Microélectronique : le plan Nano 2022 sur les rails

L'annonce a pu surprendre ses partenaires. Alors que les acteurs de la microélectronique et des collectivités locales se trouvaient en pleines discussions autour du futur plan Nano 2022, la région Auvergne Rhône-Alpes a annoncé l'allocation d'une enveloppe de 35 millions d'euros. Elle affirmait aussi adresser "un appel aux collectivités locales", alors que le dossier serait actuellement soumis pour approbation à Bruxelles.
(Crédits : © 2009 Thomson Reuters)

Certains diront en off que la Région pourrait bien avoir "grillé la priorité" à d'autres acteurs. D'autant plus qu'une annonce du Ministère de l'Economie devrait avoir lieu, selon nos informations, autour du 13 décembre prochain.

Une chose est sure : en annonçant la semaine dernière dans un communiqué unilatéral l'attribution d'une enveloppe de 35 millions d'euros pour le Plan Nano 2022 avant l'ensemble des partenaires, la Région a remis sur le devant de la scène un sujet qui se discute en coulisses depuis plusieurs mois entre les acteurs de la filière microélectronique et l'Etat français.

Avec, au centre des préoccupations, l'avenir de ce secteur et un marché des composants électroniques qui pèse 19 400 emplois directs en France et 4 milliards d'euros de chiffre d'affaires, dont 90 % réalisés à l'exportation.

Successeur du plan Nano 2017, qui avait lui-même suivi à sa version 2012, le plan Nano 2022 vise à accompagner les acteurs hexagonaux de la microélectronique, pour une bonne part établis en Auvergne-Rhône-Alpes, en vue de soutenir "une filière d'excellence, source d'innovation pour de nombreux secteurs mais aussi un enjeu de souveraineté économique".

Comme l'affirmait la Région, "à l'heure où les États-Unis et l'Asie investissent massivement dans le domaine de l'innovation, la France ne doit pas être en reste".

Vers une première industrialisation

C'est pour cette raison que l'ensemble des acteurs majeurs de la filière de la microélectronique, dont ST Microelectronics, Soitec, Sofradir, le CEA-LETI, se sont réunis aux côtés des représentants de l'Etat français et des collectivités locales, afin de bâtir un nouveau plan quinquennal destiné à épauler l'innovation et la R&D du secteur.

"Nous travaillons effectivement sur ce plan depuis deux ans, aux côtés de sept partenaires (dont Sofradir/Ulis, le CEA Leti et StMicroelectronics NRDL) car la microélectronique est une filière stratégique et transversale. C'est la base de l'innovation que l'on retrouve ensuite dans d'autres secteurs comme l'aéronautique, l'automobile, les objets connectés, les smartphones, etc", confirme José Beriot, vice-président des opérations spéciales de Soitec.

Selon lui, l'une des nouveautés de cette mouture est le passage d'un programme d'aide à l'innovation à un plan qui soutiendrait aussi la première industrialisation des nouvelles technologies.

"C'est un changement important par rapport aux plans précédents : s'il est très bien de développer des technologies permettant de prendre des parts de marché, nous sommes arrivés à un moment où il est devenu nécessaire d'industrialiser le résultat des recherches des plans précédents", confie-t-il.

Pour Soitec, "l'essentiel du chiffre d'affaires actuel dépendrait désormais des technologies ayant été mises au point dans le cadre du plan précédant (Nano 2017 NDRL), en ce qui concerne notamment les radiofréquences et le substrat FDSOI", poursuit José Beriot.

800 millions d'euros d'investissements

Le plan serait actuellement en cours de notification à Bruxelles, où l'aval de la Commission Européenne est attendu. Il s'inscrit dans le cadre d'une procédure européenne qui vise à autoriser des aides spécifiques à l'innovation et la première industrialisation dans le secteur de la microéléctronique, au sein des quatre états (France, Italie, Allemagne et Royaume-Uni).

 "Les plans bâtis par les quatre pays doivent néanmoins avoir une cohérence et une complémentarité pour que l'Europe autorise une exception de cette nature", contextualise José Beriot.

A l'occasion du lancement du Comité stratégique de filière électronique le 28 mai dernier, le Conseil national de l'Industrie (CNI) avait d'ores et déjà annoncé que ce programme s'appuierait sur un financement partagé entre l'Europe, l'Etat, les collectivités territoriales ainsi que les partenaires privés.

L'Etat a déjà confirmé un soutien à hauteur de 800 millions d'euros, "qui doit générer un investissement total de 5 milliards d'euros" ainsi que "des dépenses de travaux et d'investissements de 5 milliards d'euros réalisés par les partenaires".

De son côté, la Région, qui est donc la première collectivité à se positionner sur ce plan, a rappelé que celui-ci devrait permettre "la création et le maintien de 3 000 emplois directs et de 8 000 emplois indirects", tandis que "80 à 90% des financements seraient attribués au bassin grenoblois".

Elle en a d'ailleurs profité pour lancer d'ores et déjà un appel du pied à ses partenaires locaux, que sont le Département de l'Isère, et Grenoble Alpes Métropole.

"Nous leur faisons une proposition d'abondement aujourd'hui : à chaque fois que la métropole de Grenoble mettra un euro pour le plan Nano 2022, la Région mettra deux euros", annonçait-elle dans son communiqué.

Une proposition que les deux institutions, contactées par Acteurs de l'Economie-La Tribune, n'ont pas souhaité commenter pour l'instant. Si 15 des 35 millions d'euros annoncés par la Région iront à financer l'acquisition d'un équipement de lithogravure au CEA de Grenoble, ce dernier n'a pas non plus souhaité répondre aux questions à ce sujet. Même chose pour le groupe Ulis/Sofradir, qui souhaite "attendre l'annonce officielle de Nano 2022 par M. Bruno Le Maire prévue le 13 décembre, pour s'exprimer". Le groupe STMicroelectronics n'a pas non plus retourné nos demandes d'entrevue.

Pourtant, à Grenoble, le sujet de Nano 2022 reste pourtant un secret de polichinelle.

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