Pour assurer sa pérennité, la filière de la soie demande elle aussi « un bouclier énergétique » (Intersoie)

L'INVITE ECO. Dans la région et plus particulièrement à Lyon, la filière de la soie reste un secteur emblématique du secteur du luxe, qui pèse près d'un milliard d'euros. Mais il doit aussi faire face à la concurrence asiatique et à la hausse des coûts de l'énergie, comme le souligne Xavier Lépingle, président de l'interprofessionnelle Intersoie et directeur général d'Holding Textile Hermès. C'est pourquoi il appelle également à la mise en place d'un bouclier énergétique pour assurer la pérennité d'une industrie qui a vu quintupler la part des coûts énergétiques sur son chiffre d'affaires.
Lorsqu'on a un quintuplement des coûts des l'énergie sur son chiffre d'affaires, c'est difficile à absorber. Aucune industrie ne peut le faire en instantané, souligne Xavier Lépingle, président de l'interprofessionnelle Intersoie et directeur général de la Holding Textile Hermès.
"Lorsqu'on a un quintuplement des coûts des l'énergie sur son chiffre d'affaires, c'est difficile à absorber. Aucune industrie ne peut le faire en instantané", souligne Xavier Lépingle, président de l'interprofessionnelle Intersoie et directeur général de la Holding Textile Hermès. (Crédits : DR Capture écran)

Le festival de la Soie, Silk in Lyon, est de retour pour une troisième édition du 17 au 20 novembre au Palais de la Bourse, à Lyon.

Organisé par l'interprofessionnelle Intersoie, cet événement (qui avait regroupé 120 professionnels et près de 7.000 visiteurs l'an dernier) illustre bien le fait que la soie fait encore partie du patrimoine de la capitale des Gaules. Et de l'histoire des canuts... "Il existe un lien émotionnel naturel", note Xavier Lépingle, président de l'interprofessionnelle Intersoie et directeur général de la Holding Textile Hermès, au micro de Lyon Business (BFM Lyon / La Tribune Auvergne Rhône-Alpes).

Au sein de la Métropole de Lyon, la filière de la soie représente en effet encore près de 2.000 emplois, et dans la région, ce sont 3.000 emplois et 40 entreprises qui oeuvrent à produire ce tissu emblématique, pour un chiffre d'affaires estimé à près d'un milliard d'euros.

Soit une brique de plus au sein de la filière textile régionale, qui regroupe elle-même quelques 626 entreprises, 17.000 emplois et génère 3,5 milliards d'euros de chiffre d'affaires. "Il s'agit aussi une réalité économique puisque la soie représente un tissu d'entreprises avec des savoir-faire uniques, portés par l'industrie du luxe, qui elle-même se porte bien", affirme Xavier Lépingle.

L'entreprise Hermès en est un bon exemple, puisqu'elle demeure elle-même "très bien implantée dans le territoire". Début septembre dernier, Riom (Puy-de-Dôme) a notamment accueilli le vingt-deuxième site maroquinier d'Hermès. Une manufacture qui ouvrira en 2024 et accueillera 250 artisans formés aux savoir-faire d'excellence de la maison, tandis que la majorité des 9 sites de production de la soie du groupe sont également basés en Région Auvergne Rhône-Alpes, avec une emblématique usine de production des carrés de soie située à Pierre-Bénite, près de Lyon.

Près de 200 emplois à pouvoir

Si l'industrie du luxe n'a pas vraiment faibli durant la crise, c'est un peu la même chose avec la filière de la soie, qui exporte toujours 70% de sa production, principalement vers l'Asie ou l'Amérique. "La haute facture des produits fait que ce sont des produits mondiaux", souligne le président d'Intersoie.

Sans compter que s'ouvrent aussi aujourd'hui de nouveaux champs d'applications. Pour le médical, on peut par exemple utiliser la bio-compatibilité et bio-dégradabilité de la soie pour la reconstruction d'organes et les stents. Tandis que la cosmétique demeure un secteur à conquérir : "Par exemple au Japon, tous les produits cosmétiques ont des composants issus de la soie."

Faire face à la hausse du prix de l'énergie

Mais la filière de la soie n'échappe pas non plus à la conjoncture actuelle et doit faire face à la hausse des prix de l'énergie. "Cela a un impact majeur", affiche Xavier Lépingle.

Certaines étapes de fabrication, notamment les ennoblisseurs qui traitent les tissus, consomment en effet beaucoup d'énergie. "La part de l'énergie est passée de 10% à 50% au sein du chiffre d'affaires. C'est vraiment un enjeu de pérennité qui se pose aujourd'hui."

La hausse de prix n'aura certes, pas provoqué de ralentissement d'activité, comme dans certains secteurs, "mais il y a eu un effet prix", et des augmentations en conséquence, "mais pas à la hauteur de la dérive du coût énergétique", tranche Xavier Lépingle.

A l'image d'autres secteurs de l'artisanat et du commerce, le président d'Intersoie demande lui aussi un bouclier tarifaire à l'attention de l'Etat. Une demande pour l'heure restée vaine, comme dans le cas de l'hôtellerie-restauration.

Une industrie bien implantée en France, mais...

Enfin, à l'heure du "made in France" et de la relocalisation engendrée par la crise sanitaire, la filière soie peut se targuer de disposer d'une large chaîne de valeur en France... même si elle doit également faire face à la concurrence asiatique sur le terrain de la sériciculture, où la Chine possède encore des atouts prix sur le terrain de la compétitivité, mais aussi, sur le plan de la météo :

"Jusque dans les années 1950, on produisait de la soie en France : ensuite, les paramètres économiques ont fait que cela n'était plus compétitif. Car pour produire de la soie, on élève un ver à soie qui mange des feuilles de mûrier devant être fraîches. On ne peut pas les garder en contre saison : or, nous avons un hiver en France alors qu'en Asie, il est possible de produire des mûriers qui poussent toute l'année. Cela crée un désavantage économique certain".

Un levier sur lequel la profession travaille toutefois, avec des pistes technologiques à l'étude à ce stade.

Retrouvez l'intégralité de l'interview ici.

Un décideur chaque semaine

Pour rappel, le groupe La Tribune et BFM Lyon s'unissent depuis la rentrée dernière pour vous proposer, à travers l'émission Lyon Business (tous les mardis à 17h45), l'interview d'un décideur de l'économie lyonnaise au cœur de l'actualité.

Une occasion de décrypter ensemble les enjeux des dossiers et tendances de l'économie locale, animée par Élodie Poyade pour BFM Lyon et Marie Lyan pour le bureau Auvergne Rhône-Alpes du journal La Tribune.

Une émission à retrouver en direct et en replay sur la chaîne BFM Lyon, disponible sur le canal 30 de la TNT et sur les chaines 479 (box SFR), 315 (Bouygues) et 915 (Free), ainsi que sur le bureau Auvergne Rhône-Alpes de La Tribune.

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