Comment Lafont a échappé à sa vente par sa holding

L'entreprise Lafont (Villefranche-sur-Saône) spécialisée dans la conception de vêtements professionnelle aurait dû être vendu par son propriétaire suédois, le fond d'investissement Kwintet. Sans offres à la hauteur de ses espérances, et face au rétablissement de l'entreprise porté par l'innovation, la holding a fait volte-face.

C'est l'histoire d'un fonds d'investissement suédois, Kwintet, leader européen dans la fabrication des vêtements de travail. Et d'une entreprise basée à Villefranche-sur-Saône (Rhône), Adolphe Lafont,  une marque de vêtements professionnels vieille de 170 ans. En 2013, Kwintet décide de se séparer de plusieurs entités, dont les Français Bragard (Épinal, Vosges), marque emblématique pour les vêtements de la restauration et de Lafont, qui emploie 90 salariés.  En août 2014, le Board  du groupe scandinave revenait sur sa décision en interrompant  officiellement le processus de cession.

Gestion intrusive de la holding

Avant ce retournement, Kwintet estimait que ces deux entreprises n'étaient pas rentables. Lafont affichait une perte nette de 3 millions d'euros pour l'exercice 2012-2013, enfonçant davantage le groupe,  dont la dette était déjà importante (environ 600 millions d'euros).

La conjoncture difficile, pour laquelle « Bragard et Lafont n'étaient pas préparés »,  explique Frédéric Vieil, PDG de Lafont - Bragard, et désormais Vice-président de Kwintet, est une cause des difficultés des entreprises. Mais la gestion directe et intrusive de la holding sur les entités françaises explique davantage les mauvais résultats. « L'ADN de chaque marque passait au second plan », analyse Frédéric Vieil.

Réduction des coûts

Déterminé à vendre il y a un an, le changement de décision du suédois résulte de deux facteurs. Il  n'a pas réussi à trouver preneur au prix qu'il estimait juste. « Entre 5 et 10 offres ont été faites. Toutes étaient largement en dessous de la valeur de ces deux entreprises. Il n'était pas question de brader ces marques reconnues », estime Frédéric Vieil.

Mais surtout, dans un contexte difficile où « le processus de vente complique la situation commerciale face aux concurrents »,  le Président directeur général s'active pour remettre à flot les entreprises.  « 2014 est l'année du redressement », veut-il croire.  L'un des axes pour relever les finances est la chasse aux coûts.  «  Nous avons optimisé sur toute la ligne, cherchant quotidiennement les achats les moins chers, sans mettre en péril notre qualité [...]La mutualisation de certains services, notamment juridique a permis de faire des économies. »

Innover pour survivre

L'innovation est placée au cœur de la stratégie de survie de la société Lafont,  aussi bien dans le « process » que dans  les produits.  La Recherche et Développement (R&D) représente désormais 9 % du CA. « C'est une prise de risque », concède Patrice Chazal, Directeur général adjoint de Lafont.

« Les clients sont au cœur de l'innovation. Nous organisons des sessions d'observations, pour voir comment ils travaillent, afin d'identifier leurs besoins », souligne Alexandra  Avram, directrice marketing. Lafont a notamment lancé cette année « Ergo Touch », un vêtement intelligent à destination des travailleurs touchés par la pénibilité physique de leur activité. Ce tissu innovant a été conçu en collaboration avec TDV, un tisseur mayennais et un cabinet d'ergonomie  spécialisé dans les activités sportives.

Si la conception est 100 % française, la fabrication des vêtements est réalisée dans les usines du groupe, en Asie et au Maghreb.

Ambition internationale

Fort de ces nouveaux produits et de la réduction des coûts, Lafont retrouve de la compétitivité. Et ambitionne de reconquérir les marchés internationaux, elle qui réalisait presque 20 % de son CA à l'étranger, il y a une dizaine d'années. Contrairement à Bragard qui a conservé ses débouchés à l'extérieur de la France - et donc ses réseaux commerciaux - Lafont mise sur le e-commerce. Le webshop sera opérationnel dans l'année dans plusieurs pays européens.

Davantage libérées sur un plan décisionnel et stratégique, rassuré par la restructuration de la dette de la holding, les deux entreprises sont confiantes. « Dans le pire des cas, nous serons légèrement positifs », sourit Frédéric Vieil. La signature d'un contrat de distribution avec le grossiste allemand Metro, qui possède 750 magasins et attire 23 millions de consommateurs, est une nouvelle opportunité de développement.

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