
"Une vision à long terme de Jean-Charles Naouri sur l'évolution du marché du non-alimentaire".
C'est ainsi que ce porte-parole du groupe Casino justifie le rachat de Cdiscount opéré en 2000. Il s'agissait d'anticiper la migration possible du non-alimentaire vers l'e-commerce.
L'entreprise bordelaise, créée deux ans plus tôt par les frères Charle, était alors une modeste structure de vente de CD puis de DVD d'occasion. Avec un chiffre d'affaires de 2,122 milliards d'euros en 2017, Cdiscount est aujourd'hui devenu le 2e acteur du e-commerce en France. Et une locomotive pour Casino.
Retours sur investissements
Après 18 ans d'investissements massifs dans sa pépite digitale, le groupe stéphanois devrait récupérer ses billes, et bien plus encore, dans les prochaines années. D'abord, parce que Cdiscount devrait afficher cette année, pour la première fois depuis son rachat, un résultat net positif.
Ensuite, parce que son introduction dans les hypers Casino semble avoir des retombées très positives. Un tiers des hypers sont déjà dotés de corners Cdiscount. Ces espaces showroom proposent aux clients des produits techniques et des meubles à prix Cdiscount.
Selon Casino, "ils ont généré un trafic additionnel dans les magasins, entraînant une surperformance de 1 point de leur chiffre d'affaires". Dès l'année prochaine, tous les hypers, non concernés par le plan de cession d'actifs, seront équipés. Y compris ceux de la famille Quattrucci. Elle a décidé récemment de rallier 12 de ses magasins sous enseigne O'Marché Frais (vente de produits frais) à la sphère Casino.
Depuis juillet 2017, au-delà de ces corners, Casino a même confié la gestion du non alimentaire de tous ses hypers à Cdiscount, considéré comme expert en la matière.
Enfin, et peut-être surtout, Casino mise sur la mine d'or détenue par Cdiscount : la data. Le groupe estime que sa filiale dispose désormais d'une base de données suffisamment conséquente pour être commercialisée. Depuis quelques mois, Casino et Cdiscount ont ainsi fusionné leurs données pour les valoriser.
Désormais, par la magie du digital, un client achetant, par exemple, un pot de confiture dans un magasin Casino, pourra voir s'afficher des publicités pour un produit analogue ou complémentaire dans son navigateur web. 3W (Business Unit de Cdiscount spécialiste du sujet) et RelevanC, filiale de Casino positionnée sur l'étude des comportements d'achats, se sont d'ailleurs récemment alliées avec une ambition : devenir le leader français de la collecte, la mesure, le ciblage et la monétisation d'audiences et de données transactionnelles.
Grâce à Cdiscount, Casino pense ainsi avoir un train digital d'avance sur ses concurrents principaux : Carrefour, Auchan et autres.
"Cdiscount nous apporte un avantage comparatif important par rapport aux autres distributeurs français", insiste ainsi le porte-parole du groupe Casino.
L'enseigne stéphanoise entend bien, par ailleurs, s'appuyer sur sa filiale pour diversifier son offre vers un assortiment de nouveaux services.
Locomotive
Dans ces conditions, Cdiscount, généralement valorisé à 1 milliard d'euros par les analystes, n'est pas à vendre. Contrairement à la branche restauration, il ne figure donc pas dans le plan de cession d'actifs actuellement en cours et dont l'objectif est d'abaisser le niveau d'endettement du groupe à deux milliards d'euros en 2019.
Une vente prochaine ne permettrait pas à Casino d'en tirer un profit maximal, Cdiscount n'étant pas encore assez mature. En revanche, il semblerait que la question ait été abordée lors d'une récente réunion d'investisseurs : la porte n'est pas fermée à une éventuelle prise de participation d'autres e-commerçants, Alibaba par exemple, ou d'autres distributeurs.
De Bordeaux à Saint-Etienne
Si de nombreux clients Cdiscount ignorent probablement que l'e-commerçant est une filiale de Casino, le lien va se matérialiser de façon très tangible d'ici quelques semaines. Au moins pour les clients de la Loire.
Un troisième entrepôt va être construit près de Saint-Etienne, à quelques kilomètres du siège de Casino. Ce nouveau bâtiment de 60 000 m², mis en oeuvre par le promoteur immobilier Goodman, sera exploité par Easydis, filiale logistique de Casino.
Il sera dédié aux livraisons d'équipements pour la maison et de produits de sport pour le Sud de la France. 200 emplois sont à la clé. Livraison au deuxième trimestre 2019.
- Lire ici le 1er volet de notre enquête : "Cdiscount peut-il devenir un géant mondial ?"
- Lire ici le 2e volet de notre enquête : "Cdiscount va filialiser ses entrepôts"
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