Nouveaux ciments, impression 3D : les paris du cimentier Vicat pour produire du béton plus vert

Alors que s'ouvre la semaine européenne du développement durable (SEDD), le dernier cimentier français indépendant, Vicat, multiplie les initiatives pour atteindre son objectif de neutralité carbone à l’horizon 2050. Même si la route est encore longue pour l'une des industries les plus émettrices de CO2, le groupe vient de présenter deux nouveautés : un nouveau liant innovant, qualifié de puits de carbone, et une stratégie de développement dans l’impression 3D.
L'impression 3D pourrait permettre de réaliser une économie de béton allant jusqu'à 70% par rapport à un coulage traditionnel.
L'impression 3D pourrait permettre de réaliser une économie de béton allant jusqu'à 70% par rapport à un coulage traditionnel. (Crédits : Benoit Gillardeau)

Le groupe cimentier rhônalpin Vicat (9.500 salariés et un CA de 3,1 milliards d'euros) s'est fixé un cap : atteindre la neutralité carbone sur sa chaîne de valeur à l'horizon 2050. Un objectif ambitieux, pour un acteur majeur d'un des secteurs industriels les plus émetteurs de CO2. Pour atteindre cet objectif, Vicat doit donc explorer de nombreuses pistes.

Certaines touchent au sujet de l'énergie, comme les projets majeurs de Vicat autour de l'hydrogène vert par exemple (Genvia et Hynovi), d'autres à la valorisation de ses émissions de CO2 issues de son process de production (par exemple, la technologie Carbon8 systems installée depuis 2020 sur son usine iséroise de Montalieu-Vercieu, permettant de capter le CO2 directement dans ses cheminées pour le stocker dans des granulats commercialisables ou encore, sur le même site, la valorisation de la chaleur fatale de ses fours pour cultiver, sur place, des micro-algues).

D'autres, encore, sont directement liées à son cœur d'activité avec le développement de produits moins carbonés. Car depuis quelques mois, Vicat semble accélérer fortement sur ce sujet, avec un axe de travail tout particulièrement mis sur le lancement de ciments et bétons innovants.

Un nouveau béton très bas carbone

Il y a un an, Vicat avait présenté son projet Argilor soutenu par le plan France Relance (13 millions d'euros) consistant à produire, dès 2023, sur son usine de Lorraine une nouvelle argile activée destinée à fabriquer des ciments bas carbone (réduction de 48.500 tonnes de CO2 chaque année, soit 16% des émissions de ce site).

Vicat vient de dévoiler un liant très innovant et « puits de carbone », codéveloppé avec l'entreprise familiale Soler (Aube). Il s'agit, selon le cimentier français, du premier lien carbo-négatif permettant d'obtenir des bétons très bas carbone, avec une réduction de près de 90% de l'empreinte carbone par m3 de béton.

Grâce à une composition réduite en clinker (fortement pourvoyeur de CO2) et enrichie en matière biosourcée (du biochar, reconnue dans le dernier rapport du GIEC pour fixer durablement le carbone et fabriqué à partir de résidus forestiers et agricoles), ce liant affiche un bilan carbone correspondant à un niveau d'émissions nettes négatif de -15 eq CO2 par tonne. Parfaitement dans la ligne de la RE2020 donc, encourageant le stockage durable du carbone biogénique dans les bâtiments.

Ce nouveau liant est pour l'instant produit sur l'usine iséroise de Montalieu-Vercieu, mais Vicat envisage une implémentation sur d'autres sites pour répondre à la demande. Un démonstrateur a été déployé au printemps dernier sur une construction d'Ambérieu-en-Bugey, dans l'Ain, et Vicat attend les agréments pour 2023, avant une commercialisation à grande échelle dans la foulée.

L'impression 3D

Autre nouveauté d'importance : le lancement d'une nouvelle activité, l'impression 3D. Le dernier cimenter indépendant français vient même de créer une marque dédiée, Lithosys.

« Il s'agit d'un axe de décarbonation très important », souligne Laury Barnes-Davin, Directrice scientifique du Groupe. « La 3D peut diminuer jusqu'à 70% le niveau de béton coulé car les structures sont plus creuses d'une part et d'autre part parce que l'impression 3D permet de couler exactement le juste niveau de béton nécessaire : renforcé sur les portions nécessaires, allégé quand c'est possible ».

Vicat travaille sur le sujet depuis 2017, la solution a déjà été éprouvée dans le cadre de plusieurs projets. Notamment pour un récif artificiel avec l'Institut océanographique de Méditerranée, immergée au large de Toulon il y a quelques semaines ou encore pour des murs courbes intégrés à des maisons construites pour une filiale d'Action Logement à Reims.

Pas question aujourd'hui de construire des maisons ou des bâtiments en impression 3D mais de nombreuses applications sont envisagées. Laury Barnes-Davin évoque par exemple des coffrages de nœuds complexes de poutres ou des poses de regards déjà imprimés sur des routes qui permettraient d'éviter des coffrages sur place et donc des blocages de voies.

Depuis 2018, Vicat fournissait déjà à la demande « l'encre » béton pour les clients disposant de leurs équipements d'impression 3D. Avec cette nouvelle marque, Vicat veut aller bien plus loin. L'industriel rhônalpin a investi environ 3 millions d'euros pour mettre en place à Chambéry (sur un des ses sites en cours de revitalisation) son unité de production.

« Nous fournirons les encres avec des formulations spécifiques mais nous allons aussi désormais concevoir et fabriquer les unités de production avec notre propre technologie. Et nous produirons sur place des éléments imprimés, en petite série. Nous étions fournisseur d'encre, nous souhaitons devenir un acteur majeur en France et à l'international du marché de l'impression béton 3D », précise la directrice scientifique de Vicat.

En parallèle de ces initiatives, Vicat poursuit ses développements de béton biosourcé, et notamment de béton de bois (prêt à l'emploi) avec l'objectif, à moyen terme, de réussir à le produire sur ses centrales béton. « Toutes ces directions, toutes ces pistes sont importantes et doivent être poursuivies pour parvenir à notre objectif de neutralité carbone. Nous notons que du côté des clients, nous sommes de plus en plus sollicités sur ces sujets dans le cadre de la RE2020 », conclut Laury Barnes-Davin.

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