Industrie : Pourquoi Renault Trucks réduit uniquement les effectifs de ses "cols blancs"

Renault Trucks, le constructeur de camion, filiale du groupe Volvo, devrait supprimer 463 postes de techniciens et de cadres. Une décision qui vise à préserver "l'outil industriel" en vue de la reprise, même lointaine.
(Crédits : Renault Trucks)

Ce jeudi 18 juin, l'assemblée générale de Volvo a du pain sur la planche. Les actionnaires du géant Suédois, qui ne devraient pas recevoir de dividendes en 2020 malgré la bonne rentabilité du groupe en 2019, devront valider un plan d'économie important pour faire face à la crise : baisse des investissements de développement de l'ordre de 35% et plan de réduction de 4 100 salariés dans le monde - dont près de 1 250 en Suède.

En France, cela concernait 463 salariés de la filiale du groupe Volvo, Renault Trucks, soit 25 personnes sur le site de Bourg-en-Bresse et 335 sur le site de Lyon. En compensation, le site pourrait récupérer 100 postes de travail actuellement sous-traités par Arquus, la filiale défense de Renault Trucks.

"Nous sommes contre les suppressions de poste, c'est un fait. Néanmoins, nous considérons que l'effort avec les actionnaires est partagé. Nous ne sommes pas dans la configuration de 2015, où l'on distribuait d'un côté des dividendes et de l'autre un Plan de sauvegarde de l'emploi", jauge Eric Freyburger (CFE-CGC) du Comité social et économique central (CSEC) de Renault Trucks.

Cette fois-ci, le plan de départ sera volontaire. Il prendrait la forme d'une Rupture Conventionnelle Collective (RCC). Et même si les conditions de départ ne sont pas encore définies, elles devraient également inclure des opportunités pour reconversion professionnelle ou création d'entreprise.

"Les PSE du passé sont encore dans les esprits, on le voit dans les appels que nous traitons. Mais le volontariat change la donne : il permet d'éliminer la crainte de ne pas avoir le choix", poursuit Eric Freyburger.

Dans le groupe, la France est le seul pays à avoir obtenu cette condition du volontariat. Une disposition qui ne s'appliquerait pas ailleurs.

"La volonté de la direction de Renault Trucks est bien d'être le plus humain possible. Personne ne sera licencié", assure Anne-Cécile Bénita, directrice de la communication corporate de Renault Trucks et porte-parole de l'entreprise.

"Préserver l'outil industriel"

S'il a pu passer la période du confinement grâce aux mesures de chômage partiel, assortie d'un accord de solidarité entre les salariés (versement des jours de congés des cadres pour compenser les pertes de salaires des autres statuts), le constructeur note néanmoins "une chute significative de ses revenus" au regard des dernières années de bonnes performances. D'autant que l'activité à venir est encore difficile à évaluer : le constructeur estime que le marché du camion pourrait baisser de 40 à 50% en 2020.

"Notre groupe n'est pas aux abois. Il a préféré garder 2 milliards d'euros pour passer la crise. Il sait anticiper. Ces réductions de coût sont un choix de gestion et répondent à une certaine logique", commente Eric Freyburger.

Néanmoins, alors qu'ils sont généralement en première ligne, cette réduction d'effectif sacralise la production. Elle exclut "les cols bleus pour préserver l'outil industriel" et touche essentiellement les cadres et techniciens en lien avec certains bureaux d'étude, les développements de produits ou encore la réglementation.

"Il n'y aura pas de fermeture d'usine. Nous allons continuer à vendre, même si nous ne retrouverons pas tout de suite les niveaux d'avant-crise. Il s'agit surtout d'anticiper l'avenir, en réorientant nos priorités et en abandonnant certains projets", souligne Anne-Cécile Bénita.

Renault Trucks assure ne pas couper dans les projets stratégiques, comme l'électromobilité ou la mise en œuvre de nouveaux business models.

Recul de l'apprentissage

Selon la CFE-CGC, la production a tout de même été touchée par le départ des consultants et des intérimaires. Le syndicat estime que cela concernerait environ 1 000 personnes sur les 7 500 salariés du constructeur.

Autre inquiétude : la réduction de 20 à 30% du nombre d'alternant - un chiffre non confirmé par la direction. Renault Trucks en accueille en moyenne 180 par an.

"C'est dramatique pour une classe d'âge et pour l'avenir de notre société de façon plus globale", souligne Eric Freyburger.

"Nous avons un rôle social important, nous en sommes conscients. Nous n'annulons pas tous nos programmes. Nous n'avons pas la volonté d'obstruer la construction de l'avenir", conclut Anne-Cécile Bénita.

S'il est acté, les conditions de cette RCC ne sera négociée qu'à partir de début septembre pour une mise en oeuvre progressive, "sans échéance couperet".

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