Réindustrialisation : « Nos startups auront la maturité pour répondre aux exigences du marché » (Bpifrance)

INTERVIEW. Première région industrielle de l’Hexagone, Auvergne Rhône-Alpes a capté près d'un tiers de l’enveloppe France Relance accordée aux projets territoriaux. Charles-Éric Baltoglu, directeur régional Bpifrance à Lyon, estime que les startups de la région ont tous les atouts pour participer activement à la transformation industrielle du pays, à l'heure où se dessinent les contours du plan d'investissement "France 2030". Un programme qui se veut comme le "troisième étage" de la stratégie gouvernementale post-crise, voulu par Emmanuel Macron.
Avant que les grandes lignes du plan France 2030 ne soient connues, on sait déjà que l'étage n°2 de la fusée, à savoir le plan France relance, a connu un vif succès en Auvergne Rhône-Alpes, avec près de 200 lauréats pour près de 121 millions d'euros injectés.
Avant que les grandes lignes du plan France 2030 ne soient connues, on sait déjà que l'étage n°2 de la fusée, à savoir le plan France relance, a connu un vif succès en Auvergne Rhône-Alpes, avec près de 200 lauréats pour près de 121 millions d'euros injectés. (Crédits : DR/Istock)

LA TRIBUNE. Le nouveau plan d'investissement « France 2030 », annoncé en juillet dernier par le président Emmanuel Macron et qui sera appelé à succéder aux mesures d'urgence et au plan de relance à compter d'octobre prochain, ciblera les secteurs industriels d'avenir : les semi-conducteurs, les biotechnologies et la santé, les batteries ou l'hydrogène. Le tissu industriel Auvergne Rhône-Alpes est-il à ce titre bien positionné ?

CHARLES-ERIC BALTOGLU. Le territoire est déjà actif sur ces segments industriels. Il s'appuie sur une excellente complémentarité entre les centres de recherche d'excellence académique (CEA...) et ceux privés (Sanofi, Schneider,...).

Les secteurs ciblés par le gouvernement sont déjà en phase d'accélération dans notre région. Nos startups biotechnologiques ou de l'hydrogène innovent depuis une dizaine d'années, soutenues par cette R&D public/privé et le fléchage de fonds vers la deeptech.

Nous avons au moins trois entreprises à la pointe dans l'hydrogène : McPhy, Hydrogen Refueling Solutions, Symbio. Quant aux biotechs, elles peuvent compter sur un soutien important de la BPI. Les entreprises du territoire captent la part la plus importante de financements que l'on accorde à ce secteur.

Nos entreprises innovantes sont désormais en phase d'industrialisation. C'est notamment le cas du spécialiste des microLEDs, Aledia. Issu du CEA, il construit une ligne de production d'un engagement financier de plusieurs centaines de millions d'euros. Résultat : alors que la demande évolue et accélère dans ces secteurs-là, nos startups auront la maturité pour répondre à temps aux exigences du marché.

Quel est le montant des subsides du plan de relance déjà accordés aux entreprises du territoire ?

Les appels à projets du plan de relance ont connu un grand succès en région AURA à travers un nombre important de dossiers déposés avec, au final, près de 200 lauréats pour près de 121 millions d'euros injectés.

Au total, les entreprises du territoire ont récupéré 80 millions dans le cadre des appels à projet du plan de relance générale (pour 84 lauréats) et 51 millions issus de l'appel à projet industriel territorial (pour 110 lauréats).

Ces résultats ont allés au-delà de nos espérances, l'État et la Région ont dû être très sélectifs, ce qui confirme par ailleurs notre vitalité sur ces secteurs économiques de demain.

Quels sont les autres leviers qui permettront d'assurer la réussite de ces industries émergentes ?

Les industriels d'hier et d'aujourd'hui doivent continuellement monter en compétitivité. En plus de participer à la compacité d'investissement et d'innovation des entreprises, nous agissons sur leur visibilité. L'étendard de la French Fab doit permettre de fédérer les acteurs et de rendre accessible leur singularité à l'échelle internationale.

La question de la formation est également au cœur de nos préoccupations. Des emplois sont à pourvoir, du tourneur-fraiseur aux métiers de l'informatique. La formation ne concerne pas seulement les salariés. N'ayons pas peur de ramener les patrons sur les bancs de l'école ! Chaque année, 1.000 responsables suivent un cursus au sein de notre accélérateur.

Quels sont vos critères d'évaluation pour juger de la réussite de ces nouveaux projets industriels ?

La création d'emplois est trop incertaine et difficile à suivre. Nous nous focalisons sur la croissance des entreprises, et leur capacité à atteindre une taille critique pour conquérir les marchés internationaux. Nous devons faire passer ces startups en PME, puis en ETI.

Comment concilier les deux mondes, l'industrie d'hier et celle de demain ?

Il est hors de question de laisser tomber les industries traditionnelles. Des changements majeurs sont à l'œuvre dans le secteur automobile. Les équipementiers de la vallée de l'Arve les avaient anticipés, mais ils sont plus rapides que ce qu'ils avaient imaginé. Il faut faire accepter aux PME traditionnelles la nécessité de s'ouvrir à de nouvelles compétences et à entreprendre de nouveaux plans stratégiques.

Comment protéger nos entreprises industrielles innovantes face aux intérêts étrangers ?

Les intérêts étrangers s'expriment ces dernières années au moment du financement nécessaire à l'industrialisation. Aujourd'hui, notre écosystème est capable d'assurer ces tours de table, avec des acteurs publics et privés français.

C'est dans cette logique que la BPI a piloté, aux côtés des grands groupes, le fonds Lac d'Argent 1, d'un montant total de 4,2 milliards d'euros. C'est également dans cette perspective de souveraineté qu'Auvergne-Rhône-Alpes a lancé un fonds régional, un outil de financement public-privé afin de préserver les intérêts stratégiques français. L'initiative marque une véritable prise de conscience.

Mais le principal élément est un haut de bilan solide. Les emplois et les ressources à long terme de l'entreprise doivent être robustes. C'est le seul moyen pour conserver l'indépendance et la souveraineté de l'industrie tricolore.

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