Pierre Jamet : le roc

Depuis vingt ans, il occupe la double responsabilité de directeur général des services du Conseil général du Rhône et de directeur de cabinet de son président Michel Mercier. Une longévité et une fidélité rares, dans le terreau desquelles cet « homme de l'ombre » exerce un pouvoir singulier, nourri par une intelligence, une puissance de réseaux, et des desseins personnels redoutés.

« Oui, la puissance de son intelligence, celle des réseaux et du pouvoir qu'il a accumulés, peuvent faire peur ». En une phrase, Bernard Sinou, directeur général de la CCI de Lyon, circonscrit l'appréciation que Pierre Jamet exhale unanimement dans le milieu décisionnel. Le directeur général des services (DGS) du Conseil général du Rhône et directeur de cabinet du président depuis vingt ans, est effectivement redouté pour cette « intelligence », « ces réseaux », ce « pouvoir » qu'il a déployés au service d'un homme - Michel Mercier, président du Département -, d'une cause - le service public - et de sa propre existence.

Intelligence de réseaux

Un trépied sur lequel cette personnalité secrète, dense, complexe, pudique, s'est façonnée, cultivant un mystère interprété qui pour de la discrétion qui pour de l'opacité, et sécrétant une crainte qui réelle et fondée qui fantasmée. Il est, confient l'un de ses homologues et son ami, l'ancien industriel Vincent Roiret, « Raminagrobis », ce Prince des chats popularisé par Rabelais puis Jean de La Fontaine, rond, patient, sympathique, énergique et malin, qui amadoue, charme, courtise, qui aussi peut dissimuler, manipuler, et contourner sa proie « pour y planter ses griffes au bon moment». « Homme de l'ombre ? La définition me va bien », reconnaît l'intéressé. Qui n'ignore pas les lectures antithétiques que provoquent une telle position et une telle longévité au sommet du pouvoir. Longévité qui a charrié un cortège de partisans et de contempteurs. Admiré autant qu'honni, parfois pour les mêmes raisons, Pierre Jamet est ainsi à la fois « l'individu attentionné, doux, profondément sensible » - les témoignages sur son « humanité », « son écoute », sa « chaleur humaine et sincère », et les preuves concrètes, rapportées jusque par des détracteurs ou des élus d'opposition comme Jean-Michel Daclin (PS), ne manquent pas - et le « décideur froid, colérique, qui tranche, déstabilise, instrumentalise, et fait mal ». Il est pour les uns celui qui « intrigue », pour d'autres celui qui « depuis longtemps a dépassé ce stade ». Sa science du droit, le DGS de la Région Rhône-Alpes, Gilles Le Chatelier, se félicite qu'il la mette au service « de l'action et de la construction » ; en haut lieu à la CCI de Lyon ou au Grand Lyon, on affirme « radicalement l'inverse ». Son œuvre est jugée « l'une des plus précieuses et utiles au développement du territoire», mais aussi, dans la bouche d'un grand entrepreneur ou d'une des principales autorités patronales et consulaires lyonnaises, « la plus nuisible ». Franc-maçon? « Il l'est, et a complété de ce réseau celui, catholique, de Michel Mercier », jurent certains; « son rejet de la cause est viscérale », objectent un membre du Grand Orient et l'une de ses coreligionnaires. Parmi les hiérarques des collectivités locales politiquement ou territorialement rivales, d'aucuns le considèrent « fiable, droit » quand d'autres déplorent « une attitude retors incompatible avec une relation de confiance »; d'ailleurs, un même conseiller général PS tout à la fois salue « l'homme de parole » et invoque celui « qui, tout en jurant le contraire, a cherché à faire invalider » sa victoire électorale... Tout et son contraire. Autant d'extrêmes qui se nichent dans les altérités et les aspérités et, une fois rassemblées, sculptent une personnalité riche.

