Jean-Luc Logel : "L'Europe de la Défense doit venir des PME"

Président du cluster Eden, qui rassemble les entreprises françaises de la défense, de la sécurité et de la sûreté, Jean-Luc Logel estime que si une Europe de la Défense semble compliquée à mettre en place au niveau gouvernemental, les PME du secteur peuvent, elles, renforcer leurs liens – encore embryonnaires – et bâtir une véritable Europe industrielle de la Défense.
(Crédits : DR)

Le président français et la chancelière allemande ont récemment évoqué la création d'une future armée européenne. Pensez-vous que ce vieux serpent de mer de l'Europe de la Défense pourrait enfin voir le jour ?

Pour être franc, je pense que l'on en est encore loin. Une Europe de la Défense réclame une unité des décisions politiques des différents Etats, notamment pour décider d'un engagement militaire. Et cette unité va être, à mon sens, très difficile à trouver.

Mais, si elle ne se fait pas au niveau des gouvernements, ni des grands groupes industriels qui ont, eux aussi, des enjeux politiques et des intérêts nationaux, il est possible d'imaginer une Europe industrielle de la Défense impulsée par les PME. Cela peut même se faire très rapidement.

Qu'est-ce que cela veut dire concrètement ?

Je pense qu'il faut favoriser les échanges entre les PME européennes du secteur pour monter des projets, à l'échelle européenne, qui associent des entreprises de différentes nationalités aux savoir-faire complémentaires. Cela se fait un peu, mais c'est encore embryonnaire. C'est pour cela que le cluster Eden s'est associé à un cluster allemand, et que nous sommes en pourparlers avec un cluster néerlandais. L'idée est de faire matcher des entreprises de pays différents, notamment pour obtenir des financements de l'Union européenne.

Il faut savoir que 2,5 milliards d'euros de fonds prévus par l'UE pour accompagner les PME du secteur ne sont pas utilisés. Soit parce que ces financements européens sont méconnus, soit parce que les PME considèrent qu'ils sont trop compliqués à obtenir. Il faut donc faire en sorte que les PME françaises aient accès à ces subventions, surtout dans le contexte actuel de baisse des dépenses publiques.

En France, la DGA (direction générale de l'armement, Ndlr) investit encore 10 milliards d'euros par an dans l'économie française, mais nous nous rendons compte que l'argent public devient plus rare.

Le rapport des 10 ans du cluster Eden évoque à la fois une réduction des dépenses militaires (frégates, de chars, hélicoptères...) et une augmentation des budgets de sûreté, notamment en raison de la menace d'attentats terroristes. Finalement, comment se porte le marché ?

Il est indéniable que les nations européennes baissent le niveau de leurs budgets de défense. Pour alléger le poids de la dépense publique, la défense est une variable d'ajustement facile puisqu'on ne verra jamais un militaire se mettre en grève. Mais, plus que de parler d'une baisse ou d'une hausse, je dirai que le marché change de nature avec la menace terroriste.

Sur nos territoires, on ne se bat pas contre les terroristes avec des chars, mais avec de la technologie : de la reconnaissance faciale, du cryptage, de la cybersécurité, de la réalité augmentée...

Nous sommes entrés dans l'ère 4.0 de l'industrie de la Défense.

Les PME françaises de la défense vous semblent-elles suffisamment armées pour prendre ce virage technologique ?

Nous avons de belles sociétés innovantes, avec de la technologie à forte valeur ajoutée. Pour ces fleurons, ces changements de marché sont une véritable opportunité.

Ces belles entreprises doivent continuer à innover sur ces marchés à forte croissance pour briser le plafond de verre.

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