Startups : les investisseurs boudent la région Auvergne-Rhône-Alpes

Baisse du montant cumulé des levées de fonds, recul du nombre d'opérations et effondrement du ticket moyen du tour de table : l’activité des investisseurs en région Auvergne-Rhône-Alpes a été largement réduite en 2017. Un résultat qui met en lumière la difficulté pour les startups régionales d'attirer des moyens financiers importants, ceux-ci étant toujours principalement concentrés à Paris.
(Crédits : Laurent Cérino/ADE)

Le capital investissement marque le pas en Auvergne-Rhône-Alpes. Selon le baromètre 2017 des levées de fonds, réalisé par In Extenso Innovation Croissance, la région se classe en 4e position, derrière l'Ile-de-France, l'Occitanie et Pays-de-la-Loire. Les 46 opérations de financement réalisées par les entreprises auvergne-rhônalpines ont représenté un montant cumulé de 142 millions d'euros, contre 185 millions d'euros l'an dernier, soit un recul de 23 % (-43 millions d'euros).

Plus précisément, l'analyse de trois indicateurs clés permet de comprendre la dynamique régionale : au-delà du montant cumulé des levées de fonds, le nombre d'opérations réalisées recul légèrement, passant de 47 en 2016 à 46 en 2017. Mécaniquement, le ticket moyen, et c'est le troisième point, s'effondre de 26 % : de 4,21 millions d'euros à 3,09 millions d'euros. Au niveau national, la tendance est la suivante : le montant cumulé des levées de fonds - 2,6 milliards d'euros - progresse (+ 136 M€) alors que le nombre d'entreprises financées est en baisse : 506 opérations contre 566 l'an dernier. "2017 est définitivement une très belle année", souligne Patricia Braun, associée et présidente d'In Extenso Innovation Croissance.

Les startups de la région absentes du top 20

Autre élément négatif pour le territoire, aucune des startups de la région Auvergne-Rhône-Alpes ne figure dans le top 20 des plus grosses opérations hexagonales. Les 20 entreprises les plus performantes ont levé au total 988,5 millions d'euros. Le plus important tour de table revient à la jeune pousse Eren RE (biotech spécialisée dans l'économie des ressources naturelles) pour un tour de table de 100 millions d'euros. Dans la région, la levée de fonds remarquée est à mettre au crédit du Grenoblois Kalray (fabricant de microprocessus) avec 23,6 millions d'euros. Suivent Probikeshop (13,8 M€, ecommerce), Diabeloop (13,5 M€, biotech), I-Ten (10M€, clean tech) et Apix Analytics (8M€, cleantech). Trois de ces entreprises viennent de l'écosystème grenoblois.

Ces cinq "champions" de la région concentrent presque la moitié de l'argent collecté sur le territoire Auvergne-Rhône-Alpes (67,8 millions d'euros sur les 142 millions d'euros). En dehors de ce top cinq, le ticket moyen pour les 41 autres entreprises s'établit autour de 1,7 million d'euros.

A noter que la faible performance des jeunes pousses régionales dans ce top 20 national des levées de fonds n'est pas un cas isolé. 80 % des opérations records de l'année concernent des startups d'Île-de-France, soulignant l'immense concentration des financements par les entreprises installées dans la capitale française.

Équilibre du tissu économique

Parmi les bonnes nouvelles, la répartition thématique des opérations met en lumière les dynamiques sectorielles et les atouts du territoire. En ressort une typologie équilibrée et diversifiée de l'écosystème régional de l'innovation :10 startups sont issues de l'Internet & Services (e-Commerce, Fintech, Marketing Digital, IoT,etc.), 7 évoluent dans le domaine des sciences de la santé (biotech, medtech), 14 sur le secteur logiciel & composants (Saas, composants) et 11 sur le domaine Sciences de l'ingénieur (cleantech, industrie).

