivement la question. Les mécanismes sont complexes et longs à mettre en œuvre, nos conclusions sont donc intermédiaires", a prévenu Pierre Moscovici, président de la Cour des comptes, à l'occasion de la présentation, ce mardi 14 décembre, du premier rapport de la juridiction financière sur la mise en place des métropoles françaises.

Un point d'étape donc, mais qui dresse tout de même en substance un premier bilan assez "peu convaincant", de manière générale, des métropoles françaises, du titre même du fascicule de la cour, consacré à ce thème. Treize d'entre elles, dont deux au sein de la région Auvergne Rhône-Alpes (Lyon et Grenoble), ont été étudiées de plus près pour construire l'analyse des magistrats. D'après les rapports récents de la chambre régionale des comptes d'Auvergne Rhône-Alpes, menés avant les dernières élections, force est de constater qu'elles ne semblent pas avoir convaincu, plus que les autres...

Lyon : bien, mais peut mieux faire

Créée en 2015, grâce à la loi MAPTAM, la métropole lyonnaise (1,39 million d'habitants, recettes : 2,7 milliards, 9100 agents), désormais conduite par le président EELV Bruno Bernard, jouit d'un statut particulier, doté de compétences plus larges que celles des communautés urbaines, dont les autres métropoles sont majoritairement issues.

"La création de la Métropole de Lyon est l'aboutissement d'une logique d'intégration poursuivie de longue date par les acteurs publics locaux. Pour autant à ce stade, l'expérience lyonnaise n'a pas tenu toutes ses promesses", écrit ainsi la cour des comptes, dans son fascicule sur les finances publiques locales 2020, rendu public cette semaine.

"En effet, si le passage de la communauté urbaine à la métropole de Lyon peut globalement être considéré comme un succès, d'autant plus qu'il s'est effectué dans des délais très courts, l'organisation en place est encore largement héritée de l'ex-communauté urbaine et les gains d'efficacité et d'efficience restent à venir", ajoute-t-elle.

Ces gains d'efficacité attendus le seraient tout particulièrement encore, en matière de gestion des ressources humaines notamment. La Métropole de Lyon a en effet fait le choix de maintenir les régimes indemnitaires des ex-agents de la Courly d'un côté, et des ex-agents de l'ancien Département du Rhône de l'autre. Trois employés de la métropole lyonnaise, réalisant le même travail, peuvent ainsi être rémunérés selon trois grilles distinctes : selon celle de la Courly, du Département ou de la nouvelle métropole pour les agents recrutés depuis sa création.

Ce choix a "évité une dérive inflationniste des dépenses du personnel", note la Cour des comptes, "mais au prix du maintien d'écarts encore importants entre les agents (...) que la métropole s'efforce de résorber".

Des synergies encore jugées trop faibles

Côté synergies entre les politiques de la Métropole et du Département, - qui étaient pourtant au cœur des arguments en faveur du basculement sous ce statut de métropole-, le Cour des comptes relève que les effets d'échelle seraient en réalité encore trop limités, en matière de politique du logement, de politique sociale, de développement économique et d'insertion. De plus, si un échelon administratif a été supprimé, avec la disparition du Département sur le territoire du Grand Lyon, cela n'a pas encore débouché sur une meilleure lisibilité de l'action publique pour les usagers.

"Les compétences sont encore enchevêtrées, complexes", souligne ainsi la Chambre régionale des comptes en Auvergne-Rhône-Alpes. Concernant l'intégration des communes, elle n'a pas assez progressé, "alors que c'est sans doute à ce niveau que résident encore des gisements en matière de simplification, de synergies et de gains d'efficience des politiques publiques". Enfin, la Cour des comptes appelle à une réflexion sur la cohérence de la gouvernance à l'échelle de l'ensemble du territoire métropolitain, concernant le triptyque arrondissements - commune - métropole.

Grenoble, métropole inachevée

Concernant la métropole grenobloise (400.000 habitants, recettes : 400 millions d'euros, 1.700 agents), dirigée par l'ex-socialiste Christophe Ferrari, la Cour des comptes évoque une métropole "inachevée en raison d'une politique assumée de petits pas et de concertation constante, avec la création d'instances intermédiaires utiles et qui fonctionnent comme la conférence des maires, les conférences territoriales ou les réunions des directeurs généraux de service".

Si l'ensemble fonctionne, il en résulte néanmoins des points noirs. Notamment la non-adoption d'un pacte financier fiscal, avec des dispositions spécifiques collectivité par collectivité. La Cour des comptes pointe également l'absence de projet métropolitain clair qui serait dû, selon Grenoble Alpes Métropole, à "la charge de travail du processus de métropolisation".

D'autant plus que, depuis la finalisation de ce rapport édité par la chambre régionale des comptes, la métropole grenobloise a vécu en juillet dernier un nouveau soubresaut avec la division de sa majorité de gauche, opérée à l'occasion de la réélection de Christophe Ferrari. Un épisode qui pourrait avoir des conséquences encore non-mesurées sur la vision mais également la structuration de celle-ci au cours des prochains mois.

Autre difficulté pointée au sein de ce rapport : le suivi déficient de certains dossiers, comme les voiries ou l'éclairage public, au regard de ce qui est pointé comme une absence d'intégration complète du processus métropolitain grenoblois.

Qu'en sera-t-il donc demain du visage des métropoles auralpines ? Si la Cour des comptes ne se projette pas, on peut toutefois noter que depuis la constitution de ces derniers rapports, le Grand Lyon a lui aussi rejoint la vague des métropoles "vertes", conduites par des élus écologistes. Reste donc également à mesurer quelle sera donc la vision, portée par ces exécutifs aux couleurs politiques qui tranchent avec celles des instigateurs de ces métropoles, sur les six prochaines années.

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Commentaire 1
à écrit le 17/12/2020 à 5:31
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Quand on crée des postes de vice-président pour reclasser les coquins, on ne s'étonne de rien... belle réforme territoriale! (ou la multiplication des mille-feuilles administratifs)

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