Maître du droit

Riche, en premier lieu, d'une conception presque viscérale et sacralisée de l'intérêt général, que cet admirateur du général de Gaulle a choisi de servir; fidèlement, sans succomber aux alléchantes sirènes du privé. Les compétences du Département, pour l'essentiel celles d'un service public - l'action sociale (handicap, enfance, personnes âgées, RSA) absorbe plus de la moitié des 2,1 milliards d'euros de budget annuel -, ont donné matière à Pierre Jamet d'assouvir son souci de la « chose publique ». Laquelle, des figures de l'entrepreneuriat lyonnais la jugent orthodoxe et, à l'aune de la détestation qu'Olivier Ginon, fondateur de GL Events, et lui se vouent, symptomatique de « son mépris, de sa jalousie pour l'entreprise et la réussite privées ». Et des détracteurs d'avancer notamment la suppression d'une subvention départementale de 4 millions d'euros pour la société Cofil Eurexpo « au motif d'un changement de gouvernance introduisant le privé », et la « production prochaine d'un rapport de la Chambre régionale des comptes exhortant à une mise en concession d'Eurexpo et dont la motivation et l'origine des questions sont explicites ». Cette préoccupation de l'intérêt général, Pierre Jamet l'exprime également dans l'enseignement du droit public à l'université Lyon 3. Là, le professeur-associé expose une facette de sa personnalité et une ample     lecture de ses compétences. Directeur de l'Institut du droit de l'environnement (Jean Untermaier), directeur du cabinet. Du président de l'université (Jean-Charles Kervevan), directrice du master de droit des transports de Lyon 2 (Isabelle Bon¬Garcin), anciens étudiants (l'avocate et élue Modem Fouziya Bouzerda, le conseiller et maire de Limonest Max Vincent...), tous décrivent un professionnel « rigoureux, solide, exigeant, curieux, cultivé, féru d'histoire », une « mécanique intellectuelle brillante » secondée d'une « mémoire » et d'une « capacité de conceptualisation et de synthèse » « phénoménales », un pédagogue « passionnant et charismatique », qui « occupe la scène et séduit le public », qui « a enrichi l'enseignement et la recherche du concret de son expérience professionnelle » et ainsi nourrit d'une attractivité rare l'austère matière. Cette université, où il connut Michel Mercier, également professeur de droit, dès 1974, est aussi le théâtre de l'ascenseur social, de l'accès à l'éducation supérieure auxquels le fils d'épicier d'une bourgade ligérienne doit tant et en mémoire, en honneur desquels il a choisi de servir et de transmettre.
Cette science du droit et les réseaux qu'il a tissés dans le milieu participent à sa réputation et aux craintes qu'il inspire. Ils fragilisent et inquiètent ceux qui en sont dépourvus. Surtout, ils lui permettent d'exploiter dans la légalité toutes les possibilités que le champ du droit autorise… ou ne couvre pas. « Une telle maîtrise du sujet, une telle expertise de juriste et du monde des collectivités locales, donnent à Pierre un coup d'avance sur ses adversaires », observe, laudateur, Gilles Le Chatelier. Et font écho aux compétences qui caractérisent le « patron » administratif du Conseil général. Elles donnent en effet crédit à « l'homme de méthode, au gestionnaire rigoureux, à l'organisateur, au bûcheur, au maître de dossiers, au traqueur des gaspillages » qui ont métamorphosé l'institution départementale. Et elles assurent la légitimité au nom de laquelle il a récemment produit un rapport sur la situation financière des collectivités locales que le Premier ministre François Fillon lui avait commandé. « Un homme à la fois gestionnaire, manager, et de projets. Cette équation est rare », admire Bernard Sinou. Une réputation professionnelle incontestée, partagée jusque par l'élu vert Etienne Tête. Mais que la réputation « morale » n'épouse pas totalement.

