« Tech for good », métaverse : comment les startups auralpines comptent tirer leur épingle du jeu au CES 2023

Après une édition en format réduit l’an dernier en raison de la crise sanitaire, le CES de Las Vegas réouvre les portes de sa 56e édition ce jeudi avec une promesse de taille : réunir à nouveau tout l’écosystème mondial de la Tech, en l’orientant désormais vers des innovations tournées vers le bien commun (« Tech for good ») et un retour de ses grands exposants. En Auvergne Rhône-Alpes, la délégation régionale de 36 startups s’affiche prête à transformer l’essai, en s’appuyant sur des technologies liées à l’efficience énergétique, à la gestion des données et à l’intelligence artificielle qui n’attendent plus que le passage à l’échelle.
(Crédits : DR/ML)

Pour sa 56e édition, le CES (Consumer Électroniciens Show) de Las Vegas est de retour du 5 au 8 janvier, après une édition 2022 en demi-teinte : l'an dernier, la grande messe de l'électronique avait accueilli seulement 44.000 participants, à l'issue d'une rafale d'annulations enregistrées en provenance des grands groupes (Google, IBM, Intel, La Poste, Mercedes, BMW, General Motors ou encore Panasonic) en raison de la dégradation des conditions sanitaires.

Cette année, rien de tel à l'horizon : grands comptes et médias internationaux ont répondu présents, de même que les startups de la Tech mondiale, qui ont repris leurs déplacements. Résultat ? L'organisateur américain du salon a déjà glissé son espoir de voir dépasser à nouveau le cap des 100.000 visiteurs.

« Il ne s'agit encore pas d'un CES dit normal, comme on a pu le connaître à son pic de janvier 2020 avec ses 180.000 visiteurs, qui pouvait également être considéré comme "too much"... Mais on remonte vers une très belle édition, puisque tous les grands noms ont donné leur go. On ne devrait donc pas voir de stands vides cette année », assure Damien Cohen, chargé de communication du pôle de compétitivité de la filière numérique Minalogic, chargé du programme d'accompagnement des startups régionales.

« Il ne faut pas oublier qu'il n'existe pas de réelle alternative à un salon comme le CES, avec d'autres événements qui peuvent toutefois viser certains marchés comme le Gitex à Dubaï, qui commence à se faire un nom, ou encore Vivatech en France. Mais il existe globalement peu de salons généralistes similaires, qui parviennent à attirer à la fois un tel nombre de visiteurs -sans être ouvert réellement au public-, mais aussi de grands noms de la Tech comme Apple, la Nasa ou encore l'armée...», abonde Kate Margetts, responsable des relations internationales chez Minalogic.

Une délégation régionale qui vise des records

Cette année encore, la délégation régionale conduite par Minalogic et la Région Auvergne Rhône-Alpes vise d'ailleurs des records : car si elle a toujours été particulièrement présente à la grande messe électronique de Las Vegas, sa participation avait pu fluctuer au cours des années... mais sans jamais toutefois baisser les bras.

L'an dernier par exemple, le président de Région Laurent Wauquiez en avait même fait son cheval de bataille, en choisissant d'être le seul élu régional à s'envoler pour le CES de Las Vegas, en pleine crise sanitaire, afin de se porter au chevet des startups.

Un an plus tard, le contexte énergétique a renversé la donne et c'est plutôt sa vice-présidente à l'économie, Stéphanie Pernod, qui fera le déplacement : avec l'ambition à nouveau, de chasser en meute et de marquer cet événement international aux couleurs des panneaux bleus d'Auvergne Rhône-Alpes. 36 startups composeront la délégation régionale, « soit la plus importante délégation française », affirme Damien Cohen.

D'autant plus que la France elle-même n'est pas en reste : depuis plusieurs éditions, l'Hexagone met un point d'honneur à faire rayonner la French Tech au rang des premières délégations étrangères (avec près de 200 exposants) de ce grand salon américain, où l'on murmure que les affaires se concluent partout : sur les stands, mais également dans les suites et les soirées d'affaires qui marquent cet événement de quatre jours, du début jusqu'au bout de la nuit.

