Une nouvelle ligne de production, voire un nouveau site pour Eurotab Tabletting ? Le sujet est sur la table de l'industriel ligérien (270 salariés, CA 2019 : 60 millions d'euros), propriété depuis l'année dernière du fonds d'investissement LBO France. Spécialiste de la fabrication de tablettes détergentes et désinfectantes, il est aujourd'hui limité dans son développement par ses capacités de production. "Nous sommes obligés de sous-traiter un peu, nous sommes donc à la recherche de capacités nouvelles. Or, nous n'avons plus beaucoup de marges sur notre site de Saint-Just-Saint-Rambert (Loire)", confie Régis Desroches, président d'Eurotab Tabletting.

La proposition est actuellement étudiée par les actionnaires et le dirigeant ne sait pas encore dire où seront installées ces nouvelles capacités de production, mais elles prendront forcément place en France, idéalement dans la Loire. Dans cette démarche, Régis Desroches espère un soutien de l'Etat.

"Pendant le confinement, nous avions été classés dans la catégorie des entreprises vitales à la continuité de la Nation. Aujourd'hui, j'attends un coup de pouce dans le cadre du plan de relance et de soutien à l'industrialisation".

Nouveau marché de la tablette pour le linge

La validation de ce projet dépendra notamment de la confirmation d'un nouveau segment sur lequel Eurotab planche depuis plusieurs années. Inventeur il y a 20 ans de la pastille javel et bien positionnée sur le segment des pastilles pour lave-vaisselle, l'entreprise a investi fortement dans sa R&D en direction du marché du linge. "Aujourd'hui, le linge ne représente que 5% de nos ventes mais nous sommes sur le point de trouver des relais de croissance importants. Nous avons actuellement des projets avec de nombreux clients sur ce sujet : des gros lessiviers comme des start-ups".

Le sujet est d'importance car selon Régis Desroches, le marché du linge est neuf fois plus gros que celui du lave-vaisselle... Pourquoi cet engouement soudain alors que les lessiviers s'étaient détournés de cette solution tabletting il y a déjà plusieurs années? "Les performances sont aujourd'hui bien meilleures. De plus, le contexte actuel est porteur avec le développement du e-commerce et du drive", explique le dirigeant d'Eurotab. "Les tablettes sont beaucoup moins volumineuses et bien moins difficiles à stocker en termes de sécurité et de conservation". S'ajoute à ces arguments la dimension écologique : "moins de volumes, moins d'emballages, moins de plastique, pas de conservateur et moins de camions sur les routes ".

Une demande pour les produits d'entretien de la maison

Ces arguments sont également valables sur les autres segments sur lesquels est installée Eurotab. Malgré cinq millions d'euros d'investissement ces deux dernières années dans des rénovations de ligne, la mise en place de deux nouvelles lignes sur son usine de Saint-Just-Saint-Rambert et d'une nouvelle ligne sur son site turc (dédié au marché local), l'ETI affiche ainsi déjà sa saturation. Les discussions sont en cours mais elle pourrait valider dans les prochaines semaines un nouvel investissement de deux millions d'euros pour une nouvelle ligne destinée à la détergence.

Il faut dire qu'en plus du développement de ce format de tabletting, la demande générale concernant les produits d'hygiène et d'entretien de la maison est à la hausse, boostée évidemment par le contexte sanitaire.

Selon une étude du cabinet Asterès commandée par l'AFISE (Association Française des Industries de la détergence, de l'entretien et des produits d'hygiène) et publiée il y a quelques jours, la demande totale de produits de nettoyage a ainsi bondi de 155% au printemps dernier par rapport à la même période l'an passé.

Un CA multiplié par 2,5 depuis le confinement

Dans le détail, les ventes de javel, savons, désinfectants, désodorisants, lingettes nettoyantes et produits d'hygiène du linge ont progressé de 50 à 200% selon les segments. Celles de gel hydroalcoolique ont été multipliées par dix. Une tendance qui s'est poursuivie, cet été, (+120% pour la demande totale en juillet), sur un marché français qui était estimé à 4,8 milliards d'euros en 2018 avec 5.400 salariés (chiffres Asterès). La seconde vague devrait assurément maintenir encore la demande à un niveau élevé pour les prochains mois.

Eurotab tabletting, a quant à elle vu ses ventes de pastilles de javel multipliées par 2,5 depuis le confinement. Son chiffre d'affaires généré par les pastilles pour le lave-vaisselle a également explosé sur cette période.

"Les Français étaient à la maison pendant le confinement puis avec le télétravail, le lave-vaisselle tourne beaucoup plus qu'avant", explicite Régis Desroches.

Résultat : son chiffre d'affaires global de 2020 s'annonce en hausse de 15%, passant de 60 millions d'euros en 2019 à 65 millions cette année. Régis Desroches regrette néanmoins d'être freiné dans son développement par des difficultés de recrutement. "Nous souhaiterions faire tourner nos lignes 24h/24 mais nous ne réussissons pas à recruter suffisamment de personnel".

Poursuivre sur la voie de l'innovation

Très investie dans la R&D, Eurotab poursuit ses travaux sur de nouveaux marchés. Notamment sur des tablettes pour laver les vitres, détartrer la salle de bain ou encore dégraisser la cuisine. "Nous avançons sur ces sujets. En matière de développement durable, c'est l'avenir. Au lieu de transporter un litre de produit, vous ne transportez plus que quelques grammes de poudre compactée. L'utilisateur final ajoute l'eau sur place".

Déjà lauréat du prix Pierre Potier de la Chimie en 2019, - petit poucet au milieu des gros de la chimie-, avec une tablette pour lave-vaisselle "tout-en-un" comprenant 96% d'ingrédients naturels (en marque blanche pour Monoprix notamment), Eutotab entend bien poursuivre sur la voie de l'innovation. Elle déploie actuellement en Italie une tablette de 20 grammes comprenant de la javel et un détergent permettant de nettoyer en profondeur sols et toilettes.

Eurotab opère sur un marché de la détergence et de l'hygiène où sont positionnés des mastodontes comme Unilever France, Spontex ou encore Heinkel évidemment mais aussi des PME et des ETI. Dans la région : Ceetal CMPC à Saint-Etienne par exemple ou encore Labojal à Thizy-les-Bourgs dans le Rhône.

La première confiait à nos confrères de l'Essor Loire, en mars dernier, avoir vendu plus de 300.000 litres de gel hydroalcoolique en moins d'un mois contre 45.000 habituellement. La seconde a elle aussi été boostée par les mêmes produits mais accélère en parallèle sur la production de savons désinfectants liquide.