Biovision : "Biotechs et medtechs échappent au risque de bulle"

Forum mondial des sciences du vivant, Biovision tient actuellement sa 11e édition, à la Cité Internationale de Lyon. Le savant mélange entre réflexion prospective et action économique semble opérer. À l'ancrage historique dans l'écosystème des sciences et de la santé à Lyon se greffe une dimension très économique, avec deux événements parallèles pour la détection et le financement de projets innovants (Catalyzer et Investor Conference). Quels challenges à venir pour la place de Lyon ? Quelles jeunes pousses suivre ? Dans l'effervescence de Biovision, nous avons rencontré Christophe Dercamp, son directeur général.

Acteurs de l'économie - La Tribune. Biovision est devenu un événement régulier qui semble bénéficier d'une réelle notoriété. En quoi cette manifestation se distingue-t-elle des nombreuses autres dans le domaine des sciences de la vie, et notamment des biotechs ?

Christophe Dercamp, directeur général. Biovision propose une approche unique pour favoriser les rencontres, les connexions et les collaborations entre des décideurs internationaux provenant de quatre mondes différents : le monde académique, celui politique, la société civile et le secteur privé. Dans ce dernier, on retrouve à la fois les grands groupes pharmaceutiques, les fonds d'investissement, les startups early stage et les jeunes entrepreneurs.

Le savoir-faire et la singularité de Biovision repose une équilibre précis. D'un côté, une dimension prospective, avec quatre grands thèmes de débats, et de l'autre, une dimension très économique.

L'écosystème lyonnais est-il mobilisé pour pérenniser cet événement, et en particulier pour assurer son rayonnement international ?

Biovision est soutenu par les principaux acteurs publics (la métropole de Lyon et la région Auvergne Rhône-Alpes) depuis sa création en 1999, avec la volonté de mettre l'innovation au cœur des préoccupations.

De ce fait, la 11e édition est construite en lien avec l'écosystème lyonnais, d'où des problématiques autour des enjeux de notre territoire concernant les vaccins, le cancer et les objets connectés.

Lyon occupe une place prépondérante dans les sciences de la vie à l'international, dont bénéficie Biovision. L'événement contribue également au rayonnement de l'écosystème en densifiant certains échanges qui participent à l'implantation d'acteurs économiques sur le territoire et à l'émergence de projets et de sociétés.

Cette manifestation est ancrée dans l'international depuis ses premiers temps, s'est imposée comme un lieu d'échange et de rayonnement, et aujourd'hui comme une place de business de premier plan.

De quelles grandes thématiques de recherche à Lyon s'inspirent les sujets de réflexion à Biovision ?

La particularité de cette édition est de s'inscrire dans une démarche très participative. Chaque thématique a été travaillée avec les partenaires et acteurs au plus près des enjeux soulevés par les grandes thématiques de recherche ; une démarche exigeante, garante de la pertinence des questions discutées lors de Biovision et des experts présents pour les porter.

La thématique "Vaccins du futur", a été construite avec le consortium de recherches vaccinales (CoReVac) et l'Alliance nationale pour les sciences de la vie et de la santé (Aviesan). Celle "Prévention Cancer" a été préparée avec le Cancéropôle Lyon Rhône-Alpes Auvergne (Clara) et le Centre International de Recherche sur le Cancer (CIRC). La thématique portant sur le "Patient digital" a été élaborée avec le pôle de compétitivité Lyonbiopôle et les Hospices Civils de Lyon. Enfin, une quatrième réflexion, autour de la contribution des "Sciences humaines à la médecine" a largement impliqué l'Université de Lyon.

Concrètement, en quoi Biovision apporte-t-il des solutions pour le citoyen ?

Pendant deux jours et demi, Biovision réunit des scientifiques des secteurs public et privé, des entrepreneurs qui sont à l'avant-garde de l'innovation et qui ont la capacité de briser des règles, d'apporter des idées nouvelles et de pouvoir offrir de vraies transformations.

D'où la création de deux nouveaux parcours, Catalyzer et Investor Conference, qui ont vocation respectivement à faire émerger des projets ou à permettre des levées de fonds. Ces deux parcours permettent d'accélérer les processus de décision.

In fine, l'intérêt pour le citoyen est de pouvoir bénéficier plus rapidement de nouvelles solutions thérapeutiques.

Notre objectif est d'offrir un cadre complètement décloisonné, avec une recherche d'éclairage par des scientifiques qui ne viennent pas nécessairement de l'univers des sciences de la vie. Nous accueillerons également la finale du concours de startups Big Booster et la volonté est de faciliter les passerelles entre tous les acteurs.

À travers Catalyzer et Investor Conference, le souhait de Biovision est de s'afficher depuis l'identification de projet jusqu'à son financement ...