IIIe République

Dans les travées de ce Département du Rhône que pave une concorde étonnante parmi les 54 conseillers généraux de tous bords, Pierre Jamet incarne « aussi» une IIIe République dont la sérénité qui caractérisait les assemblées d'élus devait beaucoup aux ententes de toutes sortes. Ententes qui, d'une bouche à l'autre, empruntent des sens et répondent de motivations contraires - intérêt général, pragmatisme, logique suprapolitique, mais aussi connivence, « lyonnaiseries », « collusion », « copinage », voire « clientélisme » -. Les séances publiques sont le théâtre bonhomme de décisions toutes ou presque adoptées à l'unanimité, de tirades au sein de l'opposition qui obséquieuses qui faussement critiques avant de rallier le vote de la majorité, de clins d'œil et de sourires, parfois hilares, entre Michel Mercier et le banc socialiste. Ce consensus, précieux ou délétère, preuve ou parodie de démocratie selon les interprétations, et que symbolise la complicité entre le président et le socialiste Bernard Rivalta, a pour explications l'objet même des compétences techniques ou sociales d'un Département par ailleurs collectivité bien davantage de gestion que de projets, le mode de scrutin - élection au suffrage universel uninominal à deux tours qui fait de chaque élu un vainqueur, éteint les rivalités et favorise compromis et coalitions -, l'exiguïté de l'assemblée, et la culture centriste du tandem dirigeant. Mais aussi: le dispositif d'affectation triennale des crédits, l'organisation territoriale, articulée autour des 200 Maisons du Rhône, la connaissance minutieuse de chaque recoin, de chaque histoire, de chaque élu du Rhône, et un puissant quadrillage des réseaux. Ainsi, chaque conseiller général obtient globalement de quoi « remplir », justifier, et faire rayonner son mandat. A l'image du maire de Givors et président du groupe communiste Martial Passi - dont l'épouse dirige l'important service (500 personnes) «Santé, enfance, et famille » du Département-, d'aucuns s'en félicitent. « Les arbitrages de Michel Mercier et de Pierre Jamet résultent de raisonnements fondés, appliqués aux réalités et aux singularités du terrain, peu politiciens, non manichéens ». D'autres en stigmatisent les limites. « Cette méthode, opaque, autorise toutes les supputations et encourage la servilité des élus », déplore ainsi Jean-Michel Daclin. Ce qu'un conseiller général socialiste assimile au «fait du Prince». Des arbitrages dont le précautionneux dosage et le savant équilibre assurent à leur auteur, Pierre Jamet, loué pour sa «proximité et sa disponibilité », d'être, là encore, incontournable. Et alors de commenter, caustique, les critiques sur l'apathie de l'opposition: « Qu'on ne nous tienne pas rigueur d'offrir à des élus socialistes d'être davantage écoutés et considérés ici que dans leur propre camp et au sein d'assemblées ou d'organigrammes où ils sont majoritaires! ». Une propension au sarcasme qu'un ancien-dirigeant du Grand Lyon assimile au plaisir « hédoniste » de « déstabiliser l'adversaire. Je l'ai vu « retourner » des conseillers généraux PS en faveur du Département et contre l'intérêt du Grand Lyon dont ils étaient conseillers communautaires, je l'ai vu obtenir avant moi des informations au sein du groupe socialiste du Grand Lyon. Il exultait. Mais peut-être était-ce un moyen d'exister à la tête d'une collectivité dont la marge de manœuvre et d'initiatives est faible, et dont la lisibilité et une partie des compétences sont noyées sous celles du Grand Lyon. C'est aussi emblématique d'un pouvoir « d'empêcher de faire » plus grand que celui de «faire» ».

Déficit d'information

Incontournable. Omnipotent. Autocrate. Les épithètes, rapportés par l'ensemble des témoins - collaborateurs directs et indirects, proches ou lointains interlocuteurs, amis et détracteurs - pour qualifier le fonctionnement du Département et de Pierre Jamet, traduisent une centralisation du mode décisionnel qui assure à ce dernier d'être « l'homme (très) fort » de l'institution. Tout ou presque est soumis à son arbitrage. «Je tiens à être informé simplement de tout ce qui dysfonctionne », se défend-il. La longévité du tandem formé avec Michel Mercier, l'extension progressive de son champ de responsabilité, et le cumul des deux fonctions de DGS et de directeur de cabinet, lui octroient toutefois bel et bien un statut de « tout puissant ». Sur lequel les conseillers généraux eux-mêmes se reposent, jusqu'à fermer les yeux sur quelques défaillances. Parmi elles, le déficit d'informations qui leur sont transmises  - pour l'anecdote, c'est l'auteur de l'article qui apprendra à Dominique Perben, premier vice-président, le départ cet été du directeur général du Musée des Confluences, Michel Côté -. Un partage insuffisant, même un morcellement et une compartimentation de la connaissance qui seraient appliqués au sein de l'administration et alors attribués à la volonté de Pierre Jamet « d'être seul » à en contrôler l'exhaustivité et à en orchestrer la répartition, « au risque de générer dans l'entourage, incompréhension, rivalité, et méfiance ». Une logique, détaille un proche collaborateur, qui oblige à «décoder, à interpréter, à rassembler l'ensemble des décisions, puis à les mettre en perspective pour en saisir le sens global ». Et qui, in fine, ne favorise pas la transparence, surtout lorsque l'institution, pour des raisons «aussi» de rigueur budgétaire et d'image, verse peu dans la communication.

