Energie verte : victime de la hausse des prix de l'électricité, le distributeur Planète Oui en redressement

Oui Energy, distributeur lyonnais et lillois d'électricité (marque Planète Oui) et de gaz, est placé en redressement judiciaire jusqu'au 1er mars. Il n'a pas pu absorber la hausse spectaculaire des tarifs appliquée par ses fournisseurs, alors que l'Etat vient justement de faire le choix de relever le volume d'électricité nucléaire qu'EDF devra revendre à prix coûtant pour alléger la facture des fournisseurs alternatifs et consommateurs.
Pour le distributeur d'énergie verte Planète Oui, l'augmentation du volume d'électricité nucléaire qu'EDF devra céder à prix coutant aux fournisseurs alternatifs pour les soutenir demandée par l'Etat est une bonne mesure,
car beaucoup de fournisseurs alternatifs sont en difficulté (...) Mais pour nous, elle arrive trop tard, soupire le Ceo.
Pour le distributeur d'énergie verte Planète Oui, l'augmentation du volume d'électricité nucléaire qu'EDF devra céder à prix coutant aux fournisseurs alternatifs pour les soutenir demandée par l'Etat est "une bonne mesure", car "beaucoup de fournisseurs alternatifs sont en difficulté (...) Mais pour nous, elle arrive trop tard", soupire le Ceo. (Crédits : DR)

Il n'utilisait pas d'électricité nucléaire, puisque positionné sur de l'énergie 100% verte, mais Albert Codinach, fondateur et Ceo du fournisseur lyonnais d'électricité Planète Oui, valide la mesure récente de l'Etat pour le relèvement de l'ARENH, c'est-à-dire l'augmentation du volume d'électricité nucléaire qu'EDF devra céder à prix coutant aux fournisseurs alternatifs pour les soutenir, dans un contexte d'explosion des prix de marché de l'électricité.

Une demande étatique qui a réuni, depuis quelques jours, direction, syndicats et actionnaires minoritaires d'EDF, vent debout contre ce qu'ils considèrent comme une spoliation de l'entreprise.

"Beaucoup de fournisseurs alternatifs sont en difficulté. Certains ont déjà stoppé leur activité. C'est une bonne mesure, mais pour nous il est de toute façon trop tard", soupire le CEO de Planète Oui. Au Royaume-Uni, les fournisseurs alternatifs tombent les uns après les autres. En France, Leclerc avait déjà stoppé son offre énergie il y a quelques mois, et d'autres fournisseurs, comme Hydroption, ont mis la clé sous la porte.

Redressement judiciaire

Créée en 2007 à Lille et installée depuis quelques années à Lyon, Oui Energy (qui commercialise ses offres sous la marque Planète Oui) a été placée en redressement judiciaire il y a 15 jours. L'entreprise était pourtant en plein développement, avec le cap des 125.000 clients particuliers dépassé en 2021 et celui des 250.000 annoncé pour fin 2022. L'entreprise avait réalisé 60 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2020, 100 millions en 2021 et visait le seuil des 200 millions d'ici 4 ans, avec 500.000 clients.

Classée premier fournisseur du guide Greenpeace 2019 de l'électricité verte, Planète Oui se voit donc brisée nette dans son envol par l'envol du cours de l'électricité.

"Nos besoins en trésorerie ont augmenté de façon spectaculaire en raison de la hausse du prix de l'énergie. Nos fournisseurs ont augmenté de façon importante leurs tarifs et nous ne pouvons pas, contractuellement, répercuter cette hausse sur nos clients", commente le CEO.

L'échec d'une levée de fonds, dont la clôture était attendue pour cet automne, n'a évidemment pas arrangé la situation.

"Les discussions étaient très avancées mais les investisseurs ont préféré se retirer au vu du contexte. Le secteur de l'énergie est devenu inquiétant pour eux. Plusieurs fournisseurs ont fait faillite au Royaume-Uni, en France, la situation n'est pas brillante non plus. Ils ont eu peur, je peux le comprendre".

