Weezion, la startup medtech dans laquelle BioMérieux investit 2 millions d'euros

Dans le cadre d'une première levée de fonds, la startup Weezion, spécialisée dans le diagnostic in vitro des infections microbiennes dans le sang, a annoncé début mai l'entrée à son capital de BioMérieux à hauteur de 2 millions d'euros.
Weezion développe une solution rapide et économique de diagnostic in vitro des infections bactériennes du sang, basée sur une technologie brevetée de spectrométrie de masse ciblée.
Weezion développe une solution rapide et économique de diagnostic in vitro des infections bactériennes du sang, basée sur une technologie brevetée de spectrométrie de masse ciblée. (Crédits : Weezion)

L'entreprise Weezion a été créée en 2020 par François Vandenesch, Jérôme Lemoine et Hervé Brochette pour valoriser 5 ans de travaux de recherche entre les équipes lyonnaises de l'Institut des Agents Infectieux à l'Hôpital de la Croix-Rousse, du Centre International de Recherche en Infectiologie et de l'Institut des Sciences Analytiques.

L'équipe de Jérôme Lemoine, responsable du laboratoire de bio-analytique à l'Institut des Sciences Analytiques, a mis au point une solution rapide et économique de diagnostic in vitro des infections bactériennes du sang, basée sur une technologie brevetée de spectrométrie de masse ciblée. Cette solution a intéressé BioMérieux, qui vient d'entrer au capital de Weezion, début mai, à hauteur de 2 millions d'euros.

Le sepsis est une infection du sang qui touche 50 millions de personnes dans le monde et qui doit être traitée très rapidement. "Il y a entre 7 et 10 % de taux de mortalité supplémentaire à chaque heure de retard dans le traitement", souligne Hervé Brochette, PDG de Weezion.

Taux d'échec actuel entre 13 et 20%

"Lorsqu'on a ce type d'infection, aujourd'hui on ne peut pas attendre l'identification complète de la bactérie responsable, qui prend entre 3 et 5 heures, voire 24 à 48 heures en routine normale pour identifier sa résistance aux antibiotiques", ajoute-t-il. Le traitement administré au patient est un cocktail d'antibiotiques à large spectre, qui fait le pari qu'un des antibiotiques soit le bon pour traiter la bactérie responsable.

"Si c'est une bactérie plus rare, elle ne répond pas et si c'est une bactérie résistante aux antibiotiques, elle ne répond pas non plus. Actuellement, le taux d'échec en Europe et en Amérique du Nord est entre 13 et 20 %. Outre ces échecs possibles, le fait d'administrer plusieurs antibiotiques à des doses massives peut être difficile à supporter pour le patient, qui mettra du temps à s'en remettre. Et on court le risque de voir se développer des résistances de plus en plus importantes des bactéries", pointe le PDG de Weezion.

Cette résistance aux antibiotiques inquiète énormément l'Organisation mondiale de la Santé (OMS), qui estime que nous risquons le développement de « super bactéries » résistantes dans le futur.

L'équipe de Jérôme Lemoine a travaillé sur l'identification de ces bactéries et sur la prédiction de leur sensibilité aux antibiotiques. "Ils ont trouvé une méthode, basée sur l'analyse par spectrométrie de masse, qui va détecter non plus les bactéries mais les peptides qui sont les éléments constitutifs des bactéries. Chaque chaîne de peptide est spécifique aux bactéries, détaille Hervé Brochette.La deuxième innovation, c'est l'utilisation d'un algorithme qui se sert d'un arbre décisionnel pour détecter les correspondances peptides-bactéries. Plus nous enrichissons notre base de données, plus cet algorithme s'effectue rapidement". La méthode a été brevetée et a été sélectionnée dans le cadre du programme d'investissements d'avenir en 2019. "Cela a permis de financer notre recherche dans le cadre du projet de recherche hospitalo-universitaire IdBIORIV", souligne Hervé Brochette.

Identification de la bactérie en moins de 90 minutes

Avantage de la technologie : elle permet une identification de la bactérie et de sa résistance aux antibiotiques en moins de 90 minutes. "On peut donner un traitement ciblé au patient dans l'heure et demi et on diminue fortement les risques de résistance aux antibiotiques. De plus, le test coûte quelques dizaines d'euros, là où l'alternative à ce type de diagnostic est une analyse génomique coûtant plusieurs centaines d'euros par patient", détaille-t-il.

Parmi les conséquences de ce nouvel outil, Hervé Brochette espère que "les laboratoires, qui ne développent pratiquement que des antibiotiques à large spectre actuellement, pourront développer des antibiotiques ciblés afin de lutter contre l'antibiorésistance".

Le laboratoire BioMérieux s'est d'ores et déjà montré intéressé par cette innovation. "Ils suivaient notre projet depuis plusieurs années et nous ont proposé de participer à notre levée de fonds en avril". Le laboratoire est ainsi entré au capital de Weezion à hauteur de 2 millions d'euros. "Notre choix s'est porté sur BioMérieux car, outre l'aspect financier, ils se sont engagés à nous apporter une aide technique, en particulier réglementaire, pour accélérer la mise sur le marché du produit", indique Hervé Brochette. Les délais pour obtenir une autorisation de mise sur le marché sont en effet importants, de l'ordre d'un à deux ans. "BioMérieux connaît très bien le diagnostic infectieux des bactéries. Ils nous amènent aussi une vue large du marché", apprécie le PDG de Weezion.

Les prochaines étapes pour la startup sont de développer la préparation des échantillons sanguins avant leur analyse par le spectromètre de masse, grâce à un automate de préparation. Il faudra aussi préparer les consommables prêt-à-l'emploi et les logiciels de pilotage des instruments et d'analyse des données. "Nous devons aussi développer un logiciel commercial qui fera l'interface avec le médecin en lui donnant des résultats simples", prévoit Hervé Brochette.

Weezion est actuellement en cours de recrutement de 5 personnes afin d'internaliser progressivement ses compétences. Les essais pré-cliniques ont démarré à l'hôpital de la Croix-Rousse à Lyon sur quelques centaines d'échantillons de patients. Un essai clinique multicentrique devrai débuter début 2024. L'entreprise espère pouvoir mettre son innovation sur le marché en 2025. Le marché potentiel est mondial, y compris dans des pays qui n'utilisent pas encore de diagnostics, vu le bas prix de la solution. Weezion estime son chiffre d'affaires à 40 à 60 millions d'euros par an après 3 ans de commercialisation et à 100 millions d'euros par an après 6 à 8 ans.

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