Catalyzer et Investor Conference constituent le volet entrepreneurial de Biovision, par la mise en relation des porteurs de projets et des startups avec des partenaires académiques, industriels, et financiers, pour faire émerger au plus vite les innovations qui apporteront demain un bénéfice au plus grand nombre.

On retrouve une continuité depuis les débats d'idées (dimension Prospective), leur traduction en projets et en startups (dimension tremplin de Catalyzer) puis leur développement grâce aux levées de fonds (dimension Investor Conference).

Les deux parcours se succèdent, car Catalyzer est dédié aux porteurs de projets et aux startups au début de leur création en recherche de reconnaissance, de collaborations et de fonds d'amorçage. Investor Conference sélectionne, quant à elle, des sociétés de biotech et medtech déjà bien installées, qui disposent de brevets, et sont en recherche de levées de fond de Série A (de 1 à 2 millions d'euros) et Série B (de 2 à 10 millions d'euros).

Tous vont pitcher devant des jurys dédiés et c'est donc le type de partenaire recherché et le stade de développement qui diffèrent essentiellement. Raison pour laquelle la composition des jurys est très différente : le comité de sélection pour Catalyzer est composé de représentants académiques, d'industriels, d'entrepreneurs et de partenaires de fonds d'amorçage. Le jury d'Investor Conference rassemble, lui, les représentants des principaux fonds d'investissement européens (soit une vingtaine).

biovision

Sur la scène internationale, quelle est la portée de Catalyzer et Investor Conference ?

En termes de notoriété, Biovision peut s'enorgueillir d'avoir présenté et distingué des success stories, par la suite repérées par des fonds américains. On peut dire aujourd'hui que le label Biovision ouvre une porte vers le succès et que les prix décernés ont une véritable valeur pour lever ensuite des fonds plus importants et plus rapidement.

Les 20 fonds européens présents sont aux premières loges pour repérer les projets prometteurs et faire leurs choix d'investissement futurs. Nous nous plaçons véritablement dans un modèle gagnant/gagnant avec la vocation d'aller plus loin. De nombreux partenariats, notamment financiers, naissent d'ailleurs à l'occasion de Biovision.

On ne distribue pas d'argent et on ne vise que la qualité, pas la quantité, donc on ne garde que les meilleurs ! La sélection en amont est la valeur ajoutée et le gage de la reconnaissance sur la scène internationale.

Peut-on faire confiance à Biovision pour identifier les jeunes pousses à suivre demain ? Des exemples du passé ?

Aujourd'hui le parcours des lauréats de Catalyzer et Investor des précédentes éditions est époustouflant, comme Gensight, Cell Novo, Geneuro, Diabeloop ou Fineheart. On voit aujourd'hui que les fonds d'investissement s'affranchissent de certains codes et font confiance aux biotechs lyonnaises, françaises et européennes.

Reste à espérer que le cru des lauréats révélé à l'issue de cette 11e édition connaisse le même succès.

De manière plus générale quelle évolution voyez-vous dans les relations entre jeunes pousses biotechs et grands groupes pharmaceutiques ?

Par le passé, beaucoup de sociétés de biotechnologies s'arrêtaient au brevet qu'elles revendaient, car elles étaient beaucoup plus frileuses. Aujourd'hui elles vont au-delà et font de la production, visent les marchés, etc. On assiste à une véritable prise de conscience de l'importance des affaires réglementaires et de la propriété intellectuelle pour amener un produit sur le marché.

On n'accompagnait pas non plus autant l'entrepreneuriat comme on le fait aujourd'hui (avec la Bpi notamment). Une jeune pousse a par ailleurs moins de contraintes qu'un grand groupe pour aller plus vite dans le développement de molécules.

Parallèlement, les grands groupes sont actuellement moins en recherche de brevets, mais cherchent davantage à investir dans les biotechs et medtechs à travers des fonds dédiés, et avec un retour sur investissement.

Leur positionnement est désormais davantage dans l'accompagnement de l'entrepreneuriat, et la propriété intellectuelle des startups françaises est mieux protégée.

Au regard des dernières importantes levées de fonds par certaines biotechs lyonnaises, françaises et européennes, peut-on imaginer un risque de "bulle" ?

Comparé à la bulle informatique, nous ne sommes pas du tout sur le même schéma ! L'essor des biotechs ne repose pas "juste" sur une nouvelle technologie, mais sur une prise en considération de tout le process, jusqu'à l'arrivée sur le marché.

La qualité de la sélection est reconnue par les fonds d'investissement grâce à toutes les structures impliquées. Le cadre qui accompagne les levées de fond des futures success stories est beaucoup mieux défini.

La levée d'argent auprès d'un fonds d'investissement est souvent un gage de sérieux, un signal, pour les autres fonds. La science progresse continuellement et très vite, et une levée de fond reflète la mise en place de procédures qui garantissent une arrivée sur le marché des biotechs et medtechs.

L'obtention de molécules ou de nouvelles technologies est effectivement bien cadrée avec toutes les règles du développement clinique.

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