Fermeture du site Ferropem en Savoie : le PSE a finalement été validé

Suite et fin du dossier Ferropem ? Début mai, l'administration a validé PSE. Les 221 salariés du site de Château-Feuillet (Savoie), dernier producteur en Europe de dérivés du silicium, vont donc être licenciés. Un dossier stratégique qui est allé jusqu'à impliquer l’État. Ce dernier a assuré que la maison-mère, Ferroglobe, se laissait cinq mois pour trouver un repreneur. Une issue à laquelle ne croit pas la CGT.
(Crédits : DR/ML)

Après un an de bataille, le dossier Ferropem semble toucher à sa fin, malgré la pugnacité des syndicats et l'intervention de l'État.

En effet, en mars 2021, le groupe Ferroglobe avait annoncé l'arrêt de sa production de dérivés de silicium et de ferroalliages sur ses deux sites de Château-Feuillet (Savoie) et Clavaux (Isère). Le groupe avait finalement renoncé à fermer son usine des Clavaux, car un accord de production avait été trouvé avec l'un de ses clients, le chimiste allemand Wacker.

Mais le PSE sur le site de Château-Feuillet, dernier producteur en Europe de siliciure de calcium, a été maintenu. Un accord majoritaire avait été signé avec les syndicats (CGT, CFDT, FO) et attendait validation de la Drets (Direction départementale de l'emploi, du travail et des solidarités).

C'est maintenant chose faite, l'administration a validé ce PSE le 4 mai dernier, signant officiellement la fin de ce site et le licenciement de 221 salariés, dont une trentaine pourraient être transférés sur le site Isérois. Ferroglobe, dispose au total de cinq sites en France (hors celui de Savoie), qui emploient environ 1.000 personnes.

Les premiers courriers de proposition de mutation, ou de licenciement devraient partir dès ce moi-ci. "Quand le gouvernement valide le fait qu'un groupe ferme une usine et qu'on s'est battus pendant un an, on ne peut plus rien faire", déplore le délégué CGT central du CSE, Mustapha Haddou. Sur le site savoyard, la moyenne d'âge des salariés est de 42 ans.

Le motif économique pourtant déboulonné

Pour justifier sa fermeture, la maison mère, Ferroglobe, avait invoqué un motif économique. Raison qui ne tient plus depuis que le CSE a commandé et reçu un rapport d'expertise le 10 mars dernier. Ce rapport affirmait que le PSE, pour se séparer de 256 salariés sur le site de Château-Feuillet, n'a pas de justification économique, face aux bénéfices engrangés par Ferroglobe (lui-même détenu majoritairement par le conglomérat espagnol Villar Mir).

Ce document pointait qu'au quatrième trimestre 2021, la flambée des cours du silicium a généré un bond de 33% du chiffre d'affaires mondial du groupe, ainsi qu'un excédent brut d'exploitation (Ebitda) dépassant 92 millions de dollars. En mars 2022, Ferroglobe annonçait en effet avoir réalisé sur le dernier trimestre 2021 ses plus hautes recettes trimestrielles depuis 2018.

Ce document mettait aussi en évidence que le PDG Marco Levi a prévu, lors de la présentation des résultats le 2 mars dernier, une nouvelle "accélération" de la croissance à venir en 2022, avec un Ebitda estimé à 74 millions de dollars uniquement sur le mois de janvier, soit l'équivalent de 40% de celui dégagé sur l'ensemble de l'année précédente.

"Le groupe fait valoir que la compétitivité de son secteur industriel est plutôt obtenue par une tendance à charger de grands fours industriels afin d'absorber des coûts fixes, plutôt que de multiplier la production sur différents sites. Il soutient également le fait que sur le marché de la fonderie, les commandes et clients actuels ne seraient pas suffisants pour maintenir le site de Château-Feuillet, avec un volume du marché de la fonderie lui-même en décroissance", avaient ajouté les services de l'Etat, mêlé au dossier.

Amer, Mustapaha Haddou constate : "On va vers une délocalisation. Ils parlent de restructuration en France. [...] Pendant que la production fermait à Château-Feuillet, ils ont rallumé les unités de production à Salma, aux Etats-Unis."

Cinq mois pour trouver un repreneur ?

Alors que le silicium et les ferroalliages sont des composants clés pour les nouvelles technologies (batteries des véhicules électriques, panneaux photovoltaïques...), les sites Ferropem de Savoie et d'Isère figurent parmi les seuls en Europe face à la domination industrielle de l'Asie.

La ministre de l'Industrie aurait aussi obtenu, certaines avancées : que la production "de l'ensemble des familles de produits aujourd'hui fabriquées en France par Ferropem le demeurent", à travers notamment ses 5 sites restants, dont celui des Clavaux (Isère), où une partie de l'ancienne production de Château-Feuillet doit être transférée "d'ici le 1er semestre 2023 au plus tard". Dix millions d'euros vont être sanctuarisés par Ferropem pour ce transfert et 20 millions d'euros vont être investis par le groupe d'ici la fin 2022 dans son outil industriel en France, pour le moderniser.

Des sommes dérisoires aux yeux de la CGT : "Le four de Château-Feuillet a déjà coûté 22 millions d'euros, donc les 20 millions pour la transformation, ce n'est pas assez."

La ministre aurait aussi obtenur, l'engagement ferme, émanant de la direction de Ferropem, de relancer la recherche de repreneurs industriels sur une durée de cinq mois, "y compris auprès de ses concurrents", a insisté le gouvernement. Une condition qui représentait jusqu'ici un point majeur d'achoppement entre les salariés et l'État d'une part, et la direction du groupe de l'autre.

Mustapha Haddou affirme avoir de "gros doutes" quant à ce dernier engagement. "S'il y a des repreneurs, je les appelle à se déclarer au plus vite."

Par voie de communiqué, la CGT 73 ajoute : "L'Etat doit exiger le remboursement de toutes les aides publiques livrées aux actionnaires. En 2021, ces derniers se sont octroyé 60 millions de profits sur le dos des salariés et du contribuable. Les collectivités locales, dont la Région, et l'Etat doivent préempter le site et les machines et démarcher d'urgence des repreneurs pour produire du silicium et des ferro-alliages en Tarentaise."

Sollicité, Ferrogloble n'a pas souhaité s'exprimer.

"Beaucoup d'amertume"

Le délégué CGT déplore aussi le manque de soutien de la Région, dont la relocalisation en AuRA est devenu un cheval de bataille : "Laurent Waquiez est venu chanter la messe au début, avant les régionales, puis il a abandonné. Nous avons beaucoup d'amertume."

Le 30 avril 2021, sur Twitter, le président de Région annonçait en effet : "la Région s'engage à accompagner le projet industriel avec un objectif : ne pas fermer le site et défendre près de 400 emplois [nombre d'emplois menacés au début des annonces. ndlr] qui s'y trouvent."

A ce sujet, Fabrice Pannekoucke, conseiller régional et président de la communauté de communes Cœur de Tarentaise affirme que la Région "a mis en place un suivi" et "se met en tête de trouver un repreneur. AuRA Entreprises est mobilisé". Le conseiller régional avance également qu'un plan de formation sera déployé si aucun repreneur ne reprend le site. "La démarche d'une reprise industrielle reste d'actualité et nous continuons d'y travailler. Et s'il n'y a pas de projet industriel, nous ne laisserons pas ce site rester une friche."

"L'impact est énorme pour la commune et la communauté d'agglomération", poursuit Mustapha Haddou.

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