Aurobac therapeutics, une coentreprise pour lutter contre l'antibiorésistance

Créer la prochaine génération d'antibiotiques ainsi que des solutions de diagnostic efficaces pour lutter contre l'antibiorésistance. Tel sont les objectifs affichés d'Aurobac therapeutics, une joint-venture entre le laboratoire pharmaceutique Boehringer Ingelheim, le spécialiste du diagnostic in vitro bioMérieux et la société en sciences de la vie Evotec. La société créée aura d'ailleurs son siège social à Lyon.
Aurobac va commencer à travailler sur deux pathogènes responsables d'infections graves, souvent multirésistantes : Klebsiella pneumoniae et Acinetobacter baumannii
Aurobac va commencer à travailler sur deux pathogènes responsables d'infections graves, souvent multirésistantes : Klebsiella pneumoniae et Acinetobacter baumannii (Crédits : bioMérieux/F Dubray)

"L'augmentation des agents pathogènes résistants aux médicaments (ou antibiorésistance), due principalement à une utilisation abusive et inadaptée des antimicrobiens et à un mauvais contrôle des infections, menace notre capacité à traiter des infections courantes", souligne dans un communiqué Michel Pairet, qui dirige l'unité Innovation de Boehringer Ingelheim et membre du Comité de Direction.

"L'antibiorésistance tue environ 1,27 million de personnes dans le monde chaque année et on estime que, d'ici 2050, on pourrait compter 10 millions de décès en raison de l'antibiorésistance, ce qui la rendrait plus mortelle que le cancer", alerte-t-il.

Modèle économique non viable

"Le domaine de recherche des antibiotiques a été abandonné par beaucoup de sociétés pharmaceutiques, à l'exception de quelques grosses entreprises, car le modèle économique n'est pas viable. Le développement d'un nouvel anti-infectieux est risqué, long, coûteux et le retour sur investissement est loin d'être assuré", constate François Lacoste, directeur exécutif Recherche & Développement chez bioMérieux.

En moyenne, les revenus annuels pour un antibiotique sont de l'ordre de 40 millions de dollars alors que le développement coûte de l'ordre d'1 milliard. Il note qu' "actuellement, les principales innovations sont assurées par des startups, qui ont souvent du mal à franchir le stade du développement pré-clinique. Il faut trouver de nouveaux anti-infectieux avec de nouveaux modes d'action et développer un modèle économique favorisant l'accès au marché". Pour lui, il faudrait revoir le modèle économique, actuellement basé sur les volumes de ventes d'antibiotiques. "Il faudrait préserver ces antibiotiques et les considérer comme des « extincteurs », à utiliser le moins possible. Il faudrait en parallèle développer des « détecteurs de fumée », avec des tests diagnostiques capables de déterminer avec certitude si un antibiotique est nécessaire ou non", développe-t-il.

 Problème One health

"La résistance aux antibiotiques est un problème "One health" (une seule santé), c'est-à-dire qu'il concerne la santé humaine, la santé animale et la problématique environnementale. Il faut une approche holistique pour arriver à contrôler ce problème. Il faut arriver à conjuguer utilisation du diagnostic et du traitement approprié, dans les pays en développement et dans les pays développés", estime-t-il.

C'est pourquoi bioMérieux s'est associé à Boehringer Ingelheim et à Evotec pour créer une joint-venture, baptisée Aurobac therapeutics et destinée à créer la prochaine génération d'antibiotiques ainsi que des solutions de diagnostic efficaces pour lutter contre l'antibiorésistance. Aurobac est financée par Boehringer Ingelheim en tant qu'investisseur principal à hauteur de 30 millions d'euros, et par Evotec et bioMérieux à hauteur de 5 millions d'euros chacun, soit 40 millions d'euros au total.

La coentreprise va bénéficier des compétences de ses trois sociétés fondatrices, chacune dans leur domaine : Evotec dans le domaine des maladies infectieuses, Boerhinger pour ses capacités de recherche pharmaceutique et de développement clinique et bioMérieux sur le marché du diagnostic des maladies infectieuses.

"L'OMS a listé une dizaine de pathogènes comme cibles prioritaires. Nous allons commencer par travailler par exemple, sur deux pathogènes responsables d'infections graves, souvent multirésistantes : Klebsiella pneumoniae et Acinetobacter baumannii", précise François Lacoste. L'objectif d'Aurobac sera double : agir sur l'agent pathogène et sur la réponse de l'hôte. "D'une part, nous voulons développer de nouvelles classes thérapeutiques avec de nouveaux modes d'actions et développer l'association entre traitement innovant et diagnostic. D'autre part, nous voulons travailler sur la réponse de l'hôte, en restaurant les fonctions immunitaires en particulier en milieu hospitalier chez des patients souffrant d'infection et en situation critique", développe-t-il.

Une entreprise localisée à Lyon

"La coentreprise est conçue comme une entreprise de biotechnologie hautement agile. Nous combinerons les méthodes de travail d'une start-up à l'expertise et à la puissance d'une entreprise pharmaceutique mondiale orientée vers la recherche", complète Michel Pairet.

Aurobac sera physiquement localisée à Lyon, un choix justifié par "un écosystème important avec les trois entreprises fondatrices, mais aussi une infrastructure hospitalo-universitaire, ainsi qu'un tissu de PME solides qui pourraient être intéressées pour collaborer avec cette joint-venture", note François Lacoste. Actuellement, l'équipe de management est en cours de constitution. "L'objectif est que d'ici la fin de l'année, Aurobac soit opérationnelle au niveau de l'équipe et des locaux, afin de démarrer les projets identifiés", conclut-il.

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