Covid-19 : le coeur de la recherche contre le virus bat encore en Auvergne Rhône-Alpes

Deux ans après l'arrivée de la pandémie, plusieurs entreprises et institutions d'Auvergne-Rhône-Alpes sont encore mobilisées dans la lutte contre le Covid-19. C'est le cas de la biotech lyonnaise Fab'entech, qui développe non pas un vaccin mais un traitement visant à éviter que les malades du Covid-19 ne se retrouvent en soins intensifs, ou du lyonnais Novasep, dont l'un des sites hexagonaux fabriquera le principe actif de l'antiviral de Pfizer à compter de fin 2022. Ou encore de scientifiques grenoblois, qui ont décrit une interaction essentielle entre deux protéines du SARS-CoV-2, qui pourrait inspirer une nouvelle stratégie thérapeutique contre le virus.
Début février, la biotech lyonnaise Fab'entech s'apprêtait par exemple à démarrer les essais cliniques de son traitement Fab'enCov, qui vise à réduire les complications respiratoires des patients Covid-19.
Début février, la biotech lyonnaise Fab'entech s'apprêtait par exemple à démarrer les essais cliniques de son traitement Fab'enCov, qui vise à réduire les complications respiratoires des patients Covid-19. (Crédits : Fentench, FX Driant)

Nous en parlions déjà l'an dernier : bien placée dans le domaine de la santé, la scène lyonnaise n'a pas été en reste sur le terrain de la recherche contre le Covid-19, même si le vaccin tant attendu du laboratoire Sanofi n'a finalement pas franchi la ligne d'arrivée.

Près de deux ans après l'arrivée de la pandémie, des équipes travaillent toujours sur des axes thérapeutiques mais aussi de recherche.

Fab'entech : un traitement pour neutraliser les complications respiratoires du Covid-19

A commencer par la biotech lyonnaise Fab'entech, spécialisée dans le développement et la production d'anticorps polyclonaux pour lutter contre les maladies infectieuses émergentes ou les risques de bioterrorisme. Elle vient d'accélérer son programme de recherche contre le Covid-19, grâce à un financement d'un programme européen d'un peu plus de 9 millions d'euros.

Son objectif : proposer non pas un vaccin mais un traitement pour limiter les complications respiratoires des patients atteints de Covid-19. Avec un principe : miser sur les anticorps polyclonaux, qui attaquent le virus sur tous les fronts, contrairement aux anticorps monoclonaux, qui se destinaient jusqu'ici à un angle très précis du virus.

"Nous avons été la seule entreprise française sélectionnée par l'incubateur de l'Autorité Européenne de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (HERA)", se félicite Sébastien Iva, président de Fab'entech.

Et c'est ensuite sur les adaptations nécessaires au variant Omicron qu'elle a poursuivi ses recherches : "Notre produit contre le Covid-19, Fab'enCov, a franchi toutes les étapes pré-cliniques. Nous avons testé tous les variants, jusqu'à Omicron. Cela nous donne beaucoup d'espoir dans la capacité de notre produit à apporter une solution thérapeutique car le produit neutralise Omicron à 100 %, avec des doses suffisantes", développe-t-il.

Après avoir reçu fin 2021 l'autorisation de démarrer son étude clinique, d'abord en Grèce sur 30 premiers patients, puis dans quatre autres pays européens, Fab'entech s'apprête donc à démarrer les premiers essais sur l'homme de son traitement début février, Avec l'objectif de tester la sécurité du traitement et la pharmacodynamie des deux doses nécessaires.

"Nous espérons les premiers résultats fin mars, début avril. Nous demanderons ensuite les autorisations dans tous les pays pour la partie d'efficacité sur 400 patients", prévoit-il.

Novasep : produire le principe actif du traitement anti-Covid de Pfizer, le Paxlovid

Le laboratoire lyonnais Novasep, dont le siège est situé à Gerland depuis 2014, a lui-même fait les manchettes en début d'année : c'est lui qui a été choisi par le groupe Pfizer pour assurer la production du principe actif de son traitement anti-Covid, le Paxlovid.

"Novasep a été choisi car nous sommes un partenaire de longue date de Pfizer et que nous n'avons pas attendu la pandémie pour investir sur nos sites français et européens", indique Michel Spagnol, président directeur général du groupe Novasep. L'entreprise a en effet investi 200 millions d'euros en 5 ans sur ses sites français et européens (dont 5 sites en France et un en Allemagne).

"C'est une bonne nouvelle pour le groupe, car c'est le seul traitement précoce qui va être disponible rapidement et qui réduit de 90 % les risques d'hospitalisation", se félicite-t-il.

Pour autant, ce n'est pas sur le siège lyonnais de l'entreprise que Novasep produira la Paxlovid : les premiers lots du médicament devraient être produits à partir du 3e trimestre 2022 au sein de son usine de Mourenx, située près de Pau.

"C'est un délai extrêmement court et nous travaillons dès maintenant avec Pfizer pour faire la mise au point du processus industriel", explique Michel Spagnol.

Le groupe, qui compte actuellement 1250 salariés dans le monde a prévu d'embaucher 40 nouveaux collaborateurs sur le site de Mourenx, dédiés à la production de ce produit.

"Pour le futur, nous allons implémenter la fabrication sur d'autres sites", prévoit le PDG. En 2021, Novasep a réalisé un chiffre d'affaires de 360 millions d'euros, toutes activités confondues.

A Grenoble : des travaux qui pourraient déboucher sur une nouvelle stratégie thérapeutique ?

Côté grenoblois, des scientifiques du CEA, de l'Université Grenoble Alpes (UGA), du CNRS et du Synchrotron ont quant à eux décrit pour la première fois une interaction essentielle entre deux protéines du SARS-CoV-2.

Ils avaient choisi d'étudier la nucléoprotéine N, l'une des protéines les plus abondantes du virus, et une composante majeure de son complexe de réplication-transcription. La nucléoprotéine N est également impliquée dans la protection du génome viral contre le système immunitaire intracellulaire de l'hôte.

"Dans mon laboratoire, nous sommes spécialistes dans la spectroscopie par résonance magnétique nucléaire (RMN) pour regarder le comportement dynamique des protéines. La RMN c'est l'outil parfait pour étudier ce genre de protéine. En effet, contrairement à la protéine Spike, on n'entend pas beaucoup parler de la nucléoprotéine N, car elle est très difficile à étudier, n'ayant pas de structure tridimensionnelle stable", explique Martin Blackledge, directeur de recherche au CEA, à l'institut de biologie structurale (IBS) à Grenoble.

Pour autant, elle présentait un atout majeur : "On s'est rendus compte rapidement qu'il y avait une interaction entre cette nucléoprotéine et une autre protéine virale, appelée nsp3a. Cette interaction est essentielle : sans elle, le virus ne fonctionne pas".

L'interaction entre ces deux protéines permet en effet à la nucléoprotéine N de se positionner sur l'ARN au niveau du site de production du génome viral, donnant ensuite lieu à la réplication du virus.

La protéine N vient ainsi envelopper nsp3a en formant un assemblage moléculaire très compact, qui peut réguler l'interaction de N avec l'ARN viral.

"Actuellement, nous ne savons pas exactement où cette interaction a lieu ni quand, mais nous savons qu'elle est essentielle. Cette découverte permettra de développer de nouveaux modèles pharmaceutiques qui pourraient inhiber cette interaction en la prenant pour cible", affirme le chercheur.

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