Etat d'urgence : les frontaliers hauts-savoyards touchés

Au lendemain des attentats, les forces de l'ordre se sont organisées aux différents postes de frontière. En Haute-Savoie, frontalière avec l'Italie et la Suisse, les contrôles se sont ainsi intensifiés et notamment autour de Genève, où la surveillance s'est accrue. Mais en plein état d'urgence, 100 000 frontaliers continuent de se rendre à leur travail.
À Bardonnex, on enregistrait plusieurs kilomètres de bouchons dans les jours qui ont suivi les attentats.

"Continuer à vivre, prudemment, mais normalement." L'exhortation de Georges-François Leclerc, préfet de Haute-Savoie, aux 294 maires du département, vaut pour la population. Car si des perquisitions ont bien mené à des mises en examen (comme à Fillinges) suite à 77 signalements de radicalisation*, les djihadistes locaux se compteraient "sur les doigts de la main", selon le représentant de l'État. Le dispositif « hors du commun » et les mesures de sécurité concernent plus la proximité de la Suisse et de l'Italie.

Une double frontière qui place la Haute-Savoie en « première ligne

Marie-Ange a dû prévoir un peu plus de temps pour se rendre au travail : "Je me suis dit que ça allait être galère sur la route", explique cette pendulaire. "Même sans fouille, devoir ralentir ou arrêter la voiture ça crée d'énormes bouchons selon les heures."

Car même si certains passages comme le tunnel du Mont-Blanc ont été fermés temporairement dans l'urgence, juste après les attentats, c'est bien un dispositif de contrôle renforcé qui est en vigueur : surveillance des gares, des aérodromes (Annecy et Annemasse), et contrôle aux frontières. Les forces de l'ordre sont donc censées être en permanence présentes sur les grands axes.

Usines, lieux de culte, grands centres commerciaux du département, mais aussi marchés de Noël sont également surveillés et des contrôles de véhicule sont possibles en tous lieux.
Pas de renfort d'effectifs prévu (en dehors de la police aux frontières), mais militaires et gendarmes en permission ont été rappelés et les autorités suisses et italiennes ont été contactées.

Jusqu'à une heure d'attente sur les routes

Le Corps des gardes-frontière suisse annonce d'ailleurs avoir intensifié ses contrôles en collaboration avec les forces françaises, appelant à prévoir "des perturbations importantes" et un "temps d'attente de 30 minutes à une heure sur certains axes."  Sur le terrain, douaniers français et gardes-frontière suisses patrouillent même ensemble, comme à la gare de Cornavin à Genève.

À Veigy-Foncenex, où ironiquement le poste-frontière inutilisé a été démoli il y a peu, on comptait effectivement de longues minutes d'attente, avec des contrôles systématiques dans les deux sens et une impossibilité de traverser sans ses papiers. Des mesures déjà abandonnées quelques jours plus tard. Tous les frontaliers n'ont d'ailleurs pas été touchés, à l'image de ce couple pour qui rien n'a été différent : "Nous passons depuis des années par une petite douane près de Veigy et nous n'avons jamais vu ni contrôles ni policiers". Le mari, entrepreneur à Genève, ne constate d'ailleurs aucun changement dans ses affaires.

"Pas encore" de conséquences économiques

Alors que les principaux leaders syndicaux et patronaux alertaient Matignon en fin de semaine dernière sur leurs inquiétudes quant aux répercussions économiques de la mise en place de l'état d'urgence, les commerces de la région lémanique ne relèvent "pas encore" de baisse d'activité.

Si certaines grandes enseignes suisses ont immédiatement reçu pour instruction de la part de leur direction de ne "répondre à aucune question", d'autres magasins helvètes avouent ne pas "voir de changement pour le moment", ni "rien d'inhabituel" dans la fréquentation quotidienne.

L'aéroport international de Genève, qui compte le deuxième centre commercial de Suisse romande avec sa centaine de boutiques, ne pâtit pas non plus d'une quelconque variation du nombre d'usagers ou d'un "impact sur le volume d'affaires". Quant à son degré de sureté, "il est toujours maximal, respectant les mêmes règles internationales toute l'année".
Côté français en revanche, les commerces relèvent une certaine répercussion :

"Les premiers jours, il était plus difficile de traverser la frontière et nous avons effectivement ressenti une baisse de fréquentation, surtout le premier week-end, mais cela revient maintenant à la normale", explique le directeur d'une grande surface de Saint-Julien.

L'état d'urgence, prorogé par l'Assemblée nationale et le Sénat, pourra durer jusqu'à fin février prochain, mais l'annonce a déjà été faite que les contrôles aux frontières seraient maintenus aussi longtemps que la menace terroriste le nécessitera.

*En Haute-Savoie, d'après le rapport de la commission d'enquête de l'Assemblée nationale sur la surveillance des filières et des individus djihadistes, compilé par l'Unité de coordination de la lutte antiterroriste (Uclat), rattachée au Ministère de l'Intérieur.

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