Schizophrénie

L'intérêt d'une gestion unique des responsabilités de DGS et de directeur de cabinet est évident, surtout lorsque l'auteur peut revendiquer une maîtrise aussi grande des dossiers: circuit de décision lisible, fluide, et rapide. « Cela assure la stabilité et la mémoire, essentielles à l'efficacité et à la cohérence décisionnelles », corrobore Philippe Guérand, membre du bureau du Medef Lyon Rhône. Mais encore faut-il, souligne malicieusement l'un des bénéficiaires, « être de ceux qui ont ses faveurs ». Car une telle concentration des pouvoirs n'est pas sans dangers. Celui de survaloriser le pouvoir de celui qui en dispose, celui de susciter des pratiques de favoritisme, celui d'exhorter l'entourage à l'inféodation et de dissuader les opinions divergentes ou correctrices qui font office de pare-feux et d'alarme, celui d'étouffer l'émergence d'idées ou de profils indépendants, celui alors d'entraîner l'organisation vers la sclérose voire même, examinent les plus vitupérateurs, la fossilisation. D'autre part, la confusion et la porosité des deux identités administrative et politique exposent à une « schizophrénie » productrice d'arbitrages avec raison ou maladroitement mal interprétés, de nature à affaiblir l'image et l'efficacité de l'institution. « Qui parle? Le DGS ou le Dir'cab? Le premier doit agir sans ambiguïté, préconise Bernard Sinou, ancien DGS de la Région Rhône-Alpes. Ce qui semble être le cas de Pierre ». Et lorsque l'exaucement de l'intérêt « politique» du président dessert la vocation ou l'efficacité de la collectivité, est-ce le DGS ou le Dir'cab qui doit trancher? «Les contradictions inhérentes à une telle configuration obligent à faire des arrangements parfois compliqués pour faire avancer les dossiers, constate Michel Côté. Il n'empêche, si l'on s'en tient au seul résultat, le bilan est positif ». L'imperméabilisation des deux responsabilités a toutefois ses partisans. Et ses arguments. « A-t-on vu une entreprise confier au même dirigeant la présidence du conseil d'administration ou du directoire et celle du conseil de surveillance? », s'étonne un cadre dirigeant.

Usure

Agrégée à la longévité, la concentration des pouvoirs peut mécaniquement provoquer le découragement, l'isolement, voire l'élimination des contre-pouvoirs. Le spectre de l'usure et de l'excès du pouvoir apparaît alors. Une proche de Pierre Jamet et de Michel Mercier y perçoit l'autorisation, même inconsciente, de repousser les frontières du « moralement acceptable » et de faire l'écart. « Il peut mettre son intelligence, remarquable, au service de destinées déviantes », assène un ex-haut dirigeant de l'institution. Quelques anciens collaborateurs directs confessent avoir été « démolis » et, pour certains, déplacés dans des structures adjacentes immédiatement polluées. D'aucuns, y compris parmi les acteurs du dossier, y décèlent le germe à partir duquel au milieu des années 2000, la vie privée de Pierre Jamet coïncida avec la concession à un groupe de communication lyonnais d'une partie substantielle du budget de communication du Département (Journal des Maisons du Rhône, identité visuelle, charte graphique, signalétique...) et de ses satellites (Domaine de Lacroix Laval, musées). « Les gens de pouvoir ont souvent une relation difficile au pouvoir », sourit le responsable d'une Maison du Rhône. « Surtout lorsque l'exercice dudit pouvoir n'est que tactique, souvent sclérosante, destinée à « maintenir » un système qui lui-même « maintient » l'existence et la reconnaissance de son bénéficiaire », complète un dirigeant lyonnais, longtemps interlocuteur direct de l'intéressé. La gouvernance du Conseil général est-elle archaïque et obsolète? Sa salubrité a-t-elle vacillé? « Elle ne correspond plus à ce que l'institution est devenue en matière de responsabilités et d'effectifs - le nombre de salariés a bondi de 1500 à 6000, ndlr - ni aux enjeux de la réforme des collectivités », estime un ancien chef de cabinet. « Il est l'heure de passer à autre chose », d'établir une « alternative » à la dyarchie en place depuis deux décennies, « et de délester la « tortue » de sa lourde carapace », font écho d'autres témoins. « Le système va sauter, affirme un patron lyonnais. La fin du règne approche ».

