Les biotechs à suivre 1/5. Gaoma therapeutics : enfin un candidat-médicament pour l'épilepsie

SERIE 1/5. Auvergne Rhône-Alpes, terre de biotechs ? En vertu d'un écosystème historique en matière de recherche en santé, la région a elle aussi pris assez tôt le virage de ces jeunes pousses innovantes. La Tribune a sélectionné 5 pépites à suivre : parmi elles, trouvera-t-on le Moderna de demain ? Avec, pour commencer, Gaoma therapeutics, qui développe un candidat-médicament pour l'épilepsie, un domaine jusqu'ici laissé sur le bord de la route en matière d'innovation. Elle envisage de lancer les études cliniques chez l'homme dès 2023.
Gaoma therapeutics, qui développe un candidat-médicament à base de lipides, a déjà bouclé une première levée de fonds d'un million d'euros auprès de Business angels spécialisés en santé fin mars 2021.
Gaoma therapeutics, qui développe un candidat-médicament à base de lipides, a déjà bouclé une première levée de fonds d'un million d'euros auprès de Business angels spécialisés en santé fin mars 2021. (Crédits : DR)

L'épilepsie atteint 50 à 70 millions de personnes dans le monde. C'est une pathologie complexe, avec une diversité de causes et de formes. Elle va de la crise convulsivante assez spectaculaire, jusqu'à l'absence temporaire pouvant passer inaperçue pour l'entourage.

Malgré cette variété de symptômes, le point commun entre l'ensemble des patients atteints d'épilepsie reste l'aspect handicapant des troubles dont ils souffrent, mais aussi le fait que les traitements sur le marché sont souvent des « anti-crises », pas nécessairement bien tolérés.

"80 % des patients font face à des effets indésirables et 40 % ressentent des effets qui impactent fortement leur qualité de vie : troubles mnésiques, troubles de l'apprentissage, troubles du spectre anxio-dépressif, nausées, etc.", détaille Jordan Guyon, CEO de Gaoma therapeutics.

De ce fait, certains patients préfèrent arrêter leur traitement. De plus, 30 % des patients sont résistants à ces traitements. "La troisième limite de ces médicaments, c'est que ce sont des traitements symptomatiques, qui n'adressent que les crises. Or, l'épilepsie ce ne sont pas que les crises : ce sont aussi des troubles cognitifs, psychiatriques ou comportementaux. Les médicaments anti-crises ne sont pas efficaces pour ces troubles", souligne-t-il.

Un médicament dérivé d'un lipide

Le candidat-médicament développé par la jeune pousse lyonnaise Gaoma therapeutics s'est donc donné pour objectif de répondre à ces besoins médicaux avec une solution innovante, dérivée d'un lipide endogène, c'est-à-dire naturellement exprimé dans le corps humain.

"Les lipides ont souvent souffert d'une mauvaise image. Ils ont été mis de côté pendant des années car on les considérait comme des molécules de structure. Mais à partir de la fin des années 80, les chercheurs ont commencé à s'intéresser à leurs propriétés bioactives et pharmacologiques. Ce sont des molécules qui peuvent activer et désactiver des cibles", explique Jordan Guyon.

Il souligne qu' "il n'y a pas beaucoup de gens qui travaillent sur les lipides : c'est un champ d'exploration très vaste : la lipidomique". L'équipe de Gaoma therapeutics a conçu une molécule dérivée d'un lipide, qui agit sur deux composantes de la physiopathologie de l'épilepsie : la neuro-inflammation et la plasticité cérébrale. "La molécule va réguler ces deux éléments et avoir un effet anti-épileptique et pas seulement anti-crise", explique Jordan Guyon.

La jeune pousse se fonde sur les travaux de recherche en épileptologie menés par l'équipe TIGER (Groupe de Recherche Translationnelle et Intégrative en Epilepsie) du Centre de Recherche en Neurosciences de Lyon. Un des co-fondateurs académiques de Gaoma therapeutics, Jacques Bodennec, a passé plusieurs années à effectuer des recherches en biochimie sur les lipides.

"Nous avons déposé un brevet via la SATT Pulsalys, qui nous a servi de base à la création de l'entreprise", précise Jordan Guyon. Gaoma therapeutics compte 6 personnes. "La particularité de l'équipe c'est la diversité des profils de ceux qui la composent : il y a des personnes spécialisées dans l'épilepsie, d'autres dans les mécanismes cognitifs et d'autres dans la recherche sur les lipides".

Maladies neurodégénératives

Actuellement, la jeune pousse en est au développement pré-clinique non-réglementaire. La preuve de concept a été obtenue grâce à des tests sur les animaux. "Les études pré-cliniques ont permis d'observer un effet de notre candidat-médicament. Même après arrêt du traitement, l'effet se maintenait de quelques jours à plusieurs semaines. C'est potentiellement une molécule qui permet de modifier la maladie et pas de traiter uniquement un symptôme", souligne Jordan Guyon.

"Nous avons obtenu une bourse Frenchtech émergence avec BPI France pour réaliser quelques études pré-cliniques. Nous avons pu observer des résultats préliminaires prometteurs permettant de montrer que la molécule a des effets dans d'autres pathologies que l'épilepsie". En effet, outre l'épilepsie, les vecteurs lipidiques et les composés anti-inflammatoires développés par l'entreprise pourraient avoir des applications potentielles pour des pathologies neurodégénératives, comme les maladies d'Alzheimer ou de Parkinson.

Fin mars 2021, Gaoma therapeutics a effectué une première levée de fonds d'un million d'euros auprès de Business angels spécialisés en santé. La jeune pousse a par ailleurs été lauréate du concours d'innovation i-Lab 2021.

"Notre prochaine levée de fonds aura lieu en début d'année prochaine, pour continuer le développement du produit dans l'épilepsie, mais aussi pour travailler sur d'autres projets", prévoit le CEO, qui rappelle qu'il faut plusieurs millions d'euros pour arriver jusqu'en phase I de développement. "Nous aimerions commencer les études cliniques chez l'homme en 2023", envisage-t-il.

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