JO, Expo universelle, et si leur vraie valeur économique était immatérielle ?

Les grands évènements mondiaux tels que les Jeux Olympiques ou l'Exposition Universelle font régulièrement l'objet de questionnements économiques. D'aucuns défendent qu'il faut accepter leur coût parce qu'ils sont marquants pour l'humanité toute entière voire cruciaux, même, pour son équilibre. Toutefois, s'ils pouvaient être créateurs de richesses, ce ne serait que mieux, nul n'en disconvient. Mais selon cette hypothèse, comment obtenir la combinaison positive des intérêts socio-culturels et économiques ? Par Alan Fustec, fondateur de Goodwill-Management.

Le capital immatériel est, à l'origine, un concept de micro-économie qui désigne toute la richesse extracomptable d'une entreprise. Il comprend la valeur des clients, des équipes, des marques, des brevets et savoir-faire, des systèmes d'information, etc. Aujourd'hui, l'immatériel représente environ 2/3 de la valeur des entreprises. Leur valeur comptable n'est, en moyenne, que d'un tiers[1]. Les normes comptables, par prudence, ne prennent pas en compte les actifs immatériels jugés trop volatils. Ne pas mesurer cette richesse c'est accepter que l'essentiel de la valeur ne soit pas sous contrôle. Plus récemment, la méthode a été déclinée pour établir la valeur de territoires : quartiers, villes, régions et pays. La liste des composants de la valeur immatérielle s'allonge alors: valeur culturelle et historique, stabilité géopolitique, etc.

L'immatériel représente 86 % de la richesse totale de la France

Un fort mouvement en faveur de la mesure du capital immatériel a vu le jour il y a une petite dizaine d'années un peu partout dans le monde. La Banque Mondiale a ainsi mesuré la valeur immatérielle de nombreux pays (120 au total) parmi lesquels celle de la France. L'immatériel représente 86 % de sa richesse totale.

En France, les membres de l'Observatoire de l'Immatériel, en utilisant la méthode de la Banque Mondiale mais aussi la méthode française de mesure des actifs immatériels, établissent la valeur immatérielle des entreprises comme des territoires. Les résultats obtenus sont riches d'enseignements. Ils sont présentés sous forme de notes (ex : capital humain 14/20) et en euros. Ils constituent un puissant outil d'aide à la décision, notamment parce que les évaluations notées portent sur toutes les caractéristiques de chaque actif (force et faiblesses des marques, des hommes, des entreprises, de l'organisation...).

loiret

Fig 1 : La valeur du département du Loiret. Elle est immatérielle à 71 %.

Mesurer la valeur d'un événement

Si la mesure de la valeur d'un territoire est possible, la mesure de la valeur d'un événement qui s'y déroule l'est tout autant. Pour y parvenir deux approches sont combinées :

  • D'une part en mesurant la valeur du territoire avant et après l'événement. Ce calcul est réalisé à titre prévisionnel (quelles sont les retombées attendues) et a posteriori bien sûr.
  • D'autre part en étudiant une à une toutes les caractéristiques de l'événement avec ses coûts et ses bénéfices.

Dans un monde parfait, les deux résultats doivent être identiques, de même que la rentabilité constatée dans un compte de résultat correspond à la variation de valeur d'un bilan d'une année sur l'autre, comme le montre le schéma ci-dessous. Mais comme certaines informations ne sont pas disponibles, les deux approches donnent des résultats différents et la valeur finale s'établit par recoupements.

JOPARIS

Fig 2 : Deux approches sont nécessaires pour établir la valeur globale d'un évènement sur un territoire

Le principal apport de cette approche c'est de pouvoir mesurer des variations de valeur qui, bien que réelles sont ignorées par la finance classique : prise de valeur des marques, des savoir-faire, du capital « touristes », de la qualité des infrastructures, des partenariats, de la motivation des salariés, ...

Peut-on prédire ce que cette démarche produirait pour les Jeux Olympiques ?

Pour tenter de répondre à cette question, certains pronostics seraient hasardeux mais d'autres ne le sont pas: il est bien sûr impossible de se prononcer sur le signe d'un bilan économique, positif ou négatif, avant de l'avoir établi.

En revanche, nous pouvons affirmer que les bilans économiques classiques donnent toujours des résultats très en dessous de la réalité compte tenu du poids de la valeur immatérielle dans l'économie d'aujourd'hui. Dans un pays étranger, par exemple, nous avons pu montrer que la valeur apportée par une nouvelle ligne de chemin de fer à son territoire était plus de trois fois supérieure à celle obtenue par un bilan socio-économique classique.

[1] Valoriser le capital immatériel de l'entreprise. Alan Fustec et Bernard Marois, Editions d'Organisation, 2006.

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Commentaire 1
à écrit le 07/06/2015 à 11:34
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Je ne comprends pas que les élus du Loiret ne réagissent à ce pseudo-bilan de la richesse du département. Décomposer en termes comptables le patrimoine immatériel de cette sublime région c'est une caricature et de la comptabilité, et de l'économie, e...

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