Probité

Perspective contestable. D'une part car l'exhortation ne fait pas l'unanimité. D'autre part car le besoin de reconnaissance et l' « existence » de Pierre Jamet sont indexés à l'envergure du pouvoir qu'il détient, des réseaux qu'il a ramifiés, et concomitamment de l'influence qu'il exerce. Etre «au centre de jeu », « la pièce maîtresse de l'échiquier », le « lobbyiste », le « marionnettiste » qui agitent, déplacent, « manipulent » les personnages - « sans pour autant être un Machiavel qui « joue » des gens », assure un ancien chef de cabinet - au gré d'objectifs précis. « Sa conception de la relation humaine est utilitariste », affirme une ancienne directrice de service. Ce que Vincent Roiret ne dément pas: « Pierre est un entremetteur utile aux autres », qui aime initier, orchestrer, favoriser les relations, mais aussi en tirer la « quintessence et une redevance » qui nourriront sa « reconnaissance ». Et fortifieront la densité de son pouvoir. « Comme au sein du remarquable club AURA qu'il a cofondé et qui rassemble cent cinquante artistes, universitaires, chercheurs, entrepreneurs de Rhône-Alpes, il est comme une Reine dans la ruche ». Un exercice viscéral du pouvoir, corrigent respectivement Bernard Devert, fondateur d'Habitat et Humanisme, et Bernard Sinou, qu'il met au service « de créer, d'agir, de bâtir dans l'intérêt général» et « d'être à l'origine, ou au pire, dans la décision. Il a pour motivation de dominer chaque situation, de démontrer son utilité aux enjeux de la « chose publique » ». « J'aime réaliser que cela avance », explique d'ailleurs Pierre Jamet. Car en effet, point de suspicion sur l'intégrité intellectuelle d'un homme « tout sauf d'argent », simplement investi dans une conjonction d'intérêts - celui de Michel Mercier, celui de l'Institution, et le sien - vers l'accomplissement et l'harmonisation desquels sa pratique du pouvoir est tendue. « Son honnêteté intellectuelle n'est pas contestable. Mais pour atteindre l'objectif qu'il s'est fixé, il est sans état d'âme », assure Jean-Michel Daclin.

Serviteur

Cet exercice du pouvoir l'expose depuis vingt ans aux tempêtes, y compris personnelles. Rien, pourtant, ne semble être parvenu à fissurer le « roc » qu'admirent ses amis ci-dessus cités. Au contraire, l'armure, la cuirasse se sont solidifiées au gré de l'expérience accumulée, des coups éprouvés - et donnés -. Et l'entrée en matière fut périlleuse, lorsqu'au début de la décennie 90, alors que la moralisation de la vie politique balbutiait, il dut « gérer» le cas CDP, du nom de l'agence concessionnaire de la communication du Département et soupçonnée de surfacturations à destination du financement de partis politiques. Vingt ans plus tard, Pierre Jamet est-il aussi puissant et redouté que l'affirme la vulgate? Sans doute. Et en tous les cas, résume une proche, « suffisamment adroit pour le laisser croire ». Il est celui dont la capacité de « défaire » et de « nuire » est égale à celle de « faire » et de « servir ». Deux capacités qu'il sait habilement agglomérer et consubstantialisé. « Ne fantasmons pas, démythifie Gilles Le Chatelier. S'il détenait un tel pouvoir, comment expliquer, qui plus est sur des terres qui sont historiquement favorables à son camp, qu'hier Ville de Lyon, Grand Lyon, et Région, et que demain peut-être le Département lui-même, soient à gauche?». Quant à son avenir, à 60 ans il demeure ligué à celui d'un Michel Mercier aujourd'hui ministre de l'Espace rural et de l'Aménagement du Territoire mais que rien n'assure d'être candidat à sa succession à la tête du Département. D'une part car il ne manque à l'assemblée de ce dernier que deux voix pour basculer à gauche - le prochain renouvellement se déroulera en mars 2011 - d'autre part car il défend une réforme des collectivités et le statut de « conseiller territorial » plutôt impopulaires parmi les élus dont elle réduira drastiquement le nombre. Que restera-t-il alors d'un Pierre Jamet « pas dupe » de l'artificialité d'un pouvoir et de réseaux que l'abandon de la fonction liquéfiera aussitôt? L'image d'un grand commis de l'Etat, prêt à tout pour honorer sa quête personnelle, au service de la cause publique, et en faveur d'un homme.


 

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