Hydrogène : pourquoi les pépites HRS et McPhy deviennent une pièce maîtresse de la stratégie des taxis Hype

Le gestionnaire de la première flotte de taxis hydrogène lancée à Paris en 2015, Hype, veut se poser comme un pilier du maillage de la filière. Car pour atteindre sa cible de 40.000 véhicules en usage taxi à fin 2025 à travers 15 métropoles, il aura besoin de faire monter son écosystème de bornes de recharge en puissance (jusqu'au 100 installations projetées à l'échelle de l'Europe). C’est donc tout le sujet du partenariat stratégique qu’il vient de passer avec deux pépites d’Auvergne Rhône-Alpes : l’isérois HRS et le drômois McPhy. Une première tranche de 12 stations et de deux électrolyseurs bas carbone est prévue, mais il ne s’agirait que d’un début.
« Nous étudions déjà la manière dont nous pourrions aller un cran plus loin, en passant à une logique de co-exclusivité avec ces deux acteurs, afin de sécuriser notre roadmap d'ici 2025 et la perspective des 100 stations en Europe », confirme à La Tribune le président et fondateur des taxis Hype.
« Nous étudions déjà la manière dont nous pourrions aller un cran plus loin, en passant à une logique de co-exclusivité avec ces deux acteurs, afin de sécuriser notre roadmap d'ici 2025 et la perspective des 100 stations en Europe », confirme à La Tribune le président et fondateur des taxis Hype. (Crédits : Hype)

Mathieu Gardies, président et fondateur des taxis Hype, a le sens du rythme : il avait lancé sa première offre de taxis à hydrogène en 2015 à l'occasion de la COP21, et se prépare désormais à incarner une nouvelle phase de montée en puissance de la filière hydrogène dès 2024 à l'occasion des Jeux Olympiques de Paris, avec l'ambition de proposer une flotte de 10.000 véhicules à usage taxi roulant à hydrogène dans les rues de la capitale.

Mais pour cela, il sait que la montée en puissance devra se travailler très rapidement : pour l'heure, ce ne sont en effet que 200 taxis hydrogène qui sillonnent les rues de Paris (700 d'ici la fin d'année).

Celles-ci sont d'ores et déjà alimentées par quatre stations, issues du projet HysetCo, lancé en partenariat avec Air Liquide, Toyota, Idex, la Société du Taxi Électrique Parisien (STEP) et Toyota, en vue d'accompagner le développement de la mobilité hydrogène. Fin décembre, ce consortium avait d'ailleurs été retenu par l'Ademe, dans le cadre d'un appel à projet, afin de fournir six nouvelles stations dans la région Ile-de-France.

Mais avec le partenariat que la société Hype vient d'établir avec deux chefs de file de la mobilité hydrogène, que sont l'isérois HRS et le drômois McPhy, ce chiffre pourrait bientôt grimper encore avec l'arrivée de 12 nouvelle stations additionnelles, dont les trois premières, associées à un électrolyseur alcalin, sont prévues pour sortir de terre dès la mi-2023.

Deux chefs de file déjà bien identifiés

Car après avoir dévoilé la constitution de ces deux partenariats fin 2021, la société Hype veut désormais passer à la vitesse supérieure :

« Notre stratégie n'est pas de faire des appels d'offres globaux avec des acteurs internationaux, mais de trouver des partenaires proches et préférentiels, avec lesquels nous allons pouvoir cheminer et construire une relation privilégiée, en nous permettant d'aller plus vite, tout en les aidant à travailler efficacement sur leurs produits », confie à La Tribune Mathieu Gardies.

Pour cela, il a choisi deux acteurs qui se posaient déjà comme des chefs de file : le fabricant d'électrolyseurs et de stations de stockage McPhy, une spin-off du CNRS créée en 2008 et qui avait complété, à l'automne 2020, une levée de fonds « express » de 180 millions d'euros pour construire sa gigafactory d'électrolyseurs (depuis annoncée dans la région de Belfort à compter de 2024).

Et de l'autre, le tuyauteur grenoblois HRS, entré en Bourse début 2021 en dépassant son objectif de 70 millions d'euros, et qui avait développé sa propre technologie de stations hydrogène après des collaborations avec Air Liquide. Après avoir enregistré un premier exercice en croissance de +309% en juin dernier, avec 10,5 millions d'euros de chiffre d'affaires, l'isérois avait annoncé un carnet de commandes de 43,1 millions d'euros en vue sur les cinq prochaines années. Un chiffre qu'il pourrait préciser encore ce vendredi après-midi, lors de la présentation de ses résultats annuels.

« Ces deux acteurs cochaient toutes les cases car ils sont à la fois des pure-players comme nous de cette industrie, mais également des sociétés françaises déjà très bien positionnées au niveau national et international, et qui ont déjà développé leurs propres produits, ce qui nous assure d'une disponibilité rapide, tout en pouvant continuer de travailler avec nous sur les générations futures », assure Mathieu Gardies.

