La métamorphose

L’externalisation massive des applications et des processus RH impose aux responsables des ressources humaines un recentrage de leurs pratiques. Et leur permet, aux côtés de la direction générale et financière, de piloter en direct la politique de développement de l’entreprise.

Qu'est-ce qu'un DRH aujourd'hui ? Un collaborateur « assis sur une plaque tectonique; pris entre les salariés et la direction », résume Paul-André Faure, dirigeant du cabinet lyonnais de conseil en ressources humaines Innoé. Un cadre qui sans cesse « doit concilier l'impossible… Il doit constamment anticiper, être vigilant » en particulier vis-à-vis des évolutions réglementaires du droit du travail. La mission est ardue. « Il faut à ce poste des femmes et des hommes solides », confirme Marie-Claire Genest-Valentin, directrice régionale d'Altedia, spécialisé en management et en outplacement. « Pour eux, tout va très vite… Ils ont besoin de benchmarks, de conseils de l'extérieur ». Et d'appui logistique sur des fonctions et des applications supports. Ainsi, la grande majorité des entreprises françaises, selon une étude du cabinet Markess International, externalisent la paie et dans une moindre mesure leur système d'information, la gestion des frais, celle des temps et des activités, le recrutement, etc. Processus d'externalisations entièrement confiés à un tiers ou aidé par des logiciels de gestion (systèmes de cloud computing ou SaaS - pour Software as a Service). « Fortement répétitives et chronophages, les tâches associées à la gestion et au traitement de la paie sont le point de départ de l'externalisation d'autres applications et processus RH », résume cette étude. Une pratique généralisée qui permet aux décideurs RH - le plus souvent intégrés aux comités de direction - de se recentrer sur « leur coeur de métier », estime Patricia Traversaz, responsable
Rhône-Alpes de l'association nationale des directeurs des ressources humaines (ANDRH), par
ailleurs DRH de l'hôpital de Fourvière. « La mission d'un DRH s'est fortement complexifiée ». Celui-ci est désormais « au centre des engagements pris en interne ». Mieux reconnu, « il est devenu un levier de développement de l'entreprise à son marché », complète Philippe Galiano, directeur marketing grands groupes de ADP, leader français des services de gestion de ressources humaines (12 000 sociétés clientes en France).

 

Gains de productivité

Externalisation, oui. Dépossession de la stratégie RH, certainement pas. « Je ne vois pas un responsable de ressources humaines qui ferait définir sa politique RH par une société extérieure », confirme Marie-Claire Genest-Valentin. Il apparait en effet évident, pour les services concernés, de se décharger des tâches les plus administratives auprès de prestataires externes afin, justement, « d'axer tous leurs efforts sur des missions plus stratégiques », note Hélène Mouiche, analyste senior chez Markess International. Reste que les sociétés d'outsourcing de services RH s'immiscent de plus en plus dans ce qui forme l'écosystème de leurs clients. « Sur de nombreuses actions, on peut se substituer entièrement aux organisations en place, reconnait Philippe Galiano. On peut gérer la facturation, être tiers-déclarant d'un client, payer directement les salariés pour le compte de ce client…». Ou encore intervenir dans la gestion des talents notamment internes, voire accompagner la mise en place de politiques de gestion du capital humain « entretiens annuels et performance des collaborateurs, gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, formation et développement, mobilité interne, carrières et successions…», énumère l'étude de Markess International. Ce faisant, l'entreprise obtient « d'importants" gains de productivité. Autre domaine d'intervention : le coaching professionnel. « Les entreprises externalisent ainsi un recours qui permet au collaborateur de verbaliser ce qui va ou ne va pas dans son travail », explique Paul-André Faure.

 

Internalisation

Que reste-t-il alors au décideur RH, lequel dispose en interne de moins en moins de ressources ? De fait, à lui la supervision des activités, la mobilisation des acteurs, et, plus
globalement, l'amélioration de la valorisation de l'entreprise et de ses collaborateurs. « Les DRH
doivent certes externaliser tout ce qui n'est pas stratégique mais la décision finale, et ce quel que soit le domaine, leur appartient », rélève Marie-Claire Genest Valentin. A eux par ailleurs de mettre en place les plans de formation et de définir le bon sourcing pour accueillir les meilleurs talents. Un DRH est celui qui sait adapter sa stratégie « en accord avec l'évolution de la loi sur la formation professionnelle », note Philippe Galiano et sait plus globalement « relever les enjeux de conformité et de réglementation ». La fonction évolue enfin beaucoup vers du conseil de proximité en interne ; les services RH créent alors des fonctions au plus près des managers. «On est dans l'internalisation », précise Paul-André Faure. Les DRH recentrent leur stratégie « sur les valeurs de l'entreprise ». Essentiel.

 

 

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