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En terme de montant des levées de fonds, le secteur des logiciels et composants a été particulièrement actif, avec une progression de 165 %, passant de 11,49 millions d'euros à 30,41 millions collectés. Il représente 30 % du nombre des levées de fonds de la région Auvergne-Rhône-Alpes. Cette tendance suit l'évolution nationale. Pour sa part, le segment Science de l'ingénieur performe (+44 %), alors que celui des sciences de la vie marque le pas. Ce dernier - leader sur le territoire l'an dernier avec 68,45 millions d'euros levés - tombe à 21 millions d'euros (-69 %). Conséquence, sans doute, du fort dynamisme des années précédentes, marquées alors par des levées de fonds importantes dans le secteur : Erytech Pharma ou encore Enyo Pharma, qui avait récolté, en 2016, 22 millions d'euros.

Les fonds d'investissement sont à Paris

Comment expliquer cette baisse d'attractivité de la région Auvergne-Rhône-Alpes ? Si le degré de maturité et la conjoncture peuvent en partie expliquer celle-ci, un autre élément est à prendre en compte : le manque de financeurs sur la place régionale. En effet, sur les 20 fonds les plus actifs recensés dans l'étude, seul CM CIC capital innovation est installé sur le territoire. Ce fonds lyonnais se classe en 7e position, avec une dizaine d'opérations réalisées sur l'exercice.

Si l'implantation ne conditionne pas le fléchage géographique des fonds, il faut tout de même noter que 16 structures de financement sont installées à Paris, trois en région (PACA investissement et Go capital, Ouest de la France, CMCIC), alors que BpiFrance, le plus gros investisseur (93 opérations en 2017) est multi-régional.

Plus globalement, Patricia Braun, Patricia Braun, associée et présidente d'In Extenso Innovation Croissance, met en lumière la caractéristique concurrentielle qui règne entre les différents écosystèmes régionaux :  chacun doit "s'imprégner des tendances, anticiper les levées, travailler sur l'ingénierie financière car en fonction de l'environnement concurrentiel, le timing est essentiel".

Lire aussi : Startups : pourquoi les fonds d'investissement regardent à Lyon

Alors que la région Auvergne-Rhône-Alpes se rêve en future pourvoyeuse de licornes - ces jeunes pousses valorisées 1 milliard d'euros - les résultats révèlent un coup d'arrêt, du moins temporaire, à cette ambition. Patrick Bertrand, président de Lyon French Tech, rappelait dans nos colonnes : "Quand il y aura un flot de deux, trois levées de fonds de plusieurs dizaines de millions d'euros par semaine, alors on pourra dire que l'écosystème est assez mûr". Ce baromètre 2017 démontre que le chemin pour y parvenir est encore long.

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La méthodologie. Cette 5e édition du Baromètre In Extenso Innovation Croissance porte sur les levées de fonds réalisées par des entreprises françaises auprès de ventures capital (capital-risque) de la période 2017, à partir des bases de données de Capital Finance et Factiva.

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Commentaires 3
à écrit le 29/01/2018 à 17:13
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Ce que WAUQUIEZ réussit parfaitement, c'est la grosse augmentation de retard des trains en Rhône-Alpes. Ah oui, j'oubliais aussi qu'il a réduit la taille des entrés dans les établissements scolaires, comme cela, les queues devant ces mêmes établissem...

à écrit le 25/01/2018 à 9:14
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"alors que BpiFrance, le plus gros investisseur (93 opérations en 2017) est multi-régional" Ça fait plaisir de constater que des dizaine de milliers de milliards s'entassent dans les paradis fiscaux tandis que c'est le secteur public, et donc l'é...

le 26/01/2018 à 11:55
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Hello Citoyen Blasé, N'hésitez pas à nous partager les éléments qui fondent votre analyse et les documents (preuves) montrant que l'argent de BPI, investie dans les entreprises innovantes, au final par dans les paradis fiscaux. Regardez de pl...

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