La visibilité promise sur la scène de Las Vegas semble déjà être bien engagée : sur les 36 startups régionales, 17 ont déjà été retenues pour participer au CES Unveiled, un événement sélectif qui s'est tenu mardi 3 janvier auprès de 2.000 médias internationaux. Neuf d'entre elles (dont l'isérois BeFC et sa pile écologique faite à base de papier et d'enzymes ou Meropy, qui a créé un robot pour rationnaliser les modes de culture des agriculteurs) se déplacent également pour y récupérer un Innovation Awards, qui met en lumière les innovations les plus prometteuses du salon : « un nouveau record sur les 20 innovations awards remis cette année », rappelle Damien Cohen.

Le « Tech for good » comme nouveau fil rouge

Si le CES 2023 restera cette année encore tiré par les applications liées à l'électronique grand public et au marché de l'automobile, qui occupent historiquement une place de choix, la thématique de la « Tech for good, » associée à l'essor du métaverse, devrait prendre aussi du poids cette année.

 « L'organisation a voulu mettre un focus en créant une nouvelle catégorie dédiée, qui regroupe finalement toutes les technologies susceptibles d'améliorer la condition des humains, que ce soit sur le terrain des énergies renouvelables, d'une consommation pus faible, de la santé, ou encore de la santé des personnes au sens large, allant même jusqu'à la cybersécurité », traduit Damien Cohen.

Pour la première fois, on devrait donc voir apparaître beaucoup plus massivement, dans les allées du salon, des solutions dédiées à l'autonomie énergétique, et notamment de nouvelles générations de panneaux solaires, batteries, piles biodégradables, etc.

Les startups régionales comptent bien s'en saisir : car avec une délégation auralpine particulièrement spécialisée sur les champs de l'énergie, de la santé et de l'IOT, ce CES pourrait leur permettre d'attirer l'œil des grands comptes, en quête de solutions à plus faible consommation et impact environnemental.

 « Il est certain que nous avons, au sein de la délégation, des solutions comme celles de BeFC (pile écologique à base de papier) ou de Dracula Technologies (modules photovoltaïques pour l'IoT) qui pourraient faire du bruit cette année, avec de grands comptes qui souhaitent déjà échanger avec eux. Ou encore des technologies liées à la sécurité comme Safee, qui se pose comme un nouveau garde du corps personnel en déclenchant rapidement une alarme et un appel aux services de secours, ainsi que de Matvisio (qui développe un outil de gestion des postures pour prévenir les risques muscolo-squelettiques, ndlr), ou Admir (qui ouvre une nouvelle voie dans le diagnostic du cancer avec une approche d'analyse sans réactif, ndlr) », rapporte Damien Cohen.

« Aujourd'hui, les investisseurs sont désormais à la recherche de solutions qui ne font pas de mal à l'environnement, et qui peuvent leur permettre de réduire l'impact de leurs propres produits. Et cela peut passer par des solutions très technologiques comme celle de Dolphin Integration, qui participe à réduire l'empreinte des puces électroniques en proposant des systèmes très basse consommation », remarque Kate Margetts.

La tradition des avant-premières

Alors que l'écosystème de la Tech met souvent un point d'honneur à conserver ses grandes annonces pour le CES, les startups auralpines devraient également se prêter au jeu pour cette nouvelle édition, en délivrant quelques avant-premières.

C'est par exemple le cas de Symbio, la joint-venture Michelin-Faurecia, qui devrait notamment profiter de sa présence sur un stand au LVCC (Las Vegas Convention Center) pour présenter le prototype de la seconde génération de sa pile à combustible. En cours de développement, la nouvelle version de StackPack (NG2) vise à atteindre « une puissance nette de référence de 130kW à 160kW, nécessaire pour les applications les plus exigeantes telles que les SUV, les pick-ups et les poids lourds. »

Symbio précise que ces premiers systèmes pourront être expédiés et testés par ses clients au premier semestre 2024, tandis que le début de la production en série est prévu pour la fin 2026.

