Loi travail, l'occasion ratée

Alors que la loi travail a été définitivement adoptée ce jeudi 21 juillet, cette initiative s'est faite avec une stratégie de communication défaillante du gouvernement, un manque d'anticipation sous-évaluant l'agenda parsemé d'échéances printanières pourtant assez visibles. L'exécutif n'a pas préparé l'opinion publique sur l'utilité de ce projet en expliquant, exemples à l'appui, ses effets positifs sur l'emploi. Bruno Dupuis, senior advisor, Alixio.
(Crédits : Alixio)

En 2012, le directeur du centre de recherche du BIT coordonnateur du Rapport sur l'emploi dans le monde me disait : "En France vous produisez des rapports intéressants sur ce qu'il faudrait faire pour améliorer le fonctionnement du marché du travail, ce qui est compliqué chez vous c'est le passage à la phase de mise en œuvre !"

À cette aune, 2015 a été un grand cru avec à la saison des vendanges trois rapports : celui de Jean-Denis Combrexelle remis au Premier ministre, ceux de Terra Nova  et de l'Institut Montaigne sans compter l'essai Badinter Lyon-Caen admettant le caractère contreproductif d'un droit du travail devenu illisible par son surpoids.

Alignement des planètes

Toutes les planètes semblaient alors alignées. Ces rapports convergeaient dans un élan œcuménique, vu la sensibilité politique différente de leurs auteurs, vers des conclusions assez proches pour refonder le droit du travail.

Tous préconisaient d'ouvrir au plus près des situations où les problèmes se posent (c'est-à-dire le plus souvent l'entreprise) des fenêtres de négociation, une fois posé un cadre de jeu pour les acteurs (ordre public absolu et dispositions supplétives). Jean-Denis Combrexelle proposait un second étage au niveau de la branche avec des dispositions encadrantes. Ces rapports ont été globalement bien accueillis par les partenaires sociaux.

Défaillance

Quelques mois plus tard, le projet de loi travail dans sa première version assez obèse par l'ampleur des sujets traités a été l'occasion de passer aux travaux pratiques et a fait l'objet d'un rejet de l'ensemble des OS, crispation qui lui a fait prendre un mauvais pli de départ.

Lire aussi : À Lyon, le mouvement s'accentue contre la loi Travail

Cette initiative s'est faite avec une stratégie de communication défaillante du gouvernement, un manque d'anticipation sous-évaluant l'agenda parsemé d'échéances printanières pourtant assez visibles : congrès d'une CGT en crise et se positionnant sur une ligne radicale, négociation délicate sur l'organisation du temps de travail dans la branche ferroviaire, juste avant l'Euro 2016.

Occasion ratée

En annonçant la réforme du Code du travail à l'automne, puis lors des vœux sans en faire la pédagogie, le gouvernement n'a pas préparé l'opinion publique sur l'utilité de ce projet en expliquant, exemples à l'appui, ses effets positifs sur l'emploi.

C'est une occasion ratée. Elle a ouvert une tribune aux insiders de divers horizons les moins concernés par le projet pour engager une bataille politique avec, en toile de fond, la place respective des centrales syndicales et la recomposition du paysage politique à gauche.

 Tribune initialement publiée dans le magazine, en kiosques depuis le 25 juin.

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