Des contrats, mais aussi une entrée au capital

Une nouvelle étape qui s'est également matérialisée par l'entrée au capital des deux sociétés HRS et McPhy au sein de Hype, puisqu'elles ont chacune en parallèle investi 6 et 12 millions d'euros dans Hype, sous la forme d'obligations convertibles.

« Comme dans toute filière qui démarre, on voit bien qu'il est compliqué de passer uniquement des contrats commerciaux car rien ne nous garantit sur la durée que les choses vont bien se passer. La meilleure manière de s'en assurer, c'est de monter un cran et d'investir directement au sein d'un projet car cela crée un alignement d'intérêts, qui rejaillit ensuite sur le succès des produits », justifie Mathieu Gardies.

D'ailleurs, pour éluder tout type de concurrence entre ses deux partenaires, Hype s'est assurée de pouvoir leur délivrer des commandes « sensiblement équivalentes ».

Celles-ci se traduisent notamment par un engagement, auprès de la société HRS d'une part, pour l'achat de 6 stations de grande capacité et de deux de plus petites, tandis que McPhy fait également l'objet d'une engagement sur 6 stations de grande capacité et 2 électrolyseurs.

Le tout, dans un délai qui s'annonce assez court puisque les livraisons des deux premières stations de HRS sont attendues dès la mi-2023, de même que celle d'un électrolyseur alcalin de 2 MW et d'une station 800 kg par jour pour McPhy, "sous réserve de l'obtention de subventions sollicitées par Hype" auprès, notamment de l'Ademe, chargée de la mise en musique des enveloppes dédiées aux écosystèmes territoriaux hydrogène.

Plus qu'un simple contrat commercial, c'est plutôt un partenariat industriel à long terme que compte bâtir Hype :

« Nous étudions déjà la manière dont nous pourrions aller un cran plus loin, en passant à une logique de co-exclusivité avec ces deux acteurs, afin de sécuriser notre roadmap d'ici 2025 et la perspective des 100 stations en Europe », confirme le président et fondateur des taxis Hype.

« Etre le lien entre aujourd'hui et 2030 »

D'autant plus que Hype vise à garantir un approvisionnement en « hydrogène vert », et c'est là aussi l'un des piliers de son offre qui demeure à développer, et en partie à préciser.

Car en choisissant McPhy comme partenaire, il pourra déjà compter sur la production de cette énergie verte avec le premier électrolyseur alcalin commandé, et qui sera installé en région Parisienne. Son raccordement, que ce soit via un réseau de « pipes », ou un système de transport routier qui se veut lui aussi « propre », avec des camions alimentés avec de l'hydrogène également, n'est pas encore totalement arrêté à ce stade.

Mais la société de taxis affirme ne pas vouloir se limiter, et regarder notamment « les différentes solutions, parfois moins liées au cout de l'électricité » qui s'offrent à elle pour produire cet hydrogène décarboné, comme la thermolyse ou encore l'utilisation de la biomasse... « Cela pourrait également contribuer à faire émerger d'autres solutions et à diversifier le mix ».

Participer au pilotage du passage à l'échelle d'une filière

Une manière de participer également au pilotage, en coulisses, de la structuration de la filière hydrogène, qui a bénéficié d'importants financements et de toutes les attentions au cours des derniers mois, avec, entre autres, la déclinaison d'une stratégie nationale dédiée annoncée par Emmanuel Macron.

« Nous voulons être le lien entre aujourd'hui et les objectifs fixés à 2030, et à la fois entre les stations et l'usage, afin de construire deux premiers usages et stations et d'en faire venir d'autres progressivement, en vue de structurer la filière. Car aujourd'hui les fabricants ont du mal à vendre car il n'existe pas encore de clients, il faut donc travailler sur l'ensemble de la chaîne pour offrir des débouchés à la production des usines qui sortent de terre », explique Mathieu Gardies.

C'est pourquoi Hype vise déjà à ce que les stations construites au sein de son réseau puissent être accessibles et déjà pensées pour répondre aux besoins des mobilités hydrogène au sens large, qui se déploieront au cours des prochaines années. Et ce sur les différents segments, afin de préparer le réseau nécessaire à la fois pour les bus, les camions, etc. Selon lui, des acteurs sont actuellement au stade de la réflexion afin de verdir une partie de leur flotte en passant par l'hydrogène, comme le logisticien EcoloTrans, et pourraient ainsi bénéficier de cet accès à un réseau de recharge.

Côté financement, Hype aura déjà levé près de 120 millions d'euros, depuis sa création, dont les 2/3 auprès d'investisseurs financiers, et le reste auprès d'industriels. Et prévoit déjà de nouveaux rounds, ainsi qu'une attention toute particulière portée aux enveloppe annoncées par l'Etat français :

« Nous attendons désormais la déclinaison de cette stratégie, avec notamment les annonces de l'Ademe sur le nouveau volet des écosystèmes territoriaux de la filière, qui ont pris un peu de retard ». Selon ses estimations, ces aides pourraient lui permettre d'abonder jusqu'à 30 à 35% du Capex investi, comme dans le cas des dispositifs du même type.

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