Wisamo : l’aile gonflable de Michelin s’embarque sur un ferry reliant l'Espagne à l'Angleterre

Redonner au vent toute sa place dans les déplacements en bateaux. Telle était la promesse de Wisamo, le projet "écolo" de Michelin qui vise à développer une aile gonflable et rétractable dédiée au transport maritime. Son projet, lauréat d’une enveloppe de 2 millions d’euros de la part du Conseil d’orientation pour la recherche et l’innovation des industriels de la mer (Corimer 2022), s’apprête à franchir une nouvelle étape avec un test grandeur nature sur un ferry mené en conditions hivernales, avant la livraison d’un premier prototype attendu en 2024.
Avec son aile gonflable, Michelin compte générer des économies de carburant pouvant aller jusqu'à 50%. Son projet Wisamo 100 devrait franchir une étape majeure avec l'installation d'une aile de 100m² sur l'un des ferries de la Compagnie Maritime Nantaise effectuant des rotations régulières entre l'Espagne et l'Angleterre.
Avec son aile gonflable, Michelin compte générer des économies de carburant pouvant aller jusqu'à 50%. Son projet Wisamo 100 devrait franchir une étape majeure avec l'installation d'une aile de 100m² sur l'un des ferries de la Compagnie Maritime Nantaise effectuant des rotations régulières entre l'Espagne et l'Angleterre. (Crédits : DR)

C'est l'une des nombreuses voies de diversification « décarbonée » explorées par le groupe Michelin, en droite ligne avec son plan stratégique 2030 « Michelin in Motion » pour évoluer au-delà du secteur du pneumatique.

Wisamo 100 (pour Wing SAil MObility) a pour ambition de proposer au transport maritime une alternative écologique à l'utilisation des carburants. Il ne s'agit pas là de s'appuyer sur l'hydrogène, autre cheval de bataille du géant auvergnat, mais de redonner au vent toute sa place dans les déplacements des bateaux. Comment ? Grâce au développement d'une voile technique, qui pourrait être installée en rétrofit sur les bateaux anciens ou en première monte sur les nouveaux projets.

Michelin n'est évidemment pas le premier à y penser - le vent a toujours été un des éléments majeurs de la navigation maritime même si les moteurs ont pu faire oublier un temps son intérêt -, mais son aile a une particularité différenciante par rapport aux voiles déjà sur le marché ou en cours de développement : elle est gonflable.

« Cette caractéristique entraine une robustesse très importante de la voile, ainsi qu'une facilité d'utilisation très intéressante. Elle peut être rétractée rapidement, pour passer sous un pont par exemple », indique Gildas Quemeneur, initiative leader pour Michelin.

L'homme pilote la trentaine de personnes affectées au projet au sein de Michelin, réparties entre la Suisse, Lyon et Nantes où une bonne partie de l'équipe s'est installée récemment, au cœur d'un écosystème local travaillant au développement d'une filière vélique française (c'est-à-dire dédiée aux bateaux utilisant la propulsion à voile). Wisamo 100 s'appuie sur le rachat par Michelin, il y a deux ans, d'un brevet déposé par Laurent de Kalbermatten et Edouard Kessi, pionniers du parapente gonflable.

20 à 50% d'économie de carburant

L'objectif affiché de Wisamo 100 est de parvenir à une économie de carburant (et donc d'impact carbone) de l'ordre de 20% pour des bateaux rétrofités avec des ailes de 500 à 800m². Pour des bateaux nouvelle génération, pensés pour être bas carbone et prévus pour recevoir des ailes, les gains pourraient être supérieurs à 50% affirme Michelin.

Cette ambition semble avoir séduit les pouvoirs publics, le projet a été retenu tout récemment dans le cadre de l'appel à manifestation Corimer 2022. Une enveloppe de deux millions d'euros, ainsi qu'une avance remboursable d'un million d'euros, lui ont été attribuées pour développer son prototype d'aile gonflable (400 à 800m²) d'ici fin 2024.

D'ici là, Wisamo 100 devrait franchir une étape majeure dans les toutes prochaines semaines avec l'installation d'une aile de 100m² sur l'un des ferries de la Compagnie Maritime Nantaise effectuant des rotations régulières entre Bilbao en Espagne et Poole en Angleterre.

« Il s'agit d'un test très important, un test grandeur nature puisque nous pourrons mesurer et évaluer précisément comment se comportent nos voiles en conditions réelles, et en plein hiver de surcroit », précise Gildas Quemeneur.

Michel Desjoyeaux comme expert et porte-drapeau

Michelin pourra s'appuyer sur l'expertise de ses équipes déjà en place ainsi que sur celles de l'entreprise Air Captif, qu'il a repris l'année dernière et qui est spécialisée dans les modules gonflables à destination notamment des secteurs de l'aéronautique et de la Défense.

L'industriel pourra aussi compter sur les apports techniques de Michel Desjoyeaux qui planche sur ce projet depuis le début aux côtés de Michelin. C'est d'ailleurs sur un des voiliers mis à disposition par le navigateur que Michelin réalise jusqu'ici ses essais (sur le lac de Neuchâtel en Suisse puis près de Royan) et pour lequel il a fabriqué une voile de 100m².

Après ces étapes de développement, Michelin vise les premières opportunités business à horizon 2025/2026 et se positionne d'ores et déjà sur différents appels d'offres.

« L'enjeu de la décarbonation est majeur pour les armateurs. Pour 2035, l'Europe leur impose de nouveaux critères environnementaux avec des taxes carbone associées. En 2050, les normes seront encore réhaussées, la flotte maritime devra réduire son impact carbone par deux. Au vu de la durée de vie des bateaux et des temps de construction, les armateurs sont bien conscients qu'ils doivent se préparer dès à présent ».

D'ici là, Michelin devra être prêt à l'industrialisation. Plusieurs scenariis sont actuellement à l'étude : une fabrication au sein du site Michelin de Vannes ou la création d'une unité de production sur le port de Nantes Saint-Nazaire.

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