Après une tentative avortée de plan de sauvegarde accélérée, à laquelle les créanciers n'ont pas souhaité apporter leur soutien, l'entreprise n'a eu d'autre choix que le redressement judiciaire, avec une période d'observation de trois mois. L'exercice 2021 n'est pas encore consolidé mais des pertes importantes sont attendues. Plusieurs portes de sorties sont étudiées : "la plus facile sera celle d'un repreneur qui accepte de reprendre l'activité et une partie des salariés (100 salariés à Lille NDLR). Mais nous étudions d'autres pistes, tout cela est encore très frais".

En attendant, les clients actuels sont desservis, sans interruption. En revanche, aucune nouvelle souscription de contrat n'est acceptée.

Changement de modèle ?

Seule la structure Oui Energy, qui porte la distribution d'électricité est concernée par cette procédure. L'activité Planète Oui (70 collaborateurs à Lyon) poursuit, elle, sa route sans encombre. Elle porte les ambitions concernant le développement de sa propre énergie (100% verte évidemment), via une montée en puissance des actifs de l'entreprise.

"Nous avions déjà pour ambition d'ajouter le statut de producteur à celui de fournisseur, nous allons poursuivre sur cette voie".

Elle a pour objectif d'atteindre une production propre, dès cette année, de 60 mega-watt heure. Un plan de marche ralenti puisqu'elle tablait il y a encore quelques mois sur la production de 100 megawatt heure en 2022, mais les obstacles ne seraient pas liés à la situation économique.

"Les autorisations, les permis ont pris du retard. Les projets avancent mais le sujet de l'acceptabilité est bien réel".

Le rôle des territoires dans la transition énergétique en jeu

Planète Oui s'est associée au fond régional OSER ENR créé en 2014 par la Région Auvergne-Rhône-Alpes, la Caisse des Dépôts et Consignations et une dizaine d'autres acteurs privés (CNR, Crédit Agricole, Enercoop, BP Aura, la NEF, GEG et Energie partagée) pour lancer, en 2021, un appel à Initiatives Locales. Objectif : accélérer le développement de projets solaires photovoltaïques dans la région, dans une logique de circuit court.

"La question de la décentralisation et du rôle des territoires dans la transition énergétique est plus que jamais primordiale. Cette décentralisation doit permettre l'émergence de projets plus proches des territoires, à taille humaine, respectant l'environnement et que les citoyens pourront s'approprier".

En Auvergne-Rhône-Alpes, Planète Oui travaille déjà avec la communauté d'agglomération de Roanne. Elle gère la centrale mise en service en janvier 2021 par la collectivité locale avec OSER ENR (5 mega MWc).

Autre engagement local : pour la Ville de Mornant, Planète Oui pilote un consortium d'entreprises impliquées dans un projet combinant autoconsommation, solidarité énergétique et économies d'énergies.

Et avec la Métropole de Lyon, la PME intervient dans le cadre de la construction de toitures et ombrières photovoltaïques sur les principales entreprises de la Vallée de la Chimie (Projet Appel des 30) pour une puissance de 5,8 MWc.

Albert Codinach explique mener actuellement une réflexion stratégique sur le modèle de l'entreprise :

"Est-ce que le modèle grand public est bien adapté à notre dimension technologique forte ? Doit-on plutôt se concentrer sur le B2B? Nous devons réfléchir, apprendre des erreurs commises et nous relever. Je ne vois pas encore la lumière au bout du tunnel, mais je sais qu'elle est là..", confie le dirigeant, touché par les difficultés de son entreprise.

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Commentaire 1
à écrit le 01/02/2022 à 16:14
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Voilà un concurrent d'EDF qui a eu l'honnêteté de ne pas spolier l'entreprise publique en la privant de ses MWh nucléaire à bas prix. Bon, mais si elle se lance dans la production d'électricité solaire PV, elle va toucher des subventions, c'est à di...

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