Autre pari, autre pépite : l'isérois Inocel, cofondé par l'explorateur Mike Horn avec l'ancien dirigeant d'Akka Technologies, Mauro Ricci, embarquera avec lui pour la première fois son prototype de pile à combustible, destiné à la mobilité lourde et au stockage pour le présenter entre autres devant les médias internationaux, CES Unveiled. Et cela, malgré sa taille, puisque son module de 700 cellules pèse 100 kg pour un volume de 110 litres, pour des systèmes allant 300 kW jusqu'à 3 mégawatts. Inocel vise une entrée sur les marchés dès 2023 avec des préséries, puis en 2024 à l'échelle industrielle.

Après avoir déjà industrialisé quatre premières générations de son capteur neuromorphique et bioinspiré et levé 50 millions en série C fin 2022, un autre isérois, Prophesee, a quant à lui choisi de louer, non pas un stand mais une suite, au cœur de l'un des plus prestigieux hôtels du salon, le Venezian, afin de rencontrer une centaine de prospects potentiels... Et de leur présenter trois technologies, ciblant chacune un marché clé : un nouveau prototype de capteur, codéveloppé avec le groupe Sony et destiné à l'amélioration de l'image pour le monde de la téléphonie mobile, un second capteur destiné à l'expérience immersive pour les acteurs de la réalité augmentée, ainsi qu'un capteur de détection de présence au sein d'une pièce pour le secteur de l'IOT, codéveloppé avec l'américain Brainchip.

« Ce sera la première fois que nous montrons publiquement ces démonstrateurs, qui seront d'ailleurs pour certains conditionnés à des clauses de confidentialité », glisse à La Tribune Luca Verre, Ceo et cofondateur de Prophesee, qui compte aujourd'hui 110 salariés et trois implantations (Grenoble, Paris et Shangaï).

Enfin, le rhodanien Proovstation, qui a déjà participé à quatre précédentes éditions du CES, est lui aussi de retour cette année afin de présenter deux prototypes de son portique intelligent : l'un destiné au contrôle et à la vente de véhicules d'occasion dédiée aux particuliers, et qui fait déjà l'objet d'un accord de déploiement au sein du réseau de distribution Carrefour en France (avec 5 sites déjà installés et une trentaine prévus dès 2023).

Et le second, codéveloppé avec le groupe Michelin, et qui consiste à proposer une station de mesure intelligente, de pneumatiques au marché des professionnels de l'automobile. « Il s'agit d'une offre dédiée aux professionnels qui n'avaient jusqu'ici pas forcément le temps ni d'outils technologiques à leur disposition pour réaliser le contrôle d'usure des quatre pneus et l'évaluation des besoins en géométrie », confirme à La Tribune Cédric Bernard, Ceo de ProovStation.

Après avoir déjà commercialisé 130 exemplaires de cette station dans 13 pays, il espère désormais conquérir plus particulièrement le marché américain, qui lui permettrait ainsi de doubler son marché potentiel, en ciblant à la fois les centres d'entretien, de réparation et de distribution automobile.

Les dés sont jetés, rendez-vous d'ici quelques mois pour voir quelles seront les premiers gagnants de cette édition 2023 qui parviendront à amener leurs innovations jusqu'auprès du grand public.

Ces pépites qui font partie de la délégation régionale du CES 2023 :

-Rhône : Airxom, Artifeel, Deebee, Face Alive, Matvisio, Miraxess, Proovstation, Senzu, Superwyze, Visual Behaviour, Witekio

-Isère : beFC, Dolphin integration, Meropy, Orioma, Proes

-Drôme : Social Dream, Dracula Technologies

-Puy-de-Dôme : Perfect Memory, Seve'Up

-Savoie : Lexip

-Haute-Savoie : Galeon

Et en dehors du pavillon régional (CEA, etc) :

-Isère : Admir, Earsquared, Greenwaves, Inject Power, Inocel, Prophesee, ST

-Rhône : Y-Brush

-Ain : Akeoplus

-Haute-Savoie : Moonbikes

-Loire